Guinée : un second tour à haut risque

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L'urgentiste malien
Police dans les rues de Conakry après le premier tour (AFP)
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Les tensions se sont exacerbées entre les différents camps à l'approche du second tour et c'est finalement une personnalité étrangère, le général malien Siaka Sangaré qui a été choisi pour présider la très sensible C.E.N.I. (Commission électorale nationale indépendante).

L'urgentiste malien

Signe des temps, c'est un Malien qui a été appelé au chevet de l'élection présidentielle guinéenne vacillante. Expert détaché par l'Organisation internationale de la francophonie (O.I.F.) auprès de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) en charge du scrutin, le Général Siaka Sangaré en a finalement été nommé président par un autre Général, Sékouba Konaté, qui dirige l’autorité de transition depuis l’éviction du capitaine putschiste à demi-fou, Dadis Camara. Quelles que soient ses qualités, le fait d’avoir recours à une personnalité étrangère pour sauver le processus en dit long sur la difficulté des autorités guinéennes à organiser de façon crédible un second tour déjà reporté. Au cours des jours précédents, la tension entre les différents camps, en particulier ceux des adversaires du second tour Cellou Dellein Diallo et Alpha Condé avait dégénéré en affrontements de rue. Les 18 et 19 octobre, l’armée avait tiré à balles réelles sur les partisans du premier, causant une trentaine de blessés. Ceux-ci réclamaient en particulier la démission du président d’alors de la CENI, Loucény Camara, considéré comme acquis à Alpha Condé et accusé d’avoir subtilisé des procès verbaux lors du premier tour. Loucény Camara n’est pourtant pas éliminé et sera vice-président de la CENI. DES CLIVAGES ETHNIQUES Bien accueillie des différentes parties, la nomination du nouvel arbitre malien a permis de faire baisser sensiblement la tension à Conakry. La tâche du Général Sangaré n’en est pas moins ardue. Si les échéances avaient été confirmées, quatre jours seulement auraient séparé son entrée en fonction de la date du scrutin. Aux pièges politiques, s’ajoutent les difficultés logistiques. Une cinquantaine d’ordinateurs ont ainsi été volés au siège de la CENI, pourtant théoriquement sécurisé. Si le débat public semble avoir recouvré une certaine sérénité, les méfiances restent immenses comme en témoignent les insultes et attaques qui continuent de prospérer sur internet. La dimension ethnique des clivages, surtout, est de moins en moins dissimulée. Autant que le scrutin lui-même, son lendemain recèle bien des incertitudes et quelques risques.

Siaka Sangaré

Siaka Sangaré
Général Siaka Sangaré
Général malien, il est délégué général aux élections dans son pays. Expert électoral de l'Organisation internationale de la Francophonie (O.I.F.), en mission en Guinée dès le lendemain de la prise du pouvoir de Dadis Camara (décembre 2008). Le Général Sangaré a par le passé travaillé pour la CEDEAO et l'Union africaine, notamment au Togo. Nommé le 19 octobre dernier président de la Commission électorale nationale indépendante de Guinée (CENI) par le Général Sékouba Konaté, chef intérimaire de la transition.

Des clivages ethnicisés

Largement en tête du premier tour Cellou Dellein Diallo (43,7 % des voix) est issu de la communauté peule, éloignée du pouvoir depuis des décennies mais puissante économiquement. Il est soutenu par Sydia Touré (13 %), originaire de la communauté Soussou à laquelle appartenait le défunt dictateur Lansana Conté. Leur adversaire Alpha Condé (18 %) est d’origine malinke, comme Sékou Touré. Il lui est beaucoup reproché sa constante absence du pays (il a longtemps vécu en exil) et d’être l’homme de l’étranger, ami de Blaise Compaoré et de Bernard Kouchner.
Des clivages ethnicisés
Les deux candidats du second tour (AFP)