Coronavirus et "tests de vaccins en Afrique" : polémique après une séquence à la TV française

Une séquence diffusée à la télévision française sur LCI  ce jeudi 2 avril a suscité la colère de nombreux internautes et de nombreuses organisations. Mercredi 1er avril, deux chercheurs y sont interrogés en direct sur l'opportunité de tester un vaccin en Afrique dans le cadre du coronavirus. Leur réponse crée la polémique, l'un d'eux a présenté ses excuses.
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Capture d'écran de la séquence diffusée sur LCI qui fait polémique. 
© Capture d'écran
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Dans cette séquence diffusée le 1er avril sur la chaîne de télévision LCI, Camille Locht, directeur de recherche à l'Institut national de la Santé et de la Recherche médicale (Inserm) est interrogé sur des recherches menées autour du vaccin anti-tuberculose BCG, pour le Covid-19.
 

Invité en plateau également, Jean-Paul Mira, chef de service de médecine intensive et réanimation à l'hôpital Cochin à Paris, lui demande : "Si je peux être provocateur, est-ce qu'on ne devrait pas faire cette étude en Afrique, où il n'y a pas de masques, pas de traitement, pas de réanimation, un peu comme c'est fait d'ailleurs sur certaines études avec le sida, ou chez les prostituées on essaie des choses parce qu'on sait qu'elles sont hautement exposées ?".

Question à laquelle le chercheur répond : "Vous avez raison, d'ailleurs on est en train de réfléchir en parallèle à une étude en Afrique avec le même type d'approche, ça n'empêche pas qu'on puisse réfléchir en parallèle à une étude en Europe et en Australie".

"Les Africains ne sont pas des cobayes!"

De nombreux internautes ont exprimé leur colère, en France et en Afrique, à l'instar du Club des avocats au Maroc qui a annoncé sur sa page Facebook vouloir "porter plainte pour diffamation raciale".
 
Club des avocats au Maroc
Sur Facebook, le Club des Avocats au Maroc a réagi. Ilentend porter plainte pour "diffamation raciale auprès du procureur de la République. 

"Non, les Africains ne sont pas des cobayes!", s'est indignée l'association française SOS Racisme dans un communiqué, dénonçant "à l'endroit des corps noirs un mépris" et jugeant la comparaison avec le sida et les prostituées "problématique" et "malvenue".

Le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), gendarme des médias audiovisuels en France, a confirmé à l'Agence France-Presse (AFP) avoir été saisi.

De nombreuses personnalités ont également pris la parole sur les réseaux sociaux.

Le footballeur Didier Drogba dénonce des "propos graves racistes et méprisants".

Le chanteur Alpha Blondy aussi dénonce les propos des deux médecins tandis que l'acteur ivoirien Michel Gohou appelle les Africains a rester "unis", "vigilants, main dans la main".

Nathalie Yamb, elle, met en garde. La conseillère exécutive du candidat à la présidentielle ivoirienne, Mamadou Koulibaly, rappelle que l'Afrique a déjà fait les frais de tests médicamenteux au lendemain Seconde Guerre Mondiale. 
 
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Nathalie Yamb
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DIDIER DROGBA
MICHEL GOHOU
ALPHA BLONDY

"Une vidéo tronquée", selon l'Inserm 

Contactée par l'AFP, la chaîne de télévision LCI ne commente pas et renvoie aux réponses de l'Inserm et de Jean-Paul Mira.

L'Inserm a répondu qu'une "vidéo tronquée faisait l'objet d'interprétations erronées sur les réseaux sociaux". L'institut rappelle que les tests seraient lancés dans plusieurs pays européens et en Australie.

Sur Twitter, l'institut indique que "l'Afrique ne doit pas être oubliée ni exclue des recherches car la pandémie est globale".


La Coalition pour la recherche clinique sur le Covid-19, composée de 70 membres, alerte, dans un article publié dans la revue scientifique The Lancet, sur le fait que "très peu d'essais [cliniques] sont prévus en Afrique". Or, "le nombre de cas de Covid-19 pourraient augmenter de manière substantielle dans les semaines qui viennent".
 

Excuses du professeur Jean-Paul Mira

"Je veux présenter toutes mes excuses, demander à celles et à ceux qui ont été heurtés, choqués, qui se sont sentis insultés par des propos que j’ai maladroitement prononcés sur LCI cette semaine, leur présenter mes excuses les plus sincères", a indiqué dans un communiqué des hôpitaux de Paris Jean-Paul Mira.

"Ces propos ne reflètent en rien ce que je suis, ce que je fais au quotidien, depuis maintenant 30 ans", ajoute le médecin, qui a passé son compte Twitter en privé en raison des menaces et insultes qu'il reçoit depuis cette séquence.