Est-ce réellement le corps du célèbre révolutionnaire africain assassiné lors du coup d’État du 15 octobre 1987 qui repose dans une des tombes du quartier Dagnoën, à Ouagadougou ? La réponse qu'attendent la famille et les défenseurs de Thomas Sankara depuis vingt-sept ans n'est peut-être plus si loin. "Ce n’est pas facile, parce que depuis qu'il a été assassiné, je n'ai jamais eu d'explications. J'ai fait toutes les démarches en justice, mais j'attends toujours que la vérité soit faite sur cette histoire. Je vis avec cet espoir qu'un jour, je saurai," confiait Mariam Sankara, la veuve du défunt président, en avril dernier.
Le gouvernement burkinabé vient d'annoncer que le corps de l'ancien président burkinabé allait être exhumé dans le but de l'identifier formellement. La décision, prise par décret en Conseil des ministres, "permet aux ayants-droit de feu Thomas Isidore Noël Sankara, président du Faso du 4 août 1983 au 15 octobre 1987, d'ouvrir la tombe supposée contenir le corps et de faire procéder à toute expertise nécessaire à l'identification".
Cette exhumation permettra aux proches de l’ancien président de pouvoir faire le deuil de cet homme qui a marqué l’histoire de la Haute-Volta (ancien nom du Burkina Faso, NDLR). "En Afrique, lorsque vous perdez quelqu'un, il y a des rituels à observer, quelle que soit votre religion. Dans le cas de Sankara, rien a été fait dans ce sens. En exhumant sa dépouille, si l'on découvre que c'est bien la sienne, la famille pourra enfin prendre ses dispositions et organiser des funérailles traditionnelles et officielles. C'est très important pour nous, ici," explique Hien Jonas, président de la Fondation Thomas Sankara pour l’humanité. Et puis, d’un point de vue juridique, cette exhumation relève d’un "droit inhérent à la dignité humaine," selon l’avocat de la famille, Maître Sankara.
Mais pour Mariam Sankara, savoir si cette tombe est belle et bien celle de son mari, "n’est qu’un élément. Après, il y a la suite : comment justice peut-elle être rendue ?" Car elle ne compte pas s’arrêter là. Et si le corps qui repose dans la tombe n’est pas celui de son mari ? "Ils nous diront où se trouve le corps, ou s’il n’est pas mort et qu’il se trouve quelque part".
Cette histoire concerne aussi le peuple burkinabé, pour qui Thomas Sankara représente un véritable symbole de changement et de modernité. Chaque année, la commémoration de la mort du révolutionnaire est l’occasion pour les "sankaristes" de rappeler qu’ils se battent pour que justice soit faite. L’exhumation est donc très attendue, mais s’il s’avère que la dépouille n’est pas celle de Sankara, "il y aura un tsunami, un soulèvement," prévient l’avocat de la famille. Pour Hien Jonas, cette situation mettrait en "colère les Africains. Nous avoir caché la vérité depuis tout ce temps, cela n'est pas admissible ici."
Le gouvernement burkinabé vient d'annoncer que le corps de l'ancien président burkinabé allait être exhumé dans le but de l'identifier formellement. La décision, prise par décret en Conseil des ministres, "permet aux ayants-droit de feu Thomas Isidore Noël Sankara, président du Faso du 4 août 1983 au 15 octobre 1987, d'ouvrir la tombe supposée contenir le corps et de faire procéder à toute expertise nécessaire à l'identification".
Réaction de Mariam Sankara, veuve de l'ancien chef d'Etat burkinabé
Cette exhumation permettra aux proches de l’ancien président de pouvoir faire le deuil de cet homme qui a marqué l’histoire de la Haute-Volta (ancien nom du Burkina Faso, NDLR). "En Afrique, lorsque vous perdez quelqu'un, il y a des rituels à observer, quelle que soit votre religion. Dans le cas de Sankara, rien a été fait dans ce sens. En exhumant sa dépouille, si l'on découvre que c'est bien la sienne, la famille pourra enfin prendre ses dispositions et organiser des funérailles traditionnelles et officielles. C'est très important pour nous, ici," explique Hien Jonas, président de la Fondation Thomas Sankara pour l’humanité. Et puis, d’un point de vue juridique, cette exhumation relève d’un "droit inhérent à la dignité humaine," selon l’avocat de la famille, Maître Sankara.
Mais pour Mariam Sankara, savoir si cette tombe est belle et bien celle de son mari, "n’est qu’un élément. Après, il y a la suite : comment justice peut-elle être rendue ?" Car elle ne compte pas s’arrêter là. Et si le corps qui repose dans la tombe n’est pas celui de son mari ? "Ils nous diront où se trouve le corps, ou s’il n’est pas mort et qu’il se trouve quelque part".
Cette histoire concerne aussi le peuple burkinabé, pour qui Thomas Sankara représente un véritable symbole de changement et de modernité. Chaque année, la commémoration de la mort du révolutionnaire est l’occasion pour les "sankaristes" de rappeler qu’ils se battent pour que justice soit faite. L’exhumation est donc très attendue, mais s’il s’avère que la dépouille n’est pas celle de Sankara, "il y aura un tsunami, un soulèvement," prévient l’avocat de la famille. Pour Hien Jonas, cette situation mettrait en "colère les Africains. Nous avoir caché la vérité depuis tout ce temps, cela n'est pas admissible ici."

Blaise Compaoré dans l’embarras ?
