Fil d'Ariane
Le président des États-Unis Donald Trump a affirmé lundi dans son discours d'investiture que "l'âge d'or de l'Amérique" venait juste de débuter. Si les noms des conseillers Afrique n'ont pas encore été dévoilés, son premier mandat donne une idée sur les actions qu'il pourrait déployer dans le continent.
Le président élu Donald Trump fait un geste alors qu'il marche avec sa femme Melania après un service religieux à l'église épiscopale St. John's, en face de la Maison-Blanche à Washington, lundi 20 janvier 2025, le jour de l'investiture de Donald Trump.
Tantôt adulé, tantôt fustigé, le désormais président des États-Unis divise aussi en Afrique. "C'est un rebelle contre l'establishment, c'est un rebelle contre les institutions classiques, en ce sens, on comprend donc que beaucoup d'Africains soient séduits", analyse Juste Codjo, enseignant chercheur en études stratégiques et sécurité à l'université de New Jersey.
Une séduction et un attrait qui ne sont pas forcément réciproques. "Je pense que pour lui, le continent africain a très peu de présence dans son esprit, abonde Jeff Hawkins, ex-ambassadeur américain, chercheur associé à l'IRIS et enseignant à Sciences Po. C'est quelqu'un qui n'y a jamais mis le pied sur le continent, jamais comme homme d'affaires. Jamais comme président des États-Unis."
Lors de son premier mandat, Donald Trump a délégué les voyages en Afrique aux femmes de son clan. En 2018, son épouse Mélania s'est déplacée seule en Égypte, au Ghana, au Malawi et au Kenya. Une tournée qualifiée de "diplomatique et humanitaire" sans réelle ferveur et sans déclaration à la presse
L'année d'après, c'est au tour de sa fille de se rendre en Éthiopie, en Côte d'Ivoire et au Maroc. À chaque étape du périple, Ivanka Trump, conseillère spéciale de son papa, a prôné l'émancipation économique des femmes et annonce des subventions et des aides. Mais malgré ces annonces, l'aide américaine au continent, notamment celle destinée aux femmes, a chuté.
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Dans son lot d'actions conservatrices, Donald Trump a aussi réactivé une politique qui interdit le financement par les États-Unis d'ONG internationales qui soutiennent ou informent sur l'avortement.
Prévention du paludisme, assainissement de l'eau, contraception, ou lutte contre le VIH... des causes qui ne lui tiennent pas vraiment à cœur. Son administration a coupé des millions de dollars de fonds alloués à la santé. Il a même tenté de couper l'aide au développement de l'agence fédérale USAID, mais il n'a pas été suivi par le Congrès.
Nous ne soutiendrons que des opérations efficaces et performantes, et nous chercherons à rationaliser, reconfigurer ou mettre fin aux missions qui ne sont pas en mesure de remplir leur propre mandat ou de faciliter une paix durable.
John Bolton, conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche
Concernant la sécurité, il risque d'être moins radicale sans toutefois porter un grand intérêt pour l'Afrique. Là aussi, le milliardaire se désengage : "Trump ne va jamais couper les budgets militaires. Mais, on pourrait voir retirer encore des troupes du continent", estime Jeff Hawkins. Sa cible sont notamment les missions de maintien de paix de l'ONU.
"Nous ne soutiendrons que des opérations efficaces et performantes, et nous chercherons à rationaliser, reconfigurer ou mettre fin aux missions qui ne sont pas en mesure de remplir leur propre mandat ou de faciliter une paix durable", déclarait John Bolton, conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche. Résultat : 600 millions de dollars de moins pour les missions onusiennes.
Sur le terrain, les conséquences ont été palpables. La mission de la Minuad au Darfour a pris fin en 2020. La même année, en Somalie, Trump a ordonné le retrait des 700 soldats américains déployés dans le pays.
Lors de son premier mandat, il a démontré que la diplomatie à la Trump passe surtout par des accords bilatéraux et des transactions. Sur le dossier du Sahara occidental, Washington a soutenu le Maroc contre l'Algérie, en échange de la signature par Rabat des accords d'Abraham – qui impliquait une reconnaissance d'Israël.
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Même chose au Soudan post-révolutionnaire. Les États-Unis ont proposé la levée de leurs sanctions en échange, là encore, d'une reconnaissance d'Israël.
Enfin, le président de la première puissance mondiale a prouvé que le commerce est son terrain privilégié. "Trump étant imprévisible, mais transactionnel, il y a certainement des opportunités, notamment pour les Africains, à travers des gens comme Elon Musk", note Juste Codjo, enseignant chercheur en études stratégiques à l'université de New Jersey.
En 2018, le gouvernement Trump a inauguré Prosper Africa, une organisation qui aide les entreprises américaines à investir le continent, et la Development Finance Corporation, qui, comme son nom l'indique, finance des projets de développement.
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"L'Afrique en soi et est intéressant du point de vue économique et surtout dans quelques secteurs qui sont prioritaires pour Trump : le pétrole, les minerais stratégiques, etc, décrypte Jeff Hawkins. Ça pourrait attirer, on pourrait même dire la convoitise de l'administration Trump, mais peu importe, ça pourrait l'inciter à s'intéresser beaucoup plus au continent."
Les principaux conseillers Afrique du nouveau mandat de Donald Trump n'ont pas encore été officiellement nommés. De leur nom dépendra aussi la future politique africaine des États-Unis.