Fil d'Ariane
Réélu dès le premier tour selon la Commission électorale ce 26 novembre, le président du Burkina Faso, Roch Marc Christian Kaboré, a tendu la main à l’opposition, qui conteste les résultats sans remettre en cause l'État de droit. Le pays est loin d'un scénario de crise politique, qui hante certains de ses voisins et ce, malgré un contexte sécuritaire dégradé et une transition récente.
Le président Roch Marc Christian Kaboré s’est imposé dès le premier tour de la présidentielle, avec 57,87% des voix selon les résultats provisoire et s’engage donc pour un second mandat.
Une victoire qui était attendue, même si, le "coup KO" n’était pas forcément évident pour Gilles Yabi, fondateur de WATHI, le Think Tank citoyen de l'Afrique de l’Ouest : "Cette victoire était attendue dans la mesure où les présidents sortants gagnent quasiment systématiquement les élections présidentielles". Rien à voir pour autant avec les cas voisins récents ivoirien et guinéen.
Une victoire, qui s’explique donc d’un point de vue systémique, mais qui est également liée à la crise sécuritaire au Burkina Faso : "Les électeurs ont sûrement préféré opter pour la stabilité dans un tel contexte et face à une alternative politique qui pouvait difficilement produire de meilleurs résultats tout de suite", ajoute Gilles Yabi.
Pourtant, le bilan de Roch Marc Christian Kaboré, en terme de sécurité, faisait partie des points très largement décriés durant son premier mandat : "Il ne peut clairement pas se glorifier d’avoir réussi en matière de sécurité au Burkina Faso", confirme Gilles Yabi.
Mais il est difficile d’imputer cette situation au seul président sortant burkinabé : "Cette dégradation sécuritaire a commencé immédiatement, lors de sa prise de pouvoir, qui suivait une insurrection et une transition qui ont déstabilisé le pays et son appareil sécuritaire. C’était aussi le résultat de la gestion sous Blaise Compaoré et la population a dû en tenir compte", précise Gilles Yabi.
J'ai reçu ce vendredi dans la soirée, les félicitations du candidat de l’UPC à la présidentielle Zéphirin Diabré.
— Roch KABORE (@rochkaborepf) November 27, 2020
Je salue sa démarche qui s'inscrit en droite ligne de l'esprit républicain de notre classe politique, et témoigne de la maturité de notre démocratie.#BurkinaFaso pic.twitter.com/GrkA3NUydm
Pour Gilles Yabi, cette réaction de l’opposition est "très positive, surtout au vu du contexte dans la région d’Afrique de l’Ouest cette année. C’est un symbole fort de voir que l’opposition a globalement félicité le président".
Certes, les membres de l’opposition n’ont pas manqué de dénoncer de graves insuffisances dans l’organisation de l’élection. Mais selon Gilles Yabi, ces derniers "estiment tout de même que la victoire de Roch Marc Christian Kaboré est contestable, même s’ils l’ont félicité. Cela témoigne de l’importance, en démocratie, du comportement individuel et d’une forme d’éthique, indispensables pour donner des signaux à l’ensemble de la société, que la bataille politique n’empêche pas d’avoir de l’élégance", ajoute-t-il.
Dans la foulée de la proclamation de sa victoire par la Ceni, le chef d’État a affirmé qu’il sera "le président de tous les Burkinabé", avant d’appeler à une "concertation permanente" et au dialogue. Une main clairement tendue à l’opposition. S’il y a des recours de cette dernière, Gilles Yabi pense d’ailleurs qu’ils "viseront davantage la Commission électorale que le camp présidentiel". Cela pourrait aboutir à une réévaluation du processus électoral, sur le plan technique, organisationnel et logistique, qui pourrait être "souhaitable au vu des défaillances qu’il reste à corriger", selon le fondateur de WATHI.