Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État auprès de la ministre française des Affaires étrangères, rencontre ce 10 janvier le président de transition du Burkina Faso Ibrahim Traoré pour réaffirmer l'engagement de Paris auprès de Ouagadougou, a annoncé le Quai d'Orsay, dans un contexte de relations dégradées.
La secrétaire d'État auprès de la ministre française des Affaires étrangères, chargée notamment du développement, a rencontré pendant près de deux heures le capitaine Traoré, arrivé au pouvoir à la faveur d'un coup d'État fin septembre.
La France est en mesure de faire moins ou de faire plus, elle est aussi et surtout capable de faire différemment, dans l'écoute, le respect, l'humilité.
Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État auprès de la ministre française des Affaires étrangères
"La France n'impose rien, elle est disponible pour inventer un avenir ensemble", a-t-elle déclaré à l'issue de cet entretien.
"Je ne suis venue ici influencer aucun choix ni aucune décision, personne ne peut dicter ses choix au Burkina" et
"nous sommes convenus avec le président Traoré d'avancer ensemble dans cet état d'esprit".
"En cohérence avec ce message, la France reste engagée sur tous les plans (humanitaire, sécuritaire, développement), au degré et dans les formes que souhaiteront les autorités burkinabè", a affirmé Chrysoula Zacharopoulou.
Selon elle,
"la France est en mesure de faire moins ou de faire plus, elle est aussi et surtout capable de faire différemment, dans l'écoute, le respect, l'humilité, car (...) c'est une attente qui est exprimée, avec force ici".
Cette rencontre intervient une semaine après que le ministère français a confirmé avoir reçu une lettre de la junte burkinabè demandant le remplacement de l'ambassadeur de France au Burkina Faso, Luc Hallade. Le diplomate, en poste depuis septembre 2019, est dans le viseur des autorités après avoir fait état de la dégradation de la situation sécuritaire au Burkina, ravagé par les attaques djihadistes.
(RE)lire : Burkina Faso : l'ambassadeur de France toujours en poste selon une source diplomatiqueLe diplomate, en poste depuis septembre 2019, est dans le collimateur des autorités après avoir fait état de la dégradation de la situation sécuritaire au Burkina.
"Les autorités ont demandé de nouvelles voix, de nouveaux visages. Nous sommes convenus de traiter de sujet en bonne entente et dans la forme diplomatique", a commenté Chrysoula Zacharopoulou.
(RE)lire : France : qui est Chrysoula Zacharopoulou, la secrétaire d'État chargée de la Francophonie ?La France rappelle que
"des centaines de milliers" de personnes sont déplacées au Burkina et déplore des attaques meurtrières de djihadistes contre les populations civiles et contre les forces de sécurité.
Cette situation
"doit continuer de mobiliser l'attention de tous et le soutien de la communauté internationale", ajoute le ministère.
Ces derniers mois, Paris n'a cessé de répéter que la France était disposée à poursuivre le partenariat avec Ouagadougou, en particulier dans le domaine militaire, à condition que ce partenariat soit souhaité par les Burkinabè.
Mais l'ancienne puissance coloniale se heurte à un sentiment anti-français grandissant, comme dans d'autres pays de la région sahélienne où elle s'est engagée militairement dans la lutte anti-djihadiste.
(RE)lire : Burkina Faso : la police disperse une nouvelle manifestation contre la FranceEn octobre, plusieurs centaines de personnes avaient ainsi manifesté pour exiger le retrait de la France du Burkina Faso.
Le 18 novembre, une autre manifestation contre la présence française s'était déroulée devant l'ambassade de France à Ouagadougou avant de se déplacer vers la base militaire de Kamboisin, en périphérie de la capitale, où sont stationnées environ 400 forces spéciales françaises de l'opération Sabre, chargées de traquer les chefs djihadistes au Sahel.
Le départ des forces françaises
Le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, n'avait pas écarté un départ du pays de ces forces, tout en rappelant que
"Sabre a eu un rôle clé ces dernières années dans la lutte contre le terrorisme au Sahel".
Cette priorité stratégique depuis près d'une décennie pour Paris, qui a déployé des milliers de militaires dans la région dans plusieurs opérations, est désormais confrontée à une hostilité croissante dans certains pays.
(RE)Voir : Sahel : "Le mirage sahélien", un livre très critique de l'opération Barkhane
Ces derniers mois, Paris n'a cessé de répéter que la France était disposée à poursuivre le partenariat avec Ouagadougou, en particulier dans le domaine militaire, à condition que ce partenariat soit souhaité par les Burkinabè.
Je ne souhaite pas commenter des hypothèses ni parler à la place des autorités burkinabè. Je dis simplement que chaque choix a ses conséquences.
Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État au ministère des Affaires étrangères
Une condition clé pour le maintien ou non des forces spéciales, installées depuis 2011.
"Rien n'est acté" à ce jour, indique-t-on au cabinet du ministère des Armées.
Le précédent malien est d'ailleurs dans toutes les têtes. Après neuf ans de lutte antidjihadiste, les militaires français ont quitté le pays l'été dernier, poussés dehors par une junte hostile qui a fait appel aux Russes, via la sulfureuse société paramilitaire Wagner.
Interrogée sur un éventuel appel des autorités de Ouagadougou à Wagner, Chrysoula Zacharopoulou n'a pas souhaité
"commenter des hypothèses ni parler à la place des autorités burkinabè".
"Je dis simplement que chaque choix a ses conséquences", a-t-elle déclaré.
La France, qui compte encore quelque 3.000 militaires au Sahel, après avoir mobilisé jusqu'à 5.500 hommes, a officiellement mis fin en novembre à son opération antijihadiste Barkhane, et s'est donné jusqu'au printemps pour finaliser sa nouvelle stratégie en Afrique.
"Sur le plan international, nous n'avons forcément pas le même point de vue que tout le monde, mais nous avons décidé aussi d'être souverains", a déclaré le 5 janvier le capitaine Traoré.
Le Burkina semble de plus en plus réticent à faire appel à l'aide militaire française.
"La dernière sollicitation (des autorités burkinabè) remonte à juillet 2022", rappelle l'état-major français. Soit avant le coup d'État qui a renversé le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, lui-même arrivé par la force au pouvoir en janvier 2022 en renversant le président élu Roch Marc Christian Kaboré.