Fil d'Ariane
Ils n'étaient qu'une poignée de civils devant la cathédrale Notre-Dame de Bangui. Suffisamment pour pour exprimer leur ras-le-bol des violences interreligieuses entre chrétiens et musulman des derniers mois : "C'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Il y a moment où il faut agir et nous sommes dans cette dynamique-là. Il va falloir que nous agissions," déclare Christian Beninga, porte-parole de la société civile.
Agir en décrétant une journée ville morte : pas un magasin ouvert dans les rues de Bangui ce vendredi, seulement quelques badauds à compter sur les doigts d'une main. Et la Minusca, plus que jamais mobilisée.
Voici quelques jours, l'arrestation d'un chef milicien dans le quartier musulman PK5 par les forces de défense et sécurité centrafricaines a déclenché une série d'attaques. L'Eglise catholique Fatima a été le théâtre d'un massacre contre des fidèles par des tirs automatiques et des grenades. Selon la Minusca, des musulmans en seraient les auteurs. Pour le gouvernement tout était planifié depuis plusieurs jours.
En représailles, une mosquée a été incendiée et deux personnes présumées musulmanes ont été lynchées. Mardi dernier, entre chrétiens et musulmans 24 personnes ont été tuées, 170 ont été blessées. Voilà qui ressemble bel et bien à la résurgence d'un nouveau cycle de violence, que beaucoup de Centrafricains redoutent. Pour les habitants du PK5, ce sont des éléments extérieurs qui sont responsables :"Ils ne sont pas centrafricains. Ce sont des mercenaires, des rebelles," dit l'un d'eux.
Condamnations et appels au calme se succèdent. Le cardinal Nzapalainga a dénoncé la confessionalisation des violences de Bangui. "Aucun imam, aucun prêtre n'était armé pour aller combattre. Il faut arrêter de parler de chretiens-musulmans". Quant au président de la Centrafrique, il appelle au calme, à "ne pas céder à la manipulation", et dénonce une instrumentalisation de la situation à des fins politiques. Mais tous redoutent un nouveau cycle de violence interconfessionnelle qui ferait retomber le pays dans une guerre qui ne dit pas son nom.