Vingt-sept ans après l'assassinat de l'ancien président burkinabè, l'affaire Thomas Sankara est relancée. Ce lundi 7 décembre, le général putschiste Diendéré, ex-chef d’état-major particulier de la présidence et homme de confiance de l'ancien président Blaise Compaoré, a été inculpé "d'assassinat", selon le Parquet.
Le général Gilbert Diendéré devra donc s’expliquer sur le rôle qu’il aurait joué dans la préparation et l’exécution du coup d’Etat du 15 octobre 1987 qui a coûté la vie au capitaine Sankara et à douze autres personnes présentes à ses côtés.
Au cours d’une conférence de presse en octobre dernier, le directeur de la justice militaire avait déclaré qu’il n’était pas exclu que l’ancien président Blaise Compaoré et son bras droit, le général
Gilbert Diendéré, soient poursuivis dans l’affaire du capitaine Sankara.
Durant trois décennies, c’est bien cet officier discret qui a dirigé le Régiment de la sécurité présidentielle (RSP), dont des éléments sont suspectés d’avoir participé au meurtre de Sankara. Chef des commandos de Pô chargés de la sécurité du chef de l’État, il aurait supervisé,
le 15 octobre 1987, l’arrestation du président révolutionnaire.
15 octobre 1987. Thomas Sankara et ses compagnons sont assassinés lors du putsch qui porte Blaise Compaoré au pouvoir. Le soir même, ils sont enterrés à la sauvette dans des circonstances qui restent floues. Un peu plus de 27 années, et la chute du régime de Blaise Compaoré en octobre 2014, auront été nécessaires pour obtenir la vérification des dépouilles inhumées à Dagnoën et ainsi éclairer les causes de leur mort.
Les avocats et la famille de Thomas Sankara attendent toujours les résultats du test ADN effectué dans la supposée tombe du père de la révolution burkinabè.
Si les analyses ADN confirment qu'il s'agit bien des corps de Thomas Sankara et de ses douze compagnons, les familles pourront enfin faire leur deuil. Au-delà des proches des victimes, c'est tout un peuple, plein d'espoir pour le futur du Burkina Faso, qui attend que la vérité soit faite.
Mais
L’Observateur Paalga, quotidien au Burkina Faso relayé par RFI, met en garde : «
de l’exhumation de la dépouille de Sankara à l’identification formelle des doigts qui ont appuyé sur la détente, il y a loin. Le nouveau pouvoir qui sera issu de la présidentielle d’octobre prochain marchera-t-il dans les sillons qui viennent d’être tracés par les autorités de la Transition ? Maintenant que la parole est aux tombes, chacun retient son souffle. »
L'enquête continue
Dans les deux premières tombes ouvertes en mai dernier, des restes de vêtements, quelques dents et une partie de mâchoire ont été découverts. Celle de Thomas Sankara a, quant à elle, été exhumée mardi 26 mai au matin. Des ossements y ont été retrouvés et sont en chemin pour les analyses génétiques.
Pour faciliter les travaux d’exhumation, la gendarmerie avait sécurisé l’accès au cimetière. Des dizaines de personnes qui scandaient «
on veut la vérité » ou «
la patrie ou la mort, nous vaincrons » avaient tout de même fait le déplacement. La famille Sankara, elle, n’y assistait pas mais était représentée par son avocat.
L’opération a été conduite par un médecin français et deux Burkinabè, en présence d’un juge d’instruction et du commissaire du gouvernement. Les tombes ont été mises sous scellé début avril par la justice militaire du Burkina Faso. Elle enquête, depuis début mars, sur les circonstances de la disparition du père de la révolution burkinabè. Plusieurs auditions ont eu lieu depuis, notamment celle de Mariam Sankara, veuve du défunt président, le 14 mai.