Fil d'Ariane
Présent à ce colloque qui s'est tenu pendant deux jours (du 18 au 19 juillet 2017) au Maroc, Gianni Infantino, le président de la FIFA a été le grand témoin de la réorganisation du football africain. Elle s'amorce notamment pour les compétitions continentales.
Organisé à Skhirat, près de Rabat, ce grand symposium de la Confédération Africaine de football (CAF) était surtout la première sortie du nouveau président de l'instance. Le malgache Ahmad Ahmad.
L'homme a fait une irruption fracassante dans la planète football est devenant celui qui a fait chuté, Issa Hayatou. Jusque là, l'indéboulonnable dirigeant camerounais s'était maintenu 29 ans à la tête de la CAF.
Élu en mars dernier, Ahmad Ahmad (voir encadré) s'était engagé à réformer le football continental. La réforme est en marche. Certes, la Coupe d'Afrique des Nations (CAN), le trophée majeur du continent, ne changera pas de périodicité.
Un modèle économique plus viable
Il restera bisannuel, soit tous les deux ans, comme sa cousine le Gold Cup, la coupe des nations de l'Amérique du nord, de l'Amérique centrale et des Caraïbes. Une rythmique quadriennale comme celle de l'Euro serait économiquement moins rentable pour la CAF. Et la rentabilité apparaît, plus que jamais, aujourd'hui comme le poumon des réformes à venir.
La #CAF acte le passage à une CAN à 24 dès 2019, alors que les éliminatoires ont déjà débuté pour une CAN à 16. Juridiquement contestable. pic.twitter.com/o02KAADU4Y
— Patrick Juillard (@PatrickJuillard) 20 juillet 2017
Dans les faits, la nouveauté majeure se situe à deux niveaux. La CAN va migrer du mois de janvier au mois de juin, et cela, toujours en années impaires.
C'était le souhait de nombreux acteurs du football et surtout des clubs européens, employeurs de nombreux joueurs africains.
Arrivé en 2013 au comité exécutif de la CAF, cet ex-ministre des sports à Madagascar est un fin tacticien. On lui prête des accointances avec le Qatar. Son nom est -un temps- évoqué dans la presse concernant des pots-de-vin perçus lors de la désignation de l'émirat, pour la Coupe du monde 2022, mais aucune preuve de corruption n'a été apportée. Mieux. À 54 ans, Ahmad Ahmad a su incarner une ligne transparente. Il mise sur une plus grande traçabilité de l'argent redistribué aux fédérations africaines par la FIFA avec priorité à la formation des entraîneurs et à la construction de stades modernes et sécurisés sur le continent.
L'organisation en janvier/février au cœur de la saison en Europe, était perçue comme pénalisante pour les clubs européens, même si peu d'entre eux étaient vraiment privés de leurs joueurs tout au long des six semaines de compétition. Le prédecesseur d'Ahmad Ahmad aux commandes de la CAF s'était toujours refusé de déplacer la CAN en juin. Pour Issa Hayatou, il faisait en juin, trop chaud en Afrique du nord, trop humide en Afrique centrale et trop froid dans le sud du continent. L'argument d'une météo hostile est tombé depuis que le Qatar a obtenu le droit d'organiser la Coupe du monde de 2022. Depuis aussi, que la Coupe du monde 2010, a été organisée en juin, en plein hiver, en Afrique du sud.
24 équipes
au lieu de 16
L'autre changement-clé, c'est l'augmentation des participants aux phases finales. Jusque là, 16 équipes se disputaient ce tournoi final de la CAN. Elles seront 24 et cela dès 2019. Le niveau global pourrait en pâtir, mais l'essentiel est sans doute ailleurs. La multiplication des matchs, notamment en droits de diffusion TV, est une promesse de juteuses rentrées d'argent. 24 équipes c'est aussi un tour supplémentaire et en définitive sept matchs, à disputer. Autant étapes vers le sacre, pour une compétition qui mécaniquement durera plus longtemps que les six semaines initiales.
Autre problème du passage à 24 dès 2019. La manœuvre pourrait pénaliser le Cameroun, le pays-hôte. Pourra t-il répondre dans son organisation et dans ses infrastructures à un cahier des charges modifié en cours de route à seulement deux ans de la compétition ? Plus d'équipes à accueillir, plus de stades à mobiliser, plus de matchs à organiser. Une situation juridiquement discutable, quant à l'équité puisque les éliminatoires de cette CAN ont déjà commencé. En coulisses le Maroc et l'Algérie se tiennent prêts à suppléer l'organisation camerounaise, en cas de défaillance.
Outre ces questions, liées à la CAN, ce rendez-vous institutionnel a étudié les compétitions interclubs, le football des jeunes, les convergences entre football et développement. Deux derniers ateliers étaient aussi dédiés à la communication, au marketing et à la télévision.