En Côte d'Ivoire, de nombreux lieux de sépultures ne sont pas entretenus par les autorités. Ils sont même parfois laissés à l'abandon, au grand désarroi des familles endeuillées.
Dans le cimetière de Bingerville, des herbes folles à perte de vue. Sous la broussaille, des pierres tombales qui se sont effondrées, faute d’entretien. Ici, pas l’ombre d’un agent du district d’Abidjan, pourtant censé le garder en bon état. Un cimetière entretenu par la seule bonne volonté des riverains comme Lamissa.
"Ce sont les habitants qui s’occupent du cimetière, explique Lamissa Coulibaly, habitant de Bingerville. C’est pour ça que vous voyez qu’il y a de l’herbe autour et que c’est touffu partout et que les tombes sont cassées. Ce n’est pas bien, les cimetières, on doit les entretenir parce que tout le monde va finir ici."
Quelques kilomètres plus loin, un autre cimetière, celui de Yopougon, la plus grande commune d’Abidjan. Ici, plus d’espace disponible pour enterrer les défunts. Alors, les employés du cimetière sont parfois contraints d’enterrer les corps les uns sur les autres.
Il nous arrive d’enlever les corps qui sont en dessous. Mais des fois nous pouvons en mettre 3 ou 4 au même endroit, on remet de la terre par dessus et on change le nom.
Michel, Fossoyeur cimetière de Yopougon
Ce jeune homme chargé de creuser les tombes ici a accepté de témoigner de manière anonyme sur les enterrements clandestins pratiqués dans ces cimetières. Les familles des défunts n’hésitent pas à corrompre les employés comme lui pour y faire enterrer leurs proches. Un trafic permanent.
Il y a du business partout, même la nuit il y a des enterrements. La journée il y a aussi il y a d’autres qui n’ont pas les moyens pour faire les papiers, ils peuvent faire un arrangement pour venir faire un enterrement.
Témoin anonyme
Des pratiques devenues courantes dans les cimetières d’Abidjan qu’Hamed fréquente plusieurs fois par mois. Voilà bientôt quatre ans qu’avec son ONG, il a décidé de remettre en état ces lieux de sépulture, en organisant bénévolement des opérations de nettoyage. Pour rendre leur dignité aux morts, même s’il ne reçoit aucun soutien financier.
On prend un mois, deux mois ou trois mois avant de lancer une sortie. Pourquoi un mois ou deux mois ? Parce que nous ne sommes pas financés par quelqu’un, l’argent vient de ma poche. Je suis obligé de travailler pour économiser l’argent pendant deux mois avant de faire une sortie.
Hamed Sawadogo, Président ONG Hamed Plus
D’après les services du district d’Abidjan, les cimetières sont gérés par des concierges et une police spéciale censée en assurer la surveillance. Mais d’après les témoignages recueillis, ces lieux sont devenus des repaires pour trafiquants de drogue et agresseurs au milieu des morts qui ne peuvent toujours pas reposer en paix.