Fil d'Ariane
Au moins 21 personnes, principalement des manifestants, ont été tuées dans les violences entre manifestants et policiers au Mozambique. Les tensions se sont ravivées, au lendemain de la confirmation de la victoire électorale contestée du parti Frelimo, au pouvoir depuis 1975.
Des manifestants se dispersent alors que la police se déploie à Maputo, Mozambique, jeudi 7 novembre. AP/ Carlos Uqueio.
Le gouvernement mozambicain a annoncé mardi 24 décembre au soir un bilan de 21 morts, dont deux policiers, en 24 heures dans ces violences post-électorales.
Après une nuit de violences et plus de deux mois de manifestations depuis le scrutin présidentiel du 9 octobre, la capitale Maputo est restée figée dans un climat de peur à la veille de Noël.
Les principales routes menant à Maputo ont été entravées mardi par des barricades et pneus incendiés, dégageant d'âcres panaches noirs. Celle menant à l'aéroport est restée impraticable une bonne partie de la journée, a constaté l'AFP.
Des dizaines de manifestants se sont groupés vers l'entrée principale de l'aéroport international et ont mis le feu à des containers à proximité. Aucun vol n'a cependant été annulé.
La police, en véhicules blindés, a patrouillé le centre-ville, où des centaines de manifestants, répartis en petits groupes épars, sont revenus dans l'après-midi autour des barrages sur les grands axes, faits de rondins et de blocs de pierre.
De nombreux commerces - boutiques, banques, supermarchés, stations-service... - et bâtiments publics avaient été mis à sac la veille, leurs vitrines brisées et leurs contenus pillés, ou incendiés.
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"L'hôpital central de Maputo fonctionne dans des conditions critiques, plus de 200 salariés n'ont pas pu se rendre" au travail, a affirmé à l'AFP Mouzinho Saide, son directeur. Il a précisé avoir reçu près de 90 blessés, "dont 40 par armes à feu et quatre à l'arme blanche".
La plupart des riverains sont restés terrés chez eux, les transports publics paralysés. Seuls les véhicules funéraires et les ambulances ont circulé.
L'Union européenne a fait part mardi de son "extrême inquiétude" face aux violences, appelant "toutes les parties à la retenue".
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Des véhicules, des commissariats ou postes de péage sur les routes, ont aussi été vandalisés dans la partie septentrionale du pays, selon les médias locaux, où l'opposition est forte.
En tout, 236 "actes de violences graves" ont été répertoriés dans le pays lusophone d'Afrique australe dans les dernières 24 heures. Elles ont fait aussi 25 blessés dont 13 policiers, a détaillé le ministre de l'Intérieur devant la presse mardi soir.
"Des groupes d'hommes utilisant des armes blanches et des armes à feu ont mené des attaques contre des commissariats, des centres de détention et d'autres infrastructures", a-t-il affirmé, précisant que 86 détenus s'étaient fait la belle dans le tumulte.
La contestation post-électorale sans précédent a déjà fait plus d'une centaine de morts et le principal opposant Venancio Mondlane, 50 ans, qui revendique la victoire, a appelé à durcir le mouvement.
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Les Mozambicains réclament "la vérité électorale", a-t-il répété. "Nous devons continuer le combat!"
Malgré les irrégularités soulevées par nombre d'observateurs lors du scrutin présidentiel, le Conseil constitutionnel a confirmé lundi 23 décembre l'élection de Daniel Chapo, candidat du Frelimo, à la présidence avec 65,17% des voix. Moins que les 71% des suffrages annoncés par la commission électorale en octobre. À l'Assemblée nationale, le parti conserve une large majorité de 171 sièges sur 250.
"Venancio", comme l'appelle la rue, ne désarme pas, accusant mardi, dans un nouveau message sur les réseaux sociaux, le Conseil constitutionnel de "légaliser la fraude" et "l'humiliation du peuple".
"Nous voulons créer une Cour constitutionnelle populaire, qui consacrera Venancio Mondlane comme président. Je serai assermenté et investi" par celle-ci, a-t-il ajouté.
Le parti d'opposition Podemos, auquel s'est adossé "Venancio" lors de la présidentielle, a dénoncé devant la presse "le manque de transparence, d'intégrité et de professionnalisme" de la plus haute cour du pays, inféodée selon lui au pouvoir.
Daniel Chapo, ancien gouverneur provincial qui doit prendre ses fonctions à la tête de l'Etat mi-janvier, a promis lundi de "continuer à parler à tout le monde", y compris avec le premier opposant.