Fil d'Ariane
Selon les résultats provisoires dévoilés mercredi par la Commission électorale nationale autonome (Cena), le camp présidentiel a remporté 81 des 109 sièges au parlement, contre 28 au principal parti d'opposition, Les Démocrates. Les résultats définitifs sont attendus vendredi.
Ce scrutin doit marquer le retour de l'opposition au parlement après quatre ans d'absence, car elle n'avait pu participer aux précédentes législatives en raison d'un durcissement des règles du scrutin par le pouvoir.
Lors d'une conférence de presse tôt jeudi 12 janvier au matin, le chef des Démocrates, Eric Houndete, a dénoncé un bourrage des urnes, des trucages et des achats de vote "flagrants" par les deux principaux partis pro-pouvoir, sans toutefois fournir des preuves dans l'immédiat.
"Le parti des Démocrates rejette ces résultats, qui ne reflètent pas la volonté du peuple de faire de nous la première force politique du pays", a déclaré M. Houndete. "Les scores attribués aux deux partis siamois (pro-Talon) n'ont pu être atteints qu'avec des combines mises en place pour fausser le jeu démocratique", a-t-il ajouté.
Un rejet déjà exprimé dès l'annonce des résultats par Eugène Azatassou, vice-président des Démocrates, sur TV5MONDE.
Ni le Cena ni les partis pro-Talon n'ont réagi dans l'immédiat aux déclaration des Démocrates.
Une mission d'observation de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) a jugé que le scrutin de dimanche s'était déroulé pacifiquement et conformément aux règles en vigueur.
Les dernières législatives organisées en 2019 avaient été marquées par des violences meurtrières, une abstention record (plus de 70%) et une coupure totale de l'internet, des faits rarissimes au Bénin.
En l'absence de l'opposition, seules deux formations de la mouvance présidentielle avaient été autorisées à concourir, donnant un Parlement entièrement acquis au président Talon.
Deux des principaux adversaires du président, le constitutionnaliste Joël Aïvo et l'ancienne garde des Sceaux Reckya Madougou, ont été condamnés à de lourdes peines et sont toujours détenus.
Le parti des Démocrates avait annoncé qu'il proposerait au parlement une loi d'amnistie pour permettre la libération des opposants politiques et le retour au pays des exilés.
M. Aïvo et Mme Madougou ont été condamnés après avoir été jugés par une cour spéciale dédiée au terrorisme et aux crimes économiques, le CRIET, que les adversaires de Patrice Talon accusent d'être instrumentalisée pour briser toute opposition.
Le pouvoir souligne de son côté la nécessité de réprimer les violences djihadistes en hausse aux abords de sa frontière nord avec le Burkina Faso et le Niger, comme dans d'autres pays du Golfe de Guinée (Ghana, Togo, Côte d'Ivoire).
Cette année, sept partis politiques, dont trois se réclamant de l'opposition, ont été autorisés à participer aux législatives, où quelque 6,6 millions d'électeurs étaient appelés à désigner les 109 députés, dont au moins 24 femmes - au moins une par circonscription - selon le nouveau Code électoral.
L'élection se fait à la proportionnelle: seuls les partis ayant recueilli plus de 10% des suffrages - l'UP-R, le BR et Les Démocrates selon les résultats provisoires - se partagent les sièges du parlement.
Le retour au parlement est important pour l'opposition dans la perspective de la présidentielle de 2026, où les candidats devront être soutenus par des parlementaires pour être enregistrés. Le scrutin intervient par ailleurs alors que le mandat des juges de la Cour constitutionnelle, qui joue un rôle crucial dans la supervision des élections, doit s'achever cette année, et que la prochaine présidentielle aura lieu dans trois ans. Selon l'article 115 de la Constitution béninoise, quatre de ces juges sont nommés par les parlementaires, et trois par le président.