Du Caire à Bamako, l'offensive diplomatique russe de Sergueï Lavrov en quête de soutiens en Afrique

Le ministre russe des Affaires étrangères est attendu au Mali ces lundi 6 et mardi 7 février. Sa première visite dans le pays où l'accueil devrait être chaleureux tant les relations sont notoirement bonnes entre Bamako et Moscou. Il s'agit, en revanche, du troisième déplacement de Serguei Lavrov en Afrique depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine il y a un an. Sur le continent, il vient tenter d'engranger le maximum de soutiens diplomatiques.
 
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Serguei Lavrov Moscou décembre 22

Serguei Lavrov à Moscou en décembre 2022.

© Evgenia Novozhenina/ Pool Photo via AP, file
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Revoici donc Sergueï Lavrov en tournée sur le continent africain. Troisième tournée en six mois pour le ministre des Affaires étrangères de la Fédération de Russie alors que son pays cherche toujours à rassembler un maximum de soutiens diplomatiques dans le contexte de la guerre en Ukraine. Annoncé un temps au Maroc, en Tunisie ou encore en Mauritanie, c’est finalement à Bamako que va se poser le chef de la diplomatie russe ce lundi 6 février, en provenance d’Irak. 

Annonçant cette venue pour deux jours, le pouvoir malien parlait dimanche d’une visite “de travail et d’amitié”, s’inscrivant “en droite ligne du choix politique opéré par le Gouvernement de la Transition d’élargir et de diversifier les partenariats stratégiques, conformément aux principes clés guidant désormais l’action publique au Mali”. 
Sans relation de cause à effet apparente, la junte malienne annonçait également ce dimanche 5 février au soir l’expulsion du directeur droits de l’Homme de la Minusma, la mission onusienne dans le pays.

Des "tactiques coloniales"

Il y a une semaine, encore, l’indéboulonnable “Monsieur diplomatie” de Vladimir Poutine était déjà sur le continent. Fin janvier 2023, Sergueï Lavrov est à Luanda. Dans la capitale angolaise, le chef de la diplomatie russe s’en prend à l’Occident dont il fustige les “tactiques coloniales" pour faire "pression sur les continents en développement". L’Angola obtient de sa part, en revanche, un satisfecit pour sa “position équilibrée” aux Nations unies, malgré un vote hostile à Moscou deux mois plus tôt.  

L’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022 est l’occasion, comme ce fût le cas pendant les décennies de Guerre froide, de bras de fer par procuration avec les pays occidentaux au sein de l’organisation internationale.
Pour Lavrov, les Américains et leurs alliés exercent des pressions “illégales” pour obtenir des pays du Sud qu’ils votent comme eux. “Tactiques coloniales”, donc, selon le ministre russe des Affaires étrangères.  

Omniprésence

Pour s’attirer les bonnes grâces du continent africain, Serguei Lavrov, lui, a choisi l’option de l’omniprésence. Outre l’Angola évoqué plus haut, il s’est rendu au Eswatini, l’ex-Swaziland où il a proposé, notamment, l’appui de la Russie dans la formation des personnels de sécurité. Quelques heures plus tard, visite surprise en Erythrée, l’un des pays les plus fermés au monde. A Asmara, il s’entretenait avec le président Issaias Afeworki, qui dirige le pays d'une main de fer depuis son indépendance de l'Ethiopie en 1993. "Les discussions ont porté sur la dynamique de la guerre en Ukraine et le renforcement des relations bilatérales dans les secteurs de l'énergie, des mines, des technologies de l'information, de l'éducation et de la santé", rapportait sa communication.

Une visite entamée en Afrique du Sud avec, à l’issue de ce déplacement, l’annonce de prochains exercices militaires conjoints entre Moscou, Pretoria et Pékin. Autant dire que la seconde visite de Sergueï Lavrov sur le continent africain ne s’est pas soldée que par des déclarations. 

Lavrov en Ouganda 26 juillet 2022 p
Serguei Lavrov avec le président ougandais Yoweri Museveni lors d'une chaleureuse visite à Entebbe le 26 juillet 2022.
© AP Photo/Hajarah Nalwadda

Une première tournée africaine à la mi-2022

Six mois plus tôt, en juillet 2022, Sergueï Lavrov avait déjà effectué une vaste tournée à travers quatre pays africains. En Egypte d'abord, au Congo, en Ouganda et en Ethiopie, il était allé rassurer sur fond d’inquiétudes liées à l’approvisionnement en céréales. 

Coïncidence de calendrier, ou non, cette tournée de cinq jours avait eu lieu en même temps que celle du président français Emmanuel Macron qui, au Bénin, ancienne colonie française avait accusé la Russie d’être “l'une des dernières puissances impériales coloniales".