Comité d'historiens pour faire la lumière sur le rôle joué par la France, moyens renforcés pour les poursuites judiciaires,... pour le 25ème anniversaire du génocide au Rwanda, le président français Emmanuel Macron a annoncé des mesures importantes pour réconcilier France et Rwanda dont les relations sont brouillées depuis le génocide de 1994.
Le président français Emmanuel Macron a annoncé vendredi la création d'un comité d'historiens qui auront accès à "toutes les archives françaises" sur la période 1990-1994 pour faire la lumière sur le rôle joué par les autorités françaises durant la période du génocide au Rwanda.
"Cette commission, qui rassemblera huit chercheurs et historiens, sous l'égide du professeur Vincent Duclert, aura pour mission de consulter l'ensemble des fonds d'archives français relatifs au génocide, sur la période 1990 - 1994 afin d'analyser le rôle et l'engagement de la France durant cette période et de contribuer à une meilleure compréhension et connaissance du génocide des Tutsis", selon un communiqué du palais de l'Elysée.
A la tête de cette commission le professeur Vincent Duclert donc, à qui le président Emmanuel Macron a adressé une lettre ce 5 avril, rappelant les objectifs de cette commission : "offrir un regard critique d'historien sur les sources consultées", "contribuer au renouvellement des analyses historiques sur les causes du génocide des Tutsis..."
> Entretien avec Vincent Duclert sur TV5MONDE, le 9 avril 2019 :
A la veille des cérémonies dimanche à Kigali pour le 25e anniversaire du génocide au Rwanda, où il n'était pas présent, Emmnanuel Macron a reçu vendredi au palais présidentiel de l'Elysée des représentants de l'association Ibuka France, dédiée au "soutien aux rescapés" et à la "mémoire" de cette tragédie.
"Le fait de créer la commission est un geste fort. Maintenant, il faut vérifier comment ça se passe. Il faut attendre. J'ai des craintes car nous avons souvent été déçus, nous avons souvent été trahis", a déclaré à la presse à l'issue de la réunion Marcel Kabanda, 62 ans, président d'Ibuka France. Cette association fondée en 2002 est le pendant français d'Ibuka ("Souviens-toi"), principale organisation de survivants du génocide au Rwanda.
Zones d'ombre
Les zones d'ombres sur le rôle de Paris avant, pendant et après ce génocide - qui fit selon l'ONU au moins 800.000 morts d'avril à juillet 1994, essentiellement au sein de la minorité tutsi mais aussi parmi les Hutu modérés - restent une source récurrente de polémique en France.
Parmi les points les plus disputés figurent l'ampleur de l'assistance militaire apportée par la France au régime du président rwandais hutu Juvénal Habyarimana de 1990 à 1994 et les circonstances de l'attentat qui lui coûta la vie le 6 avril 1994, élément déclencheur du génocide.
Le travail de la commission
"aura notamment vocation à aider à constituer la matière historique nécessaire à l'enseignement de ce génocide en France. Cette commission devra remettre son rapport dans un délai de deux ans, avec une note intermédiaire au bout d'un an", précise une source à l'Agence France Presse.
La création de cette commission correspond à un engagement pris par Emmanuel Macron à l'issue d'une rencontre avec le président rwandais Paul Kagame en mai 2018 à Paris.
"Cette commission est nécessaire. Parce que pèsent sur le rôle de la France au Rwanda avant et pendant le génocide des Tutsis de lourdes interrogations, imparfaitement documentées, qui nourrissent des accusations précises et un appel à la justice", a commenté dans le journal
Le Monde Vincent Duclert.
Concrètement
"les neuf chercheurs vont être habilités à étudier l'ensemble des fonds de l'engagement français", selon l'Elysée, du ministère des Affaires étrangères, des Armées, des services secrets, et très certainement aussi ceux des archives présidentielles de François Mitterrand.
Par ailleurs, la présidence annonce un "renforcement" des moyens judiciaires et policiers pour accélérer d'éventuelles poursuites à l'encontre de personnes suspectées d'avoir pris part au génocide des Tutsis au Rwanda qui se trouveraient en France.
En clair, de nouveaux moyens pour le pôle du Tribunal de Grande Instance chargé du traitement des procédures relatives au génocide des Tutsis au Rwanda et l'augmentation des effectifs de police judiciaire,
"afin que les génocidaires présumés faisant l'objet de poursuites puissent être jugés dans un délai raisonnable".Ce volet est sensible car plusieurs personnes soupçonnées par Kigali d'avoir joué un rôle résident en France comme par exemple Agathe Kanziga, veuve de l'ancien président Habyarimana, et que la justice française a refusé d'extrader en 2011.
La justice française a également toujours refusé d'extrader les suspects réfugiés sur le territoire national, la Cour de cassation considérant que le génocide n'était pas défini en 1994 dans le code pénal rwandais
. Génocide au Rwanda : "la France est aux côtés du peuple rwandais pour se souvenir et rendre hommage"
Hervé Berville est député français du parti présidentiel La République en Marche. Rescapé du génocide des Tutsis au Rwanda, il va représenter Emmanuel Macron aux commémorations qui se déroulent dimanche 7 avril, à Kigali. Le président français sera en effet absent "
pour des questions d'agenda" assure le député. «
La France, dans ce moment de douleur, de recueillement, (...) est aux côtés du peuple rwandais pour se souvenir et rendre hommage. » Extrait du 64 ' du 04/05/19.