Burkina Faso : des cas d'"enrôlement forcé" au sein des VDP pointés par la société civile

Selon des organisations de la société civile, Boukaré Ouédraogo, président du mouvement de 'l'Appel de Kaya', aurait été enrôlé de force comme Volontaire pour la défense de la patrie (VDP). Ces supplétifs civils de l'armée sont censés venir en soutien dans la lutte contre le djihadisme qui sévit dans le pays. 
Image
Kaya, au Burkina Faso, le 25 octobre 2021.
Kaya, au Burkina Faso, le 25 octobre 2021.
AP Photo/Sophie Garcia
Partager3 minutes de lecture

Des organisations de la société civile du Burkina Faso ont exprimé leur inquiétude après des cas d'"enlèvement" et d'"enrôlement forcé" de citoyens comme supplétifs de l'armée dans la lutte contre le jihadisme. Elles ont aussi dénoncé la "négation récurrente et systématique des libertés d’opinion". 

Le Mouvement burkinabè des droits de l'homme et des peuples (MBDHP) "a appris avec consternation l’enlèvement et l’enrôlement forcé de Boukaré Ouédraogo, président du mouvement de 'l'Appel de Kaya', comme VDP. (Volontaire pour la défense de la patrie, supplétifs civils de l'armée)", survenu le 22 mars, écrit l'organisation dans un communiqué.

Une autre organisation, le Collectif contre l’impunité et la stigmatisation des communautés (CISC), a confirmé l'enlèvement et l'enrôlement, dans un communiqué séparé. 

TV5 JWPlayer Field
Chargement du lecteur...

Selon le MBDHP, Boukaré Ouedraogo se serait rendu mercredi dernier "à la résidence du gouverneur du Centre-nord pour rencontrer le président de transition Ibrahim Traoré", en visite à Kaya, le chef-lieu de la région, explique le MBDHP, citant des témoins.  

Pour le CISC, l'arrestation de Boukaré Ouédraogo est liée à une conférence de presse quelques jours plus tôt où il avait interpellé le président Traoré, arrivé au pouvoir par un putsch fin septembre, sur la situation sécuritaire dans la région.

Les deux organisations ont dénoncé une "arrestation arbitraire" et appelé à la libération immédiate de Boukaré Ouedraogo tout en déplorant la "tendance actuelle à la négation récurrente et systématique des libertés d’opinion et d’expression de citoyens".

Par leur (sa) faute, des hommes sont tombés. Nous lui avons fait comprendre et nous l'avons engagé immédiatement pour être VDP. Et il en sera ainsi de tous ceux qui ne sont pas capables de défendre la patrie Capitaine Ibrahim Traoré

Lors d'une rencontre avec des ressortissants de Kaya, le capitaine Ibrahim Traoré a reconnu avoir ordonné l'enrôlement d'un citoyen - sans le nommer -, l'accusant d'avoir divulgué des informations qui ont engendré l'attaque d'un "point névralgique" près de la ville qui avait fait au moins quatorze morts dont quatre soldats. 

"Par leur (sa) faute, des hommes sont tombés. Nous lui avons fait comprendre et nous l'avons engagé immédiatement pour être VDP. Et il en sera ainsi de tous ceux qui ne sont pas capables de défendre la patrie", avait-il lancé sous les acclamations de l'auditoire. 

Selon d'autres organisations de la société civile, deux de leurs représentants ont également été interpellés et enrôlés comme VDP, après avoir critiqué la gestion de la transition lors d'une conférence de presse.

Depuis 2015, le Burkina est pris dans une spirale de violences perpétrées par des groupes jihadistes liés à l'État islamique et à Al-Qaïda, qui ont fait au total 10 000 morts - civils et militaires - selon des ONG, et quelque deux millions de déplacés.