Deuxième jour de combat au Soudan, 56 civils tués

Les combats continuent de faire rage pour la deuxième journée consécutive à Khartoum. De violents affrontements opposent les camps de deux généraux, aux commandes du Soudan depuis leur putsch en 2021, faisant selon des médecins 56 morts parmi les civils et 600 blessés. Trois humanitaires ont été tués dans les combats. 
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De la fumée s'élève d'un quartier de Khartoum, au Soudan, le samedi 15 avril, après des affrontements dans la capitale. AP/ Marwan Ali.
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Trois humanitaires du Programme alimentaire mondial (PAM) ont été tués dans les combats au Soudan, annonce dimanche l'émissaire de l'ONU dans ce pays d'Afrique du Nord-Est sous les feux croisés depuis plus de 24 heures de l'armée et de ses rivaux paramilitaires.

Ils ont été tués "samedi en accomplissant leur travail au Darfour-Nord", dans l'ouest près du Tchad, qui a fermé sa frontière samedi à cause des violences, précise dans un communiqué Volker Perthes. Il ajoute que des "bâtiments humanitaires auraient été touchés et d'autres pillés au Darfour", bastion historique des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo, dit "Hemedti", gagné par les combat entre armée et paramilitaires.

Le PAM a annoncé la suspension de ses opérations au Soudan suite à cette attaque. "Nous sommes obligés de suspendre temporairement nos opérations au Soudan le temps d'analyser l'évolution de la situation sécuritaire", indique la directrice du PAM, Cindy McCain, citée dans un communiqué.

La France a exprimé "sa consternation" après le décès de ces travailleurs humanitaires du (PAM) et de l’ONG Relief International.

Paris "réitère son appel à tout mettre en œuvre pour faire cesser les combats et prévenir toute escalade" et appelle au "plein respect de la protection due aux personnels humanitaires", dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères. 

Appels au cessez-le-feu

L'armée et les paramilitaires qui s'affrontent ont annoncé ouvrir ce dimanche 16 avril à 14H00 GMT des "couloirs humanitaires" pour évacuer les blessés "pendant trois heures", se gardant des deux côtés un "droit de riposte en cas de violation" de l'accord.

Les combats, à l'arme lourde dans les rues de Khartoum et de plusieurs villes et même depuis le ciel avec l'armée de l'air qui bombarde les sièges des Forces de soutien rapide (FSR) ont tué au moins 56 civils et des "dizaines" de combattants des deux camps, selon des médecins qui dénoncent réquisitions d'ambulances, routes barrées et la mort de plusieurs praticiens dans les violences.

La communauté internationale, qui a assisté impuissante au coup d'État d'octobre 2021 et n'est pas parvenue depuis à convaincre les généraux de signer un plan de sortie de crise, multiplie les appels au cessez-le-feu. Le dernier en date est venu de Pékin alors que le pape François invitait à "prier pour que les armes soient abandonnées". La Ligue arabe se réunit aujourd'hui en urgence au Caire, à l'appel de l'Égypte et de l'Arabie saoudite, deux acteurs influents au Soudan. L'Union Africaine prévoit aussi une réunion. 

Les divisions opposent le général Abdel Fattah al-Burhane, chef de l'armée, et le général Mohamed Hamdane Daglo, dit "Hemedti", à la tête des Forces de soutien rapide (FSR) - des milliers d'ex-miliciens de la guerre du Darfour devenus supplétifs officiels des troupes régulières. Elles ont dégénéré en violences samedi 15 avril au matin, dans les rues de ce pays de 45 millions d'habitants, parmi les plus pauvres au monde, déchiré par la guerre durant des décennies.
 

(Re)lire : Soudan : les FSR du général Hemedti et l'armée s'affrontent pour le contrôle de Khartoum

 

"Les civils doivent rester chez eux"

Les violences se poursuivent dimanche 16 au matin. Les rues désertes de Khartoum sont envahies d'une forte odeur de poudre, après que des explosions et des tirs ont retenti toute la nuit. Les militaires avaient prévenu dans la soirée sur Facebook : "l'armée de l'air va mener des opérations pour en finir avec les milices rebelles du Soutien rapide, les civils doivent rester chez eux".

Le matin, des combats à l'arme lourde opposaient militaires et paramilitaires dans la banlieue nord de la capitale, ainsi que dans le sud de Khartoum, selon des témoins. Partout dans la capitale, des hommes en treillis, armes en main, déambulaient dans des rues vides de tout civil. Des colonnes de fumée s'élèvent depuis samedi 15 du centre-ville où se trouvent les principales institutions du pouvoir.
 

(Re)voir : Soudan : "le conflit a pris des allures de guérilla de rue"

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56 civils tués

Des témoins ont également fait état de tirs d'artillerie à Kassala, dans l'est côtier du pays.

Selon des médecins prodémocratie, 56 civils ont été tués, pour plus de la moitié à Khartoum et dans ses banlieues, tandis que des "dizaines" de militaires et paramilitaires sont morts. Aucun bilan précis n'est disponible. En outre, environ 600 personnes auraient été blessées. 

Le conflit couvait depuis des semaines, empêchant toute solution politique dans un pays qui tente depuis 2019 d'organiser ses premières élections libres après 30 ans de dictature islamo-militaire.

Impossible en l'état de savoir quelle force tient quoi. Les FSR ont annoncé avoir pris l'aéroport en quelques heures samedi 15 mais l'armée a démenti. Les FSR ont également dit tenir le palais présidentiel. L'armée a démenti et assure surtout tenir le QG de son état-major, l'un des principaux complexes du pouvoir à Khartoum. 
 

(Re)voir : Nouveau regain de tension au Soudan

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Guerre de communication

Quant à la télévision d'État, les deux parties assurent aussi l'avoir prise. Aux alentours, des habitants font état de combats continus alors qu'à l'antenne - comme lors du coup d'État - seuls des chants patriotiques sont diffusés sans aucun commentaire.

Car la guerre ouverte entre les généraux est aussi médiatique: samedi 15, Hemedti a enchaîné les interviews aux chaînes de télévisions du Golfe, dont plusieurs États sont ses grands alliés. Il a multiplié les injures contre son rival, le général Burhane, qui, lui, n'est pas jusqu'ici apparu.

Hemedti n'a pas cessé de réclamer le départ de "Burhane le criminel". L'armée, elle, publiait sur son compte Facebook un "avis de recherche" contre Hemedti.

Les deux hommes toutefois ont répondu au téléphone quand le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a appelé pour réclamer "un arrêt immédiat de la violence". Il a également exhorté le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, voisin influent, à agir. Depuis samedi, Le Caire s'inquiète d'une vidéo montrant plusieurs de ses soldats apparemment aux mains d'hommes des FSR.