Fil d'Ariane
"Patrice Talon n'a pas changé et ne changera jamais". L'intervention du président n'a pas convaincu Léonce Houngbadji. "Il est totalement déconnecté des souffrances du peuple", considère l'opposant, président du parti pour la libération du peuple (PLP), qui a trouvé refuge en France en octobre 2018.
C'est à l'issue d'un processus électoral houleux que le président béninois a pris la parole ce lundi soir.
Le 28 avril, les Béninois sont appelés aux urnes pour élire leurs députés. Un scrutin sans l'opposition, exclue par la Commission électorale, en vertu d'une nouvelle loi, "une réforme risquée", a reconnu Patrice Talon lundi soir. "Elle était redoutée, a-t-il dit, parce que, inévitablement, elle remettrait en cause les acquis des acteurs d’un multipartisme débridé que nous avons cultivé depuis bientôt 30 ans, et qui est la cause principale d’une mauvaise gouvernance, source de notre sous-développement". Le président invite toutefois le Parlement à "rassurer l'opposition politique en procédant à la relecture responsable de la Charte des partis et du Code électoral".
La veille du vote, deux anciens présidents, Thomas Boni Yayi et Nicéphore Soglo, avaient appelé à la suspension du processus électoral. Le scrutin se tiendra néanmoins, marqué par une faible participation et, surtout, par des violences dans les jours qui suivent.
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Une situation "regrettable", selon les mots du chef de l'Etat qui, ce lundi soir, a présenté "sa profonde compassion aux familles éplorées", tout en saluant le travail des forces de sécurité et "leur sens du devoir et du sacrifice au service de la République".
Dans un communiqué publié le 14 mai et intitulé "Une répression post-électorale inquiétante", l'ONG Amnesty International évoque quatre morts au cours de ces violences, "une dizaine au moins", estime Léonce Houngbadji qui demande une commission d'enquête internationale.
S'il ne remet pas en cause la légitimité du parlement fraîchement élu, et qui ne compte que deux partis, tous deux proches du pouvoir, Patrice Talon invite néanmoins l'opposition au dialogue : "Conscient que nul ne devra manquer au chantier de construction de notre pays, j’inviterai très prochainement toute la classe politique pour des échanges directs, francs et constructifs au profit de notre bien commun, le Bénin".
"A quoi servira cet appel ?", s'insurge Léonce Hougbadji réclamant plutôt une annulation pure et simple de la "parodie" d'élections législatives et demandant qu'elles soient réorganisées "dans des conditions apaisées". En attendant, nous confie l'opposant, "nous ne reconnaissons pas l'Assemblée nationale. C'est un Parlement personnel privé. Mais l'opposition va continuer le combat".
Dans son allocution, Patrice Talon est revenu sur l'enlèvement de deux touristes français le 1er mai dans le nord du Bénin. "Je veux ici, au nom de tous, rendre un vibrant hommage à notre compatriote assassiné, aux soldats français tués, et saluer la libération des deux touristes. Je veux surtout vous rassurer qu’en attendant les résultats des enquêtes, mon Gouvernement a promptement pris la mesure de la situation. C’est pourquoi, bien que le parc soit déjà aux normes internationales grâce au savoir-faire de notre partenaire African Parks, nous avons décidé de renforcer davantage le dispositif de sécurité aussi bien en effectif qu’en moyens logistiques ultra modernes".