L’élection présidentielle ivoirienne a lieu le samedi 31 octobre 2020, dans un paysage politique bouleversé par la mort inattendue début juillet du candidat du parti au pouvoir, le premier ministre Amadou Gon Coulibaly et par la candidature contestée à un troisième mandat du président sortant Alassane Ouattara. Cartographie du scrutin à l'issue duquel le futur président ivoirien sera élu pour cinq ans.
Ils étaient nombreux à s'être présentés mais seuls trois candidats, en plus d'Alassane Ouattara, ont été investis candidats pour, peut-être, remplacer le président sortant : Henri Konan Bédié, Pascal Affi N’Guessan et Kouadio Konan Bertin. Dans un contexte tendu, deux candidats boycottent le processus électoral, Henri Konan Bédié et Pascal Affi N’Guessan, et appellent la population à la "désobéissance civile" face à "un coup d'État électoral".
Voir aussi : Côte d'Ivoire : mobilisation massive de l'opposition
Quatre candidats
Président de la Côte d’Ivoire depuis 2010, Alassane Ouattara est à 78 ans candidat pour le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) à un troisième mandat.
L’opposition estime sa candidature contraire à la Constitution et appelle à la «
désobéissance civile » pour empêcher la tenue du scrutin. Dans un entretien accordé au journal
Le Monde, Alassane Ouattara dit se présenter «
contre » sa «
volonté » et affirme avoir une «
obligation citoyenne et personnelle d’être candidat ».
Henri Konan Bédié a été président ivoirien entre 1993 et 1999. A 86 ans, il n’a pas perdu son appétit politique. Il est investi le lundi 27 juillet 2020 candidat de son parti, le PDCI, le Parti Démocratique de Côte d’Ivoire, principal mouvement d’opposition, à l'élection présidentielle avec 99,7% des voix. Il avait soutenu Alassane Ouattara en 2010 et 2015.
Ancien proche de Laurent Gbagbo, Pascal Affi N’Guessan, 67 ans, est engagé dans le Front Populaire Ivoirien (FPI) depuis 1986. Il a été premier ministre sous Gbagbo de 2000 à 2003.
Affi N'Guessan était arrivé en deuxième position avec 9,29% des suffrages lors de la présidentielle de 2015, largement remportée par Alassane Ouattara.
Il est candidat à l'élection présidentielle contre l'avis de son parti, le Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI), et de son chef Henri Konan Bédié. Ancien député de 51 ans, surnommé KKB, il se veut le candidat des jeunes. Ils s’est opposé à la nomination comme candidat du PDCI de l’ex-chef de l’Etat Henri Konan Bédié.
En 2015, Kouadio Konan Bertin s’était déjà présenté à l’élection présidentielle contre l’avis de son parti qui avait choisi de ne pas présenter de candidat et avait soutenu Alassane Ouattara, réélu.
Il est l’ancien président de la jeunesse du PDCI et actuellement conseiller municipal de Port Bouët, une commune d’Abidjan. Il plaide pour plus de justice sociale et promet aux jeunes d’instaurer une fois au pouvoir un prêt sans intérêt pour le financement des études.
L'écarté du scrutin, Laurent Gbagbo
Laurent Gbagbo, à la tête de la Côte d’Ivoire de 2000 à 2010, a été acquitté en première instance de crimes contre l'humanité par la Cour Pénale Internationale en 2019 après huit ans de détention. À 75 ans, il vit actuellement à Bruxelles dans l'attente d'un éventuel procès en appel. Des proches de l’homme politique avaient déposé sa candidature pour la présidentielle, mais celle-ci a été invalidée par le conseil constitutionnel.
À quelques jours de l'élection présidentielle, et après plus de neuf ans de silence, Laurent Gbagbo a accordé
un entretien à TV5MONDE :
Électorat
Sur les quelque 25 millions d’habitants que compte le pays, 7,5 millions d’Ivoiriens se sont inscrits sur les listes électorales selon la Commission électorale indépendante (CEI). Un chiffre obtenu après une opération de révision des listes et un « traitement des données », mené du 10 juin au 5 juillet 2020.
Avec une population très jeune et plusieurs millions de résidents étrangers, il n’existe pas de statistiques récentes et fiables sur le nombre exact d’Ivoiriens majeurs.
Un contexte tendu
Le président Ouattara, au pouvoir depuis 2010, se présente à un troisième mandat controversé, tandis que les candidatures de plusieurs figures de l'opposition, comme Laurent Gbagbo et Guillaume Soro, ont été invalidées. Le pays a ainsi basculé dans une crise préélectorale avec des explosions de violences dans plusieurs villes de province. Une trentaine de personnes sont mortes depuis le mois d’août. Entre le lundi 19 et mercredi 21 octobre, des affrontements à Dabou, à 50 km à l'ouest d’Abidjan, ont fait 16 morts et 67 blessés.
L'opposition a décidé un "boycott actif" du processus électoral. "La désobéissance civile continue et doit s'intensifier de manière pacifique pour mettre fin au coup d'Etat électoral", a déclaré Affi N'Guessan.
La crainte d'une escalade de violences électorales meurtrières est forte en Côte d'Ivoire, dix ans après la crise post-électorale née de la présidentielle de 2010 qui avait fait 3.000 morts après le refus de Laurent Gbagbo de reconnaître sa défaite électorale face à Ouattara.
Côte d'Ivoire : l'opposition appelle au boycott
Cacao : la situation politique tendue en Côte d'Ivoire impacte les cours de l'or brun ivoirien
Le cacao est stratégique en Côte d'Ivoire : il représente 10% à 15% du PIB, près de 40% des recettes d'exportation et fait vivre cinq à six millions de personnes, soit un cinquième de la population, selon la Banque Mondiale. La Côte d’Ivoire produit plus de 40% du cacao mondial. Avec le Ghana, ils représentent les deux tiers de la prodcution de cacao dans le monde, sans pour autant parvenir à peser sur les cours de "l'or brun".
Les observateurs et acteurs de ce marché sont par ailleurs très attentifs à la situation politique en Côte d'Ivoire, le pays étant le théâtre de vives tensions depuis la décision du président Alassane Ouattara de briguer un troisième mandat lors de l'élection présidentielle du 31 octobre, que l'opposition boycotte.