Fil d'Ariane
Faustin-Archange Touadéra, président de la Centrafrique, délivre un discours de campagne à Bangui, le 12 décembre 2020.
Le 17 décembre, les six groupes armés les plus puissants qui occupaient les deux-tiers de la Centrafrique, en guerre civile depuis huit ans, se sont alliés au sein de la Coalition des patriotes pour le changement (CPC), puis ont annoncé le 19, huit jours avant les élections présidentielle et législatives, une offensive dans le but d'empêcher la réélection du président Touadéra.
Mais ils se sont heurtés à des forces bien supérieures en nombre et lourdement équipées: quelque 12.000 Casques bleus de la force de maintien de la paix de la mission de l'ONU en Centrafrique (Minusca) présents depuis 2014, mais aussi des centaines de militaires rwandais et paramilitaires russes dépêchés fin décembre par leurs pays à la rescousse de M. Touadéra et d'une armée démunie.
"Offensive des Faca (Forces armées de Centrafrique) et forces alliées de Boyali (village situé à 90km de Bangui, NDLR). Bilan: RAS côté amis. Côtés ennemis: 3 prisonniers acheminés à Bangui et 44 morts dont plusieurs mercenaires tchadiens, soudanais et peuls", a affirmé le gouvernement sur Facebook.
Les autorités centrafricaines désignent généralement comme "forces alliées" les militaires rwandais et les paramilitaires russes.
Cette annonce du gouvernement n'a pu être confirmée par des sources indépendantes.
"Les forces gouvernementales sont repassées à l’offensive", a assuré à l'AFP le porte-parole du gouvernement, Ange-Maxime Kazagui.
La ville de Boda, située à 124 km de Bangui, a également été "reprise par les autorités et les forces négatives se sont enfuies dans diverses directions. Au moment où nous parlons, les Faca et la gendarmerie sont dans la ville, et les Russes sont avec nos Faca" a annoncé M. Kazagui.
Depuis le début de leur offensive en décembre, les rebelles de la CPC cherchent selon l'ONU à "asphyxier" la capitale en coupant les trois principales routes qui y mènent. Les Nations Unies ont aussi alerté sur le "drame social et humanitaire que pourrait subir la population".
Les rebelles mènent des attaques sporadiques mais parfois violentes, généralement loin de la capitale, même si deux attaques simultanées d'environ 200 assaillants ont été repoussées le 13 janvier à Bangui.
Le 21 janvier, le gouvernement a décrété l'état d'urgence pour une durée de 15 jours sur l'ensemble du territoire pour permettre "aux autorités de procéder à des interpellations sans forcément passer par le procureur de la République", avait précisé à l'AFP le porte-parole de la présidence.
L'émissaire de l'ONU en Centrafrique, Mankeur Ndiaye, a réclamé au Conseil de sécurité une "augmentation substantielle" du nombre de Casques bleus déployés dans le pays.
La demande d'augmentation du contingent de la Minusca devrait également aider le président Touadéra, récemment réélu avec 53,16% au terme d'un scrutin où deux électeurs sur trois n'ont pas voté, principalement pour des raisons de sécurité, à asseoir son autorité.
La coalition des 15 partis d'opposition de Centrafrique avait toutefois rejeté la réélection du président Faustin Archange Touadéra, dénonçant d'"innombrables fraudes" et une participation extrêmement faible. La Cour constitutionnelle a fini par valider les résultats de la présidentielle après avoir rejeté tous les recours déposés par 13 candidats.
Mankeur Ndiaye n'a pas précisé le nombre de Casques bleus supplémentaires souhaité pour la Minusca qui représente déjà, avec 12.000 hommes, l'une des plus grosses et coûteuses opérations de l'ONU dans le monde.
Selon une source proche du dossier, la Minusca souhaiterait le renfort de 3.000 Casques bleus avec des moyens aériens importants: drones, hélicoptères d'attaque, capacités de franchissement, forces spéciales.
L'émissaire a averti le Conseil de sécurité que "la menace pourrait durer", alors que la Minusca a déjà perdu sept Casques bleus depuis le début de l'offensive rebelle.
Depuis l'offensive rebelle, quelque 60.000 Centrafricains ont de nouveau fui les violences, selon le Haut-Commissariat aux réfugiés (CRH) à Genève.