Le nouveau parlement guinéen a élu ce mardi 21 avril à sa tête un proche du président Alpha Condé qui peut désormais compter sur une assemblée entièrement à sa main. L'opposition l'accuse de préparer sa candidature à un troisième mandat.
Dans un contexte de crise politique en cours depuis des mois, Amadou Damaro Camara a été élu président de l'assemblée par 98 voix contre 6 face à son adversaire Mohamed Lamine Kaba. Un vote en l'absence non seulement des principaux dirigeants de l'opposition nationale, mais aussi des diplomates étrangers, ont constaté les correspondants de l'Agence France-Presse.
Les députés, masqués en raison de la crise du Covid-19, ont laissé deux sièges vides les uns entre les autres pour parer la propagation du Covid-19. Avec 688 cas déclarés et 6 décés, la maladie progresse rapidement dans le pays sévèrement éprouvé par Ebola entre fin 2013 et 2016 (2.500 morts).
Le nouveau Parlement tenait sa séance inaugurale après les législatives du 22 mars, boycottées par l'opposition et critiquées par les Etats-Unis, l'Union européenne et la France - ex-puissance coloniale en Guinée - qui ont mis en doute leur crédibilité, ainsi que celle du référendum constitutionnel qui avait lieu le même jour. Le scrutin a marqué par de nombreuses violences et un boycott de partis d'opposition.
Revoir : un référendum marqué par des violences et le coronavirus
Le Rassemblement du peuple de Guinée, le parti du chef de l'Etat et du nouveau président de l'assemblée, dispose de 79 sièges sur 114. L'adversaire d'Amadou Damaro Camara était quasiment inconnu du grand public.
La Guinée, pays à bas revenus malgré d'importantes ressources naturelles, est en proie à la contestation contre le projet prêté à M. Condé, 82 ans, de briguer un troisième mandat fin 2020. Cette crise a donné lieu à des violences qui ont fait des dizaines de morts depuis mi-octobre.
Alpha Condé, ancien opposant historique devenu premier président démocratiquement élu après des décennies de régimes autoritaires, entretient l'ambiguïté sur ses ambitions personnelles. Il est notamment accusé par l'opposition de dérives autoritaires.
En même temps que les législatives, Alpha Condé, élu en 2010 et réélu en 2015, a soumis le 22 mars une nouvelle proposition de Constitution à un référendum. La proposition a recueilli près de 90% de "oui", selon la Cour constitutionnelle.
L'ancienne Constitution limite à deux le nombre de mandats présidentiels consécutifs. Le nouveau texte maintient cette limite, mais l'opposition dénonce un stratagème de M. Condé pour remettre son compteur personnel à zéro et se maintenir au pouvoir. La majorité dont Alpha Condé dispose au Parlement passe pour renforcer sa maîtrise du calendrier.
Le président du nouveau parlement Amadou Damaro Camara succéderait temporairement à M. Condé en cas de vacance du pouvoir.