Burundi : regain de violence à Bujumbura, des dizaines de cadavres découverts
Au Burundi, au moins 40 cadavres tués par balle ont été découverts ce samedi matin dans les rues de Bujumbura, la capitale. Les habitants accusent les forces de l'ordre. La veille, trois camps militaires avaient été attaqués par des insurgés lourdement armés. 12 assaillants avaient été tués, 21 autres capturés. Il s'agit des affrontements les plus violents depuis la tentative de coup d'Etat en juin dernier.
Un jeune garçon assiste à une scène où cinq cadavres reposent sur le sol. Ils ont été trouvés dans un quartier de la capitale Bujumbura, mercredi 9 décembre. Selon des témoins, c'est la police qui aurait abattu ces personnes.
Les cadavres d'au moins quarante jeunes tués par balles, souvent à bout portant, ont été découverts samedi matin dans les rues de Bujumbura, ont indiqué à l'AFP des témoins interrogés par téléphone.Dans plusieurs quartiers, les habitants ont accusé les forces de l'ordre d'avoir arrêté vendredi tous les jeunes qu'ils rencontraient et de les avoir exécutés délibérement, plusieurs heures après l'attaque à l'aube par des insurgés de trois camps militaires de la capitale burundaise.
A Nyakabiga, un quartier contestataire du centre de Bujumbura, des journalistes burundais et plusieurs témoins ont rapporté avoir vu 20 cadavres de personnes tués par balles, dont certains à bout portant."Certains de ces jeunes ont la tête totalement explosée, pour d'autre la balle est entrée par le haut du crâne, (...), c'est une horreur absolue, ceux qui ont commis ça sont des criminels de guerre", s'est insurgé un journaliste burundais sous couvert d'anonymat.
"La plupart des personnes tuées sont des domestiques ou des jeunes chefs de famille qui étaient chez eux, c'est un carnage, il n'y a pas d'autre mot", s'est indigné un habitant de Nyakabiga sous couvert d'anonymat. Tous assurent que la plupart des personnes ont été tuées vendredi en fin d'après-midi et dans la nuit de vendredi à samedi, bien après l'attaque des camps militaires et loin de ces camps.
Aucun officiel burundais ne pouvait s'exprimer dans la matinée de samedi. Le porte-parole de l'armée, le colonel Gaspard Bratuza, a expliqué dans un tweet qu'un "bilan définitif" des opérations d'hier à Bujumbura serait communiqué "dans le courant de la journée".
Attaques de camps militaires
Vendredi 11 décembre, à l'aube, deux camps militaires de Bujumbura et un en province ont été attaqués par des assaillants, lourdement armés. Les assaillants avaient "l'intention de pénétrer dans les camps pour se procurer des armes et des munitions", a indiqué le porte-parole de l'armée burundaise, le colonel Baratuza. Les assaillants ont été repoussés après plus de deux heures de combats, a expliqué le haut gradé. Vendredi après-midi, de dernier a fait état d'un "bilan provisoire" de "12 tués (et) 21 capturés" chez les assaillants et "cinq blessés" dans les rangs de l'armée. Mais un haut gradé de l'armée a affirmé à l'AFP que les combats avaient occasionné "des pertes des deux côtés". Ces affrontements sont les plus violents depuis la tentative de coup d'Etat militaire déjoué en mai.
Des échanges de tirs sporadiques ont été signalés en milieu d'après-midi dans divers quartiers de Bujumbura, quadrillé par l'armée et où des opérations de "ratissage" ont eu lieu. Les ponts séparant la capitale en trois grandes zones sont "contrôlés par l'armée, qui y a disposé des blindés, et aucun mouvement d'un quartier à un autre n'est autorisé", a expliqué le haut-gradé de l'armée. Selon des témoins, la police a procédé depuis vendredi matin à de nombreuses arrestations dans les quartiers contestataires de Bujumbura.
Témoignage de Claude, habitante de Bujumbura
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Témoignage recueilli par May Vallaud.
Un pays déstabilisé
Le Burundi est secoué par des violences depuis l'annonce fin avril de la candidature du président Nkurunziza à un troisième mandat, que l'opposition, la société civile et une partie de son camp estiment contraire à la Constitution et à l'Accord d'Arusha ayant permis la fin de la guerre civile (1993-2006).
L'échec d'un coup d'Etat militaire à la mi-mai puis la brutale mise au pas des quartiers contestataires à la mi-juin, après six semaines de manifestations quasi-quotidiennes à Bujumbura, et la réélection à la mi-juillet du président Nkurunziza lors d'un scrutin controversé, n'ont pas empêché les violences de s'intensifier.
Des armes ont été massivement introduites dans les quartiers, où les tirs ou jets de grenade contre la police sont désormais quotidien. Les forces de l'ordre sont régulièrement harcelées en province, et des mutins ont assuré avoir mis sur pied une rébellion pour chasser M. Nkurunziza du pouvoir.
La communauté internationale s'inquiète de possibles violences à grande échelle, dans un pays à l'histoire post-coloniale marquée par des massacres entre majorité hutu et minorité tutsi.