L'Afrique du Sud fragile économiquement ? Sa note a été reléguée lundi 3 avril à la catégorie spéculative, ce qui signifie "pays où il est risqué d'investir". Conséquence de l'inquiétude des marchés financiers provoquée par le limogeage la semaine dernière du ministre des Finances Pravin Gordhan. Le principal syndicat du pays appelle le président Zuma à la démission. Analyse depuis Le Cap de Patricia Huon.
Depuis plusieurs mois déjà, la bataille faisait rage entre le président sud-africain, englué dans des scandales politico-financiers, et son ministre des Finances, qui menait une lutte acharnée contre la corruption. Surnommé "Monsieur Propre", Pravin Gordhan avait pourtant le soutien d'une partie du gouvernement et des marchés financiers. Mais jeudi dernier, Jacob Zuma s'est débarrassé de son détracteur à l'occasion d'un remaniement gouvernemental. C'est à l'un de ses fidèles que le chef de l'Etat a attribué le portefeuille du Trésor.
Une réaction immédiate des marchés financiers
La réaction des marchés financiers ne s'est pas faite attendre. Ils ont rapidement sanctionné ce coup de balai. Le rand sud-africain a perdu 7% de sa valeur depuis vendredi face au dollar. Lundi, l'agence de notation Standard & Poor's a dégradé la note souveraine du pays en catégorie spéculative (BB-), blâmant l'incertitude politique et institutionnelle aggravée par le remaniement. L'agence Moody's a, quant à elle, placé le pays sous surveillance en vue d'une éventuelle dégradation. Le principal syndicat du pays, la Cosatu, a appelé à la démission de Jacob Zuma. Selon le patron du syndicat, le président "a été négligent et imprudent" et cette dégradation risque de "coûter très cher au pays".
Tensions au sein de l'ANC
Cette situation entraîne de vives tensions au sien du parti au pouvoir l'ANC. Le parti se déchire en effet autour de la succession de Jacob Zuma qui doit quitter la présidence en décembre prochain. Le remaniement de ce jeudi est largement interprété par certains comme une tentative de la part du président actuel de verrouiller la direction du parti. Le chef de l'état soutient la candidature de son ex-épouse Nkosazana Dlamini-Zuma contre l'autre favori, Cyril Ramaphosa. En cas de victoire de l'ANC aux prochaines élections générales de 2019, le leader du parti deviendrait alors le futur président sud-africain.