Burundi : après la mort de Nshimirimana, les craintes

Image
burundi police
Patrouille de police dans les rues de Bujumbura, capitale du Burundi, le 20 juillet 2015.
©AP Photo/Jerome Delay
Partager3 minutes de lecture
Lundi 3 août 2015, un militant des droits de l'homme burundais a réchappé à une attentive d'assassinat. La veille, le général Adolphe  Nshimirimana, l'un des hommes fort du régime de Pierre Nkurunziza, a été tué à Bujumbura dans une attaque à la roquette. Des attentats qui font craindre un embrasement du pays.

L'assassinat du général Nshimirimana, ce dimanche 2 août, relance les craintes d'une escalade des violences qui frappent déjà le pays depuis trois mois. Ancien chef des services de renseignements et ancien chef d'Etat major jusqu'il y a peu, le général Nshimirimana est souvent présenté comme l'un des piliers du régime.

Pour certains, il serait même en grande partie à l'origine de la réélection de l'actuel président et de la répression envers les manifestants qui protestaient contre un troisième mandat du chef de l'Etat. Qui était Adolphe Nshimirimana ? Son portrait par Guillaume Villadier.

Cette attaque intervient une semaine après la proclamation de la victoire à la présidentielle du sortant Pierre Nkurunziza, et trois mois après de violents remous politiques. Malgré des heurts qui ont fait des centaines de morts, des centaines de milliers de déplacés et un coup d'Etat avorté mi-mai, Nkurunziza a été réélu fin juillet, lors d'un scrutin contesté par l'opposition la société civile et plusieurs pays occidentaux.

Craintes de représailles

Dans ce contexte, la disparition de ce personnage incontournable inquiète. Pour l'heure, les meurtriers n'ont pas été identifiés mais l'opposition craint une avalanche de représailles. Lundi 3 août dans la soirée, le militant des droits de l'homme Pierre-Claver Mbonimpa, a réchappé à une tentative d'assassinat à Bujumbura. D'après un membre sa famille interviewé par l'AFP "son état serait stable".

Pour le camp présidentiel, la mort du général constitue un choc. "La situation est très grave. Le général Adolphe était quelqu'un d'indispensable dans le système. On est en train de tout mettre en oeuvre pour gérer la situation, mais ce n'est pas facile. Nos garçons ont envie de se venger", a affirmé à l'AFP un haut cadre de la présidence.

Cette situation est d'autant plus préoccupante que le souvenir de la guerre civile hante les esprits. Une guerre civile qui, entre 1993 et 2006 avait fait quelque 300.000 morts, et dont ce petit pays d'Afrique des Grands Lacs se remettait progressivement depuis dix ans.

Des journalistes ciblés

Dimanche, alors qu'il prenait des photos sur les lieux de l'attaque,  le correspondant de l'AFP et de RFI (Radio France Internationale) au Burundi, Esdras Ndikumana, a été arrêté et roué de coups par les forces de sécurité gouvernementales. Un passage à tabac emblématique du climat délétère qui règne sur place.

Retenu deux heures dans les locaux des forces de sécurité, le journaliste a rapporté avoir été violemment frappé au dos et aux jambes, avant d'être relâché et hospitalisé. "Ses jours ne sont pas en danger, mais il est en état de choc et présente de sérieuses contusions", a précisé RFI dans un communiqué. La radio internationale qui a dénoncé cette agression va adresser, conjointement avec l'AFP, une lettre pour demander des explications aux autorités burundaises. Depuis mai, de nombreux médias indépendants ont été contraints de fermer et de nombreux journalistes, cibles de menace ou d'attaques, ont dû fuir le pays ou se cacher.

De son côté l'opposition burundaise a annoncé dimanche s'être dotée pour la première fois d'un organe représentatif et d'un président unique, à l'issue de deux jours de discussions dans la capitale éthiopienne Addis Abeba. Opposition et société civile ont "créé un Conseil national pour le respect de l'accord d'Arusha et pour la restauration de l'état de droit au Burundi, le Cnarec", avec à sa tête Léonard Nyangoma, porte-parole de l'ADC-Ikibiri, une coalition d'une dizaine de partis d'opposition.