Durant ses nombreux mandats, de 1987 à 2014, Blaise Compaoré n’a jamais encouragé la justice à faire la lumière sur l’assassinat de son prédécesseur. Et pour une grande majorité des Burkinabés, ainsi que pour les proches du révolutionnaire, il serait même à l’origine de l’assassinat. "Qui l’a tué ? Ici au Burkina, on ne se pose plus la question, on le sait. Ce sont ceux qui ont pris le pouvoir après son assassinat qui l'ont tué. Maintenant pourquoi ont-ils fait ça ? C'est une réponse que l'on a pas encore," affirme Hien Jonas.
Malgré les procédures administratives et judiciaires engagées par Mariam Sankara (en 2008, la Cour africaine des droits de l'Homme avait ordonné l'autorisation des expertises nécessaires mais le gouvernement Compaoré ne s'est jamais résigné à le faire) l'affaire a stagné durant près de trois décennies.
Interrogé en avril 2014, un membre du gouvernement de Blaise Compaoré répondait : « On ne sait pas pourquoi c’est si long ». Une déclaration qui n'étonnait pas le président de la Fondation Thomas Sankara au Burkina Faso : « Vous savez ce que valent les démocraties chez nous en Afrique. Celui qui est aujourd'hui au pouvoir est à l'origine de la mort de Sankara. Tant qu'il sera au pouvoir et que les justices africaines ne seront pas totalement indépendantes, c'est tout à fait normal que cela traîne ».
Avant la chute du président Compaoré, la Présidence ne s’exprimait pas sur cette affaire. Victorien Sabadogo, le coordinateur du système d’information du gouvernement de l'époque, se voulait très clair: « au nom de la séparation des pouvoirs, le gouvernement ne peut pas commenter cette affaire. Il serait accusé de vouloir donner des orientations et de s’immiscer dans les affaires de la justice. Le gouvernement a une position mais il attend que la justice donne son verdict, car elle est indépendante ».
Difficile à croire pour Mariam Sankara interrogée en avril dernier. La veuve a déposé une plainte contre X et entamé de nombreuses procédures, restées sans suite. « Les procédures que Mariam Sankara a entamées sont périmées, selon Antoinette Ouedraogo, avocate de l'Etat burkinabé. En droit interne, aucune instance ne peut obliger le Burkina Faso à faire une enquête sur la mort de Thomas Sankara. »
L’exhumation du corps de l’ancien président, si tant est que ce soit bien lui, permettra peut-être de faire la lumière sur les circonstances de sa mort. Car officiellement, le certificat de décès indique toujours une "mort naturelle".
Au Burkina Faso, comme dans de nombreux pays d’Afrique, Thomas Sankara reste un modèle pour ceux qui ont vécu sous son régime, mais également pour la nouvelle génération. Avant-gardiste sur de nombreux sujets, comme le droit des femmes, le développement durable ou encore la diminution du train de vie de l’État, il a également ouvert son pays à l’international. Sa veuve le qualifie de "visionnaire". Il est d’ailleurs, souvent repris et cité par une panoplie d’artistes africains comme Awadi ou Tiken Jah Fakoly, qui accusent les gouvernements de tirer leur pays vers le bas.
Malgré les procédures administratives et judiciaires engagées par Mariam Sankara (en 2008, la Cour africaine des droits de l'Homme avait ordonné l'autorisation des expertises nécessaires mais le gouvernement Compaoré ne s'est jamais résigné à le faire) l'affaire a stagné durant près de trois décennies.
Interrogé en avril 2014, un membre du gouvernement de Blaise Compaoré répondait : « On ne sait pas pourquoi c’est si long ». Une déclaration qui n'étonnait pas le président de la Fondation Thomas Sankara au Burkina Faso : « Vous savez ce que valent les démocraties chez nous en Afrique. Celui qui est aujourd'hui au pouvoir est à l'origine de la mort de Sankara. Tant qu'il sera au pouvoir et que les justices africaines ne seront pas totalement indépendantes, c'est tout à fait normal que cela traîne ».
Avant la chute du président Compaoré, la Présidence ne s’exprimait pas sur cette affaire. Victorien Sabadogo, le coordinateur du système d’information du gouvernement de l'époque, se voulait très clair: « au nom de la séparation des pouvoirs, le gouvernement ne peut pas commenter cette affaire. Il serait accusé de vouloir donner des orientations et de s’immiscer dans les affaires de la justice. Le gouvernement a une position mais il attend que la justice donne son verdict, car elle est indépendante ».
Difficile à croire pour Mariam Sankara interrogée en avril dernier. La veuve a déposé une plainte contre X et entamé de nombreuses procédures, restées sans suite. « Les procédures que Mariam Sankara a entamées sont périmées, selon Antoinette Ouedraogo, avocate de l'Etat burkinabé. En droit interne, aucune instance ne peut obliger le Burkina Faso à faire une enquête sur la mort de Thomas Sankara. »
L’exhumation du corps de l’ancien président, si tant est que ce soit bien lui, permettra peut-être de faire la lumière sur les circonstances de sa mort. Car officiellement, le certificat de décès indique toujours une "mort naturelle".
Au Burkina Faso, comme dans de nombreux pays d’Afrique, Thomas Sankara reste un modèle pour ceux qui ont vécu sous son régime, mais également pour la nouvelle génération. Avant-gardiste sur de nombreux sujets, comme le droit des femmes, le développement durable ou encore la diminution du train de vie de l’État, il a également ouvert son pays à l’international. Sa veuve le qualifie de "visionnaire". Il est d’ailleurs, souvent repris et cité par une panoplie d’artistes africains comme Awadi ou Tiken Jah Fakoly, qui accusent les gouvernements de tirer leur pays vers le bas.