Fil d'Ariane
"C'est la première fois que cela se produit en Côte d'Ivoire ! C'est la pré-campagne". Interrogé par l’Agence France Presse, le politologue Sylvain N’Guessan n’en revient pas. Mardi 31 décembre au soir, alors que le chef de l’Etat Alassane Ouattara, présente ses voeux à la Nation ivoirienne, son ex-allié, ancien Premier ministre et ancien président de l’Assemblée nationale, Guillaume Soro s’exprime également sur les différents réseaux sociaux. L’ancien président, Henri Konan Bédié leur a grillé la politesse en diffusant ses voeux trente minutes plus tôt.
La paix est notre bien le plus précieux.
Alassane Ouattara citant Félix Houphouët-Boigny
Assiste-t-on à un début de campagne sous forme de voeux de nouvelle année ? Si la forme est plus fédératrice, voire consensuelle, statut oblige, le président Alassane Ouattara semble préparer l’échéance électorale d’octobre.
Sécurité, santé, éducation, droits des femmes… Les deux tiers de son allocution de 25 minutes sont consacrés au bilan exhaustif de son action. Et lorsque le président évoque la présidentielle à venir, c’est pour se porter garant d’une continuité, garantie de “paix” et de “stabilité”, deux mots martelés dans son discours.
Au passage, Alassane Ouattara reprend des mots déjà prononcés le samedi 28 décembre 2019 : “aucune tentative de déstabilisation ne pourra prospérer”. Des mots alors adressés à son ancien Premier ministre et président de l’Assemblée nationale, son fidèle bras droit des années de crise, Guillaume Soro, entré en dissidence.
Soupçonné de vouloir préparer une “insurrection civile et militaire”, l’ancien chef rebelle a tenté de rentrer à Abidjan fin décembre. Sans succès. Il a finalement regagné son exil européen et c’est de Paris qu’il a présenté ses voeux ce 31 décembre.
Il est devenu périlleux d’être opposant en Côte d’Ivoire.
Guillaume Soro
Un discours de la même durée et au même moment que son ancien mentor. Mais un discours très offensif. Après avoir dressé une longue liste de brimades exercées à son encontre par le pouvoir depuis l’annonce de sa candidature en octobre, Guillaume Soro lance un appel à la mobilisation, car dit-il, “la détresse collective qu’on nous impose aujourd’hui ne prospère que dans la faiblesse de notre union”.
Tout comme Guillaume Soro, l’ancien président Henri Konan Bédié s’est éloigné d’Alassane Ouattara lorsque le président a décidé de transformer la coalition plurielle RHDP en grand parti présidentiel. Pas question pour Bédié de dissoudre son PDCI dans une grande formation houphouëtiste.
L’instrumentalisation de la justice par le pouvoir exécutif (...) met en péril les droits humains du justiciable et rabaisse l’Etat de droit et la démocratie.
Henri Konan Bédié
C’est donc en opposant virulent au président que Henri Konan Bédié s’exprime. Bilan économique, social, gouvernance… les critiques pleuvent. Reste au “Sphinx de Daoukro” à battre le rappel de ses partisans et de ses alliés dans la perspective d’un scrutin pour lequel, à presque 86 ans, il n’est toujours pas officiellement candidat, même s'il ne fait pas beaucoup de mystère de ses intentions.