Burkina Faso: qui est le général Gilbert Diendéré ?

Gilbert Diendéré, 53 ans, est à la tête des putschistes. Ce militaire de haut rang, ex chef d'état-major de Blaise Compaoré, a été nommé par la junte comme «chef du conseil de transition».  Qui est-il  ?
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Général Diendéré
Le Général Diendéré déclare aux journalistes de Jeune Afrique être passé à l'acte "pour empêcher la déstabilisation du Burkina"
(DR)
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Gilbert Diendéré est considéré comme "le bras armé des insurgés du 4 août 1983", jour où Thomas Sankara prend le pouvoir avec l'aide de son ami Compaoré. Il est "le  cinquième homme" de la révolution avec Sankara, Lingani, Zongo et Compaoré.
Dès lors, son ascension est rapide.

Gilbert Diendéré se retrouve à la tête du fameux Régiment de Sécurité Présidentielle (RSP) chargé d’assurer la sécurité du chef de l’État,  un régiment créé en novembre 1995 par décret présidentiel.
Le RSP est aujourd’hui composé de 1 300 soldats, soit 10 % des effectifs de l’armée burkinabè. Le régiment ne fait pas dans la dentelle. Au cours d'une mutinerie dans la ville de Bobo Dioulasso, en 2011, des éléments du RSP sont envoyés pour mater la rébellion. Cette intervention coûtera, officiellement,  la vie à 7 mutins. Les médias locaux évoqueront plutôt plusieurs dizaines de personnes tuées.

Un général formé à l'Ecole militaire de Paris

Selon le faso.net, Diendéré sera "le patron du Régiment de sécurité présidentielle (RSP), commandant du CNEC, secrétaire chargé de la sécurité et de la défense au sein du comité exécutif, instance suprême du Front populaire. Il avait le grade de commandant quand il a été nommé chef d’état-major particulier du président du Faso, en… 1993."
Devenu Colonel, en 2001, il est formé pendant 18 mois  à l'Ecole militaire de Paris. Très vite, il comprend l'importance du renseignement dans l'exercice du pouvoir.  Il prend  la haute main sur les Renseignements généraux. Cet homme discret, de réputation efficace, veut tout savoir. Pour cela, il a imaginé et mis en place un réseau de fidèles informateurs. L'hebdomadaire Jeune Afrique précise : "ll sait tout, et c’est bien ce qui le rend « intouchable » – le terme est d’un proche collaborateur de Compaoré – même si (ou peut-être parce que) il n’a aucun poids politique. En 2011, après les violentes mutineries qui ont enflammé la quasi-totalité des casernes du pays, l’ensemble de la chaîne de commandement de l’armée a été renouvelé. À une exception près : le général Diendéré. Le RSP s’était pourtant rebellé lui aussi, à l’intérieur même du palais présidentiel. « N’importe quel autre officier aurait été viré », croit savoir un officier de réserve."

Cette habituelle discrétion dont il s'honore vole en éclat en août 2010.  Il apparait  aux côtés d’otages occidentaux libérés d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). La langue de bois, cependant, n'est jamais loin. Si l'on ose évoquer le paiement éventuel d'une "quelconque rançon" aux ravisseurs, le général se braque : "Non ! Non ! nous n'avons pas payé de rançon. (...) Nous n'avons pas non plus convoyé une quelconque rançon à Aqmi. Ce sont des négociations qui durent depuis plusieurs mois",  déclare-t-il à l'AFP. Impossible d'insister. Il finit par lâcher que les deux humanitaires catalans ont été libérés après "satisfaction" de "conditions" posées par les ravisseurs.

Un général de l'ombre en pleine lumière

Au cours de l'été 2014, au moment du crash du vol AH 5017 Ouaga-Alger, on le retrouve à  la tête d'un "comité de crise" taillé spécialement pour sa personne, il apparaît dans le champ des caméras et répond volontiers à la presse. Cette mise en lumière n'est-elle pas le signe d'un changement  dans ses ambitions personnelles ?

Lettre de limogeage de Diendéré
Le décret mettant fin aux fonctions du Général de Brigade Gilbert Diendéré Chef de l'Etat Major de la Présidence du Faso. La lettre, datée du 27 novembre 2014,  est signée Michel Kafando

Mais tout change le 30 octobre 2014. Après vingt-sept ans de pouvoir, Blaise Campaoré, sous la poussée de la rue,  quitte le pouvoir. Il fuit le pays le 31 octobre. Un décret signé par Michel Kafando, président par intérim, met fin à ses fonctions de Général de Brigade quelques semaines plus tard.
Aujourd'hui, le Général  Gilbert Diendéré pense certainement tenir sa revanche.
Le communiqué du Conseil National pour la Démocratie publié sur le Faso.net précise les motivations des putschistes : "Instauré à la suite de l’insurrection victorieuse du peuple des 30 et 31 Octobre 2014, le régime de transition s’est progressivement écarté des objectifs de refondation d’une démocratie consensuelle.

La loi électorale taillée sur mesure pour des individus et décriée par les instances et les hommes de droit, se dresse alors, comme un outil de négation des valeurs de notre peuple fondée sur l’esprit de justice, d’équité et de tolérance."

Mais les choses ne sont pas si simples.
«Nous sommes mobilisés et nous ne laisserons pas faire. Le peuple tient à sa révolution», déclare Guy-Hervé Kam, porte-parole du Balai citoyen, l'une des principales organisations de la société civile burkinabè.
Le Général Diendéré a procédé à l’instauration d’un couvre-feu de 19h à 6h ainsi que la fermeture des frontières.