Entre l'Éthiopie et le Somaliland, un accord qui exaspère la Somalie

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Abiy Ahmed et Muse Bihi Abdi

Le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, et le dirigeant du Somaliland, Muse Bihi Abdi, lors de la signature de l'accord le 1er janvier à Addis Abeba.

Compte X du Premier ministre éthiopien
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Il a été qualifié d'"historique" par les signataires. Le protocole d'accord entre l'Éthiopie et le Somaliland a été signé à Addis Abeba par le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed et le dirigeant de la région séparatiste du Somaliland, Muse Bihi Abdi.

L'accord "ouvrira la voie à la réalisation de l'aspiration de l'Éthiopie à sécuriser son accès à la mer et à diversifier son accès aux ports maritimes", a affirmé lundi un communiqué des services du Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed sur X. 

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Il permet à l'Éthiopie d'acquérir une part non précisée du port de Berbera, au bord de la mer Rouge, quelques mois après les déclarations d'Abiy Ahmed affirmant que son pays devait conforter son droit à l'accès à cette mer, ce qui avait suscité des inquiétudes dans la région.

Berbera est un port africain sur la côte méridionale du golfe d'Aden, à l'entrée de la mer Rouge qui mène au canal de Suez. 

Corne Afrique + Berbera

Berbera, dans le nord du Somaliland, est au coeur de l'accord signé entre l'Éthiopie et la région séparatiste.

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Redwan Hussein, conseiller à la sécurité nationale de M. Abiy, a par ailleurs avancé sur X que l'Éthiopie aurait accès à une base militaire louée sur la mer Rouge. "Un pas en avant dans la bonne direction pour cette génération et les générations à venir", a-t-il écrit sur X, sans préciser la date d'entrée en vigueur de l'accord. 

Non reconnu

Ancien territoire britannique, le Somaliland a unilatéralement déclaré en 1991 son indépendance de la Somalie, alors que ce pays plongeait dans un chaos dont il n'est toujours pas sorti. Région de 4,5 millions de personnes, le Somaliland imprime sa propre monnaie, délivre ses passeports et élit son gouvernement, mais l'absence de reconnaissance internationale le maintient dans un certain isolement. Il conserve une relative stabilité alors que la Somalie a été ravagée par des décennies de guerre civile et de rébellion islamiste. Les tensions politiques sont cependant montées ces derniers mois, aboutissant à des combats entre les forces somalilandaises et des milices soutenant le gouvernement somalien, principalement dans la région de Las Anod, revendiquée à la fois par le Somaliland et une autre région somalienne voisine, le Puntland

L'Éthiopie, deuxième pays le plus peuplé d'Afrique, s'est retrouvée sans accès propre à la mer à partir de l'indépendance de l'Érythrée en 1993, à l'issue d'un long conflit. Elle a bénéficié d'un accès à un port érythréen jusqu'à ce que les deux pays se livrent une guerre en 1998-2000 et, depuis, l'Éthiopie fait passer la plupart de ses échanges commerciaux par Djibouti. 

Addis Abeba avait déjà acquis 19% du port de Berbera en 2018, selon DP World, une société qui gère les opérations de ce port du Somaliland. Elle en détient 51%, et le Somaliland possède les 30% restants.  

Colère somalienne

Ce mardi 2 janvier, en réaction à cet accord, le gouvernement somalien a convoqué une réunion d'urgence. Mogadiscio a annoncé qu’elle allait défendre son territoire par "tous les moyens légaux" et a rappelé son ambassadeur en Éthiopie. La Somalie a qualifié l'accord de "violation flagrante" de sa souveraineté. "Le Somaliland fait partie de la Somalie en vertu de la constitution somalienne, de sorte que la Somalie considère cette mesure comme une violation flagrante de sa souveraineté et de son unité", a vivement réagi le gouvernement somalien dans un communiqué, avant de poursuivre: "En réponse à cela, le gouvernement somalien a rappelé son ambassadeur en Éthiopie pour consultation".

Je n'accepterai pas qu'on nous enlève un morceau de notre terre. Hassan Cheikh Mohamoud, président somalien.

"Je tiens à vous assurer que nous sommes déterminés à défendre le pays, nous ne permettrons pas qu'un pouce de terre, de mer et de ciel soit violé", a également affirmé le Premier ministre somalien Hamza Abdi Barre.

"Je n'accepterai pas qu'on nous enlève un morceau de notre terre", a pour sa part lancé le président Hassan Cheikh Mohamoud aux parlementaires, dénonçant un texte "en violation des lois internationales".

La Somalie a également appelé l'ONU, l'Union africaine, la Ligue arabe et le groupement régional d'Afrique de l'Est, l'IGAD, entre autres, "à défendre le droit de la Somalie de défendre sa souveraineté et de forcer l'Éthiopie à adhérer aux lois internationales".

Les islamistes shebab, groupe affilié à al-Qaïda qui mène depuis 2007 une sanglante insurrection contre le gouvernement fédéral somalien, ont également condamné l'accord et "l'agenda expansionniste d'Abiy Ahmed", dans un communiqué.

L'accord a été signé alors que les autorités somaliennes et la région séparatiste du Somaliland avaient annoncé la semaine dernière des pourparlers sous la médiation du président djiboutien Ismaël Omar Guelleh, les premiers de ce genre depuis l'échec des dernières discussions en 2020. La reprise du dialogue avait été largement saluée.