Pompier pyromane ?
Médiateur ou pyromane ? Pour certains observateurs, l’ancien chef de l’Etat burkinabé a joué sur les deux tableaux. En effet, si sa participation en tant qu’intermédiaire dans plusieurs crises africaines s’est avérée effective, certains spécialistes des conflits en Afrique assurent que Blaise Compaoré aurait contribué à provoquer ces mêmes crises.
Sur FRI, Francis Kpatindé, journaliste spécialiste de l’Afrique, évoque un exemple probant : "Charles Taylor, qui a été chef de guerre puis président du Liberia, avait sa maison à Ouagadougou. (…) Or, Blaise Compaoré s’est servi des hommes de Taylor pour mater la rébellion dans son propre pays et il a entraîné les troupes de Taylor pour aller à la conquête du pouvoir au Libéria".
Pour appuyer son analyse, le journaliste insiste sur le rôle ambigu tenu par Blaise Compaoré dans la crise ivoirienne de 2002. Au début des années 2000, "les combattants du MPCI (Mouvement patriotique de Côte d’Ivoire, ndlr), principal mouvement rebelle ivoirien rebaptisé par la suite Forces nouvelles, ont été entraînés et équipés par le Burkina Faso". Ayant compris cela, le président ivoirien Laurent Gbagbo "s’est dit qu’il fallait que le pyromane l’aide à éteindre le feu". Il a donc sollicité Blaise Compaoré pour qu’il négocie avec les rebelles ivoiriens, menés par Guillaume Soro. "Il a peut-être contribué à résoudre des problèmes internes à la Côte d’Ivoire, mais après avoir déstabilisé ce pays", assure Francis Kpatindé. Un constat que partage Bruno Jaffre, historien du Burkina Faso. Selon lui, Blaise Compaoré est à l’origine de "très nombreuses guerres qu’il y a eu dans la région : Sierra Léone, Liberia, Côte d’Ivoire. Il doit être jugé dans son pays".
En 2001, plusieurs rapports de l’ONU mettent en cause l’ancien chef de l’Etat burkinabé dans des affaires de trafic d’armes et de diamants. Le rapport de l’Instance de surveillance des sanctions contre l’Angola désigne le Burkina comme un "pays d’opération essentiel" pour l’Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola (Unita), qui a combattu contre le régime politique en place, de 1975 à 1991.
Cette facette d’un Blaise Compaoré, "homme de guerre", tranche avec l’image du "sage" perçue par ses homologues occidentaux. Mais à l’intérieur de son propre pays, l’ex-président burkinabé est connu pour ses nombreux faux pas.