C'est une rencontre hautement importante qui s'est tenue, dimanche 9 juillet, à Asmara.
"Nous nous sommes mis d'accord pour la reprise du trafic aérien et naval, pour la circulation des personnes entre nos deux pays et la réouverture des ambassades", a déclaré Abiy Ahmed, à l'issue de discussions avec le président Issaias Afwerki.
L'avancée diplomatique était attendue mais a pris les observateurs de court : "Personne ne s'attendait à une rencontre au sommet aussi tôt. Les rumeurs ont commencé à circuler samedi sur les réseaux sociaux. Sur Twitter, la photo d'une banderole dans la capitale érythréenne sur laquelle était inscrite "bienvenue cher frère Abiy Ahmed" a alerté les observateurs. Une nouvelle confirmée ce matin lorsque le premier ministre éthiopien a atteri à Asmara. Si de nombreux Éthiopiens ont appris la nouvelle au réveil, de l'autre côté de la frontière c'était l'effervescence : des milliers d'Érythréens étaient présents dans les rues de la capitale pour accueillir le convoi d'Abiy Ahmed." raconte notre correspondante en Éthiopie Emeline Wuilbercq.
Les dirigeants des deux pays se prenant chaleureusement dans les bras à l'aéroport d'Asmara : une image encore inimaginable il y a quelques semaines. Car le conflit a des racines profondes : en 1961, le Front de libération de l'Érythrée lance une guerre d'indépendance qui durera 30 ans et débouchera sur la reconnaissance de l'État érythréen en 1993.
Avec cette indépendance, l'Ethiopie perd ainsi sa seule façade maritime. Les tensions restent vives entre les deux voisins, jusqu'à ce qu'éclate un nouveau litige, frontalier, en 1998. Il se cristallisera autour de la localité de Badme : avant que l'accord de paix d'Alger n'intervienne deux ans plus tard, les combats auront déjà fait quelque 80.000 morts. En 2002, une commission de l'ONU définit un nouveau tracé de la frontière et place Badme sous le giron d'Asmara. L'Éthiopie refuse et occupe les lieux, encore aujourd'hui.
Addis Abbeba s'est engagé à appliquer cet accord d'Alger le 6 juin dernier. Mais avec ce réchauffement diplomatique, viennent également des questions, notamment celle de la démilitarisation de la zone frontière qu'il faudra désormais trancher.