Afrique

Egypte : après le drame, la polémique

Des joueurs d'Al-Ahly tentent de fuir la pelouse (AFP)
Des joueurs d'Al-Ahly tentent de fuir la pelouse (AFP)

La mort de 74 personnes mercredi dans le stade de Port-Saïd (nord) a provoqué la colère des opposants au régime militaire. De nouveaux rassemblements sont annoncés ce vendredi. Jeudi soir à Suez, deux manifestants ont été tués.

Les faits

C'était un match de la 17ème journée du championnat d'Egypte. Le résultat ne pouvait que réjouir les supporters d'Al-Masry, le club de Port-Saïd. Une victoire 3 buts à 1 contre Al-Ahly, l'un des meilleurs clubs du pays. Le club le plus titré d'Afrique aussi. Et pourtant, en fin de rencontre, des affrontements. Puis une énorme polémique. Les rassemblements se multiplient et le pouvoir militaire est sévèrement remis en cause.
Le récit de Reza Pounewatchy.
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3 questions à ...

Alain Gresh, journaliste au Monde Diplomatique, spécialiste du Moyen-Orient.

Par Matthieu Vendrely
Quelle lecture faites-vous du drame survenu mercredi soir à Port-Saïd ? 
Les supporters des grands clubs égyptiens et notamment ceux du Caire, dont en particulier ceux d'Al-Ahly qui étaient présents à Port-Saïd ont été des éléments très actifs de la révolution. Ce sont des groupes très organisés et peu politisés. Ils ont une très longue habitude de la confrontation avec la police. Au moment de la révolution, ils ont donc été ceux qui ont protégé les manifestants et les gens de Tahrir contre les agressions de la police. Personne d'autre n'avait leur efficacité et leur compétence parce que pratiquement tous les week-ends ils affrontent la police. Cet affrontement avec la police, il faut le voir comme un refus d'une police qui en Egypte est extrêmement dure avec les jeunes, qui utilise la torture régulièrement contre les jeunes arrêtés et il y a une espèce de révolte contre l'autoritarisme. C'est pour cela que ces jeunes se sont à l'époque sentis solidaires des gens qui manifestaient sur Tahrir. 
Il y a ce jeudi des rumeurs... L'armée ou des partisans de l'ancien président Moubarak accusés d'avoir "provoqué" le drame..
C'est difficile à dire pour l'instant mais dès qu'il y  a un incident en Egypte il y a la tentation de dire "ce sont les restants du régime précédent qui essaient de profiter, c'est l'armée qui essaie de profiter". C'est possible et il y a sûrement des gens qui jouent un rôle trouble. En même temps, il y a parfois des situations incontrôlables et qui ne sont pas décidées par tel ou tel.
Ce drame survient dans un climat politique délétère... Le pouvoir est largement remis en cause.
C'est un pouvoir déstabilisé car il est impopulaire. L'armée ne représente plus ce qu'elle pouvait représenter il y  a un an. Je crois que la majorité des gens veulent qu'elle s'en aille. Le problème, c'est dans quelle condition elle va partir et comment. En gros entre aujourd'hui et le mois de juin il doit y avoir une élection présidentielle qui permettrait une transition et, avec les questions économiques et sociales, c'est aujourd'hui le débat essentiel en Egypte. Quelle transition politique et quelle rôle va jouer l'armée dans la prochaine période ? Mais il est certain que l'incapacité de l'armée à assurer l'ordre tend à la décridibiliser encore un peu plus aux yeux de l'opinion.

Le précédent égyptien

Le 17 février 1974, un match amical oppose le très populaire club du Zamalek du Caire au club tchécoslovaque du Dukla Prague. Dans les gradins, 80000. Le stade ne pouvait en contenir que la moitié. Dans la cohue, l’une des grilles qui entoure le stade cairote s’effondre. 48 Egyptiens meurent écrasés. Il y aura une cinquantaine de blessés.