Fil d'Ariane
Jusque-là, les militaires français privilégiaient la discrétion sur les opérations au Sahel. L'armée française communique désormais davantage. Elle n'hésite pas à rendre public le nombre de djihadistes "neutralisés". Une communication destinée aux opinions publiques. Analyse.
[#Barkhane] Poursuite des efforts dans la zone des trois frontières.
— État-Major Armées (@EtatMajorFR) February 7, 2020
Dans le Liptako-Gourma, une trentaine de terroristes a été mise hors de combat, et plusieurs véhicules détruits au cours d’opérations https://t.co/OKHTSzAIa6 pic.twitter.com/thlVMg1ywI
[#Barkhane] Dans la nuit du 20 au 21 décembre, l’opération Barkhane a mené une action d’opportunité contre un important groupe armé terroriste. Le bilan provisoire de cette opération est de 33 terroristes mis hors de combat. https://t.co/nDg2fZZy8t pic.twitter.com/RdepMRKtJD
— État-Major Armées (@EtatMajorFR) December 21, 2019
Une communication du "body count"
Cette communication centrée sur le nombre de tués est née lors du conflit du Vietnam. «Les Américains, lors de la guerre du Vietnam (1965-1973), ont mis en place ce qu’ils appellent le « body count ». Dans un premier temps, face à un ennemi insaisissable, dans un conflit asymétrique là aussi, les Américains ont voulu mesurer l’efficacité de leurs opérations en dénombrant de la manière la plus précise le nombre d'adversaires tués. Cette mesure devait permette de connaitre le chemin qu’il restait à parcourir jusqu’à la victoire", explique le géopolitologue. L'armée américaine fait alors des projections. Combien d'ennemis faut-il encore tuer pour l'emporter ? "L’état-major des forces américaines a commencé ensuite à communiquer, à partir de ces projections, sur les pertes ennemies pour tenter de convaincre l’opinion publique américaine de l’issue victorieuse prochaine », explique Gérard Chaliand. « Les Américains ont tué 700 à 800 000 Vietnamiens. Et ils ne l’ont pas emporté Cette mesure « du body count » ne signifie rien sur l’issu d’un conflit asymétrique », ajoute Gérard Chaliand.
Du côté de l’armée française on récuse toute analogie au « body count » américain (voir encadré). «Nous ne sommes pas dans une chasse au scalp, cela n’a pas de sens », rappelait dans un point presse, le porte-parole de l’état-major, le colonel Fréderic Barbry. "Nous ne communiquons pas de bilan annuel des ennemies tués en opération", ajoute un gradé de l'état-major, joint par téléphone. L’armée récuse ainsi tout changement de communication ces dernières semaines. « Nous avons toujours cherché à donner un bilan de nos opérations ». Les combats ces dernières semaines ont sans doute pris « une autre envergure », concède le gradé. L’officier reconnait cependant qu’il existe bien, derrière le fait de donner des chiffres, un enjeu de communication «important ». « Il faut, auprès de l’opinion publique française, démontrer que l’opération Barkhane agit et que les opérations de nos militaires sur place sont efficaces », ajoute l’officier.