Ce mardi 25 avril est celui de la journée mondiale de la lutte contre le paludisme. Instituée par les États Membres de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) lors de l’Assemblée mondiale de la Santé de 2007, cette journée est l’occasion de rappeler la nécessité d’un engagement fort contre les ravages de cette maladie. En Afrique elle est loin d’être éradiquée malgré les traitements.
Dans ses dernières
estimations, basée sur les chiffres de 2021, l’OMS évalue les personnes atteintes du paludisme à travers le monde à près de 250 millions. Des chiffres en hausse constante. Selon le dernier
rapport de l'OMS sur le paludisme dans le monde, il y avait 245 millions de cas en 2020.
(Re)voir : La lutte contre le paludisme recule dans le monde
Le nombre estimé de décès imputables au paludisme, lui, baisse, même s’il reste important. Il s’est élevé à 619 000 en 2021 contre 625 000 en 2020.
Des chiffres alarmants, d’autant que les principales victimes sont les nourrissons, les enfants de moins de cinq ans, les femmes enceintes et les personnes vivant avec le VIH.
(Re)lire : Cinq millions d’enfants sont morts en 2021 dans le monde avant l’âge de cinq ansL’Afrique, centre névralgique de l’endémie
L’Afrique concentre l’écrasante majorité des victimes du paludisme, soit 95% des cas et 96% des décès. 80% des victimes africaines sont des enfants de moins de 5 ans. L’OMS déplore que le continent continue de "
supporter une part importante et disproportionnée de la charge mondiale du paludisme".
Ils sont 4 pays africains à cumuler plus de la moitié de tous les décès par malaria dans le monde : le Nigeria (31,3%), la République démocratique du Congo (12,6%), la Tanzanie (4,1%) et le Niger (3,9%).
Pour la docteure Matshidiso Moeti, directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique, il faut "
de toute urgence des financements nécessaires au déploiement des nouveaux outils, pour vaincre le paludisme".
En 2021, le financement total en faveur de la lutte contre le paludisme a atteint 3,5 milliards de dollars. Une augmentation par rapport aux deux années précédentes, mais cela reste largement en deçà des 7,3 milliards de dollars estimés nécessaires à l’échelle mondiale pour vaincre la maladie.
La maladie résiste
Les
moustiquaires imprégnées d’insecticide (MII) constituent le principal outil de lutte dans la plupart des pays concernés. Si une distribution record de ces dispositifs a été effectuée en 2020 et en 2021, la maladie peine à être endiguée.
Et pour cause, huit pays – le Bénin, l’Érythrée, les Îles Salomon, l’Indonésie, le Nigéria, l’Ouganda, la Thaïlande et Vanuatu – ont distribué moins de 60 % de leurs MII, et sept pays, à savoir le Botswana, Haïti, l’Inde, le Pakistan, la République centrafricaine, la Sierra Leone et le Tchad, n’en ont pas distribué du tout.
L’OMS observe également d’autres risques en hausse, notamment "
les mutations des parasites, qui ont une incidence sur l’efficacité des tests de diagnostic rapide, la résistance croissante des parasites aux antipaludéens, et l’invasion, en Afrique, d’un nouveau moustique".
Ce moustique, l'
Anopheles stephensi, arrivé en provenance d'Asie et de Péninsule arabique se reproduit généralement dans des conteneurs ou des citernes avec de l’eau propre, et semble s’adapter rapidement à l’environnement local (y compris les habitats cryptiques comme les puits profonds). Adapté au milieu urbain, il résiste à bon nombre d'insecticides utilisés actuellement et survit également aux très fortes températures, ce qui fait peser une menace supplémentaire sur la lutte contre le paludisme en Afrique.
Il est présent au Soudan, en Ethiopie, en Somalie ou encore au Nigeria, qui concentre l’essentiel des cas de paludisme à travers le monde.
Pour contrer ces nouvelles menaces, l’OMS a lancé deux stratégies pour aider le continent africain, dans sa lutte contre le paludisme : miser sur les traitements, mais aussi sur la prévention.
Parmi les innovations, figurent des moustiquaires "
imprégnées de nouvelles associations d’insecticides à longue durée d’action ainsi que d’autres innovations en matière de lutte antivectorielle (contre les vecteurs de la maladie)
, dont des appâts ciblés qui attirent les moustiques, des répulsifs aériens et des solutions de génie génétique ciblant les moustiques". Par ailleurs, de nouveaux tests de diagnostic sont actuellement mis au point, de même que des médicaments de nouvelle génération visant à contrer la résistance aux antipaludéens.
Le vaccin, la clé ?
Depuis octobre 2021, l’OMS recommande une large utilisation du
vaccin antipaludique RTS,S/AS01 chez l’enfant dans les zones infectées. Il a été démontré que le vaccin réduit considérablement la morbidité et la mortalité palustres (liées au paludisme) chez les enfants et chez les jeunes enfants. S'il a été administré à plus d'un million d'enfants en Afrique, son efficacité diminuerait considérablement avec le temps, même avec une dose de rappel.
(Re)voir : Vaccin contre le paludisme : le Kenya a besoin de plus de doses
C'est pour cela que la recherche en la matière continue. Le
vaccin britannique R21/Matrix-M, développé par l’Université d’Oxford, vient de recevoir le feu vert des autorités ghanéennes pour être utilisé dans le pays. Ce sérum dépasse pour la première fois l'objectif d'efficacité fixé à 75% par l'Organisation mondiale de la santé.
Pour le groupe ayant reçu la plus forte dose, l'efficacité du vaccin a même atteint les 80%, selon les résultats d'un essai publié en septembre.
Il pourrait représenter un tournant dans la lutte contre la maladie, selon une équipe de recherche internationale, dans la revue
Lancet Infectious Diseases.
L'avantage supplémentaire réside dans le prix de ce vaccin. Il coûterait quelques dollars par dose, suscitant l'espoir que ce vaccin bon marché puisse être produit à grande échelle dans quelques années, permettant d’éradiquer la maladie.
L'Organisation mondiale de la santé doit encore approuver le nouveau vaccin R21 à la fin des derniers essais qui sont toujours en cours au Burkina Faso, au Kenya, au Mali et en Tanzanie. Les résultats sont attendus dans le courant de l'année.
D'ici à 2030, l'OMS espère réduire d’au moins 90% la mortalité causée par le paludisme.