Centrafrique : "Il y a une volonté d'infantiliser la République centrafricaine"

La crise diplomatique est officielle entre Paris et Bangui. Mercredi 20 octobre au soir, la ministre des Affaires Etrangères de la république centrafricaine, Sylvie Baïpo-Temon a tenu des propos critiques contre son homologue français, Jean-Yves Le Drian dans une interview sur notre chaîne. Retour sur la polémique. 
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Sylvie Baïpo-Temon
La ministre centrafricaine Sylvie Baïpo-Temon, était l'invitée du Journal Afrique pour une interview, ce mercredi 20 octobre 2021 sur TV5MONDE.
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"Les propos de mon homologue français sont inacceptables car mensongers", a déclaré la cheffe de la diplomatie centrafricaine. Sylvie Baïpo-Temon ne cache pas sa colère contre Jean-Yves Le Drian qui, lors d'une interview à France 5, a dénoncé l'action en Centrafrique du "groupe privé russe Wagner" taxé de "société de mercenaires".

«Lorsqu'ils pénètrent dans un pays, ils multiplient les violations, les exactions, les prédations pour se substituer parfois même à l'autorité du pays. L'exemple le plus spectaculaire c'est la République centrafricaine où finalement, pour pouvoir se payer, ils confisquent la capacité fiscale de l'Etat», a-t-il dit dans l'émission «C dans l'air» sur la chaîne France 5.

Il y a une volonté de la part de mon homologue d'infantiliser la République centrafricaine

Sylvie Baïpo-Temon, ministre centrafricaine des Affaires étrangères

Exigeant des preuves de ce qu'avance Jean-Yves Le Drian, Sylvie Baïpo-Temon a fait référence à la mission économique d'évaluation menée par la Russie en matière douanière à la demande de la Centrafrique. Depuis plusieurs années, Bangui a fait appel à des paramilitaires russes qui se sont engagés aux côtés des forces centrafricaines pour lutter contre les groupes rebelles.

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Le président Macron a comparé le président Touadéra à un "otage"

"Il n'y a aucun accaparement du pouvoir par les instructeurs russes. Mon homologue parle de mercenaires. J'aimerais qu'il nous apporte la preuve de ce qu'il avance", a affirmé la ministre sans jamais prononcer le nom de Jean-Yves Le Drian, se contentant de le nommer comme son "homologue français"

"Il y a une volonté de la part de mon homologue d'infantiliser la République centrafricaine", estime Sylvie Baïpo-Temon. Cette dernière parle même de menaces portées envers son pays, par les propos du ministre français mais aussi du président Emmanuel Macron qui a comparé le président Touadéra à un "otage des soi-disant mercenaires, et de la présence russe".

Je rappelle que les troupes sangaristes ont commis des actes de violations sur des mineurs. Nous attendons toujours des réponses sur cela

Sylvie Baïpo-Temon, ministre centrafricaine des Affaires étrangères

La ministre a tenu a rappeler la souveraineté de la République centrafricaine "qui est en droit de pouvoir faire appel à des partenaires", justifiant cette présence russe car "les autres pays amis n'ont pas répondu à l'appel à l'aide de la République centrafricaine, notamment lors de la prise de pouvoir du président Touadéra en mars 2016".

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La France doit prendre sa responsabililté

Appelant Jean-Yves Le Drian à prendre sa responsabilité dans cette situation, la France ayant demandé le retrait des forces de l'opération Sangaris du pays, une opération militaire française (2013-2016) contre les forces rebelles, la ministre regrette que la République centrafricaine soit la victime d'une "guerre informationnelle entre deux puissances". "Cette guerre de désinformation doit cesser", a-t-elle affirmé.

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Interrogé sur la présence de ces paramilitaires russes du groupe Warner sur le front aux côtés des forces centrafricaines, Sylvie Baïpo-Temon déclare qu'"une guerre et une guerre. Il y a forcément des dégats collatéraux". Et d'ajouter que : "depuis des dizaines d'années, la République centrafricaine fait face à de nombreux conflits, à de nombreuses exactions sur son territoire. Toutes les troupes venues lui apporter de l'aide ont commis des exactions. Je rappelle que les troupes sangaristes ont commis des actes de violations sur des mineurs. Nous attendons toujours des réponses sur cela", a-t-elle tenu à rappeler en fin d'interview.