L'exaspération des habitants de Boké
A Boké, ville de 100.000 habitants qui abrite une dizaine de sociétés minières, les pénuries d'électricité et d'eau sont récurrentes et le chômage endémique.Pourtant, la région est riche en bauxite dont la Guinée détient -avec 25 milliards de tonnes- près d'un tiers des réserves mondiales.
La Société minière de Boké (SMB) est gérée par un consortium regroupant notamment un géant chinois de l'aluminium et Fadi Wazni, un homme d'affaires proche du chef de l'Etat et la population locale ne comprend pas pourquoi les retombées économiques sont aussi rares.
Selon le correspondant du journal Le Lynx, le préfet, le gouverneur et le maire se sont réfugiés à Kamsar dès la montée en puissance des manifestations, mardi. Abdulaye Magassouba, le ministre des Mines, s'est rendu dans cette ville située à 25 km à l'ouest de Boké. Il a demandé aux manifestants de le rejoindre pour négocier, ce que la délégation officielle a refusé : "Les manifestations se sont déroulées à Boké, il faut venir, on ne négociera pas ailleurs".
Une crise symptômatique des villes minières
Ce n'est pas la première fois que des émeutes ou des grèves éclatent dans des villes minières. La dernière d'ampleur date du 23 novembre 2015, dans la préfecture aurifère de Siguiri, à plus de 700 km au nord-est de Conakry, la capitale. On avait déploré beaucoup de dégâts matériels et une chasse à l'homme engagée contre des expatriés, mais il n'y a eu aucune perte humaine. D'autres villes, comme Simandou et Boffa ont également connu des grèves et autres soulèvements.

Les travailleurs de ce secteur se plaignent régulièrement des conditions de travail et des salaires imposés par les sociétés minières, administrées par des salariés.
Autre inquiétude : les problèmes de pollution des cours d'eau, de l'air et des sols. Depuis des années, les habitants de Boké dénoncent le transport de bauxite par le centre-ville qui empoisonne l'air. Amadou Bah, de l'ONG Action Mines Guinée indique qu'"il n'y a pas encore de statistiques mais les populations se plaignent très souvent de problèmes respiratoires. Les maraîchers relèvent également que la fertilité des sols n'est plus ce qu'elle était". Cette ONG a réalisé en 2016, un film documentaire sur les méfaits de l'exploitation de la bauxite à Boké.