Fil d'Ariane
Devant le Conseil de sécurité de l'ONU, le chef de la diplomatie malienne a demandé, vendredi 16 juin, le retrait sans délai de la mission des Nations unies au Mali (Minusma).
Le Conseil de sécurité des Nations unies réuni sur la situation au Mali, le 11 avril 2018, au siège de l'organisation, à New York.
Le ministre malien des Affaires étrangères a demandé vendredi devant le Conseil de sécurité de l'ONU le "retrait sans délai" de la mission des Nations unies dans son pays (Minusma), dont il a dénoncé "l'échec" pour répondre au défi sécuritaire.
"Le réalisme impose le constat de l'échec de la Minusma dont le mandat ne répond pas au défi sécuritaire", a déclaré Abdoulaye Diop devant les membres du Conseil qui doivent se prononcer le 29 juin sur un renouvellement du mandat de la mission de maintien de la paix qui expire le 30 juin.
"La Minusma semble devenir partie du problème en alimentant les tensions communautaires exacerbées par des allégations d'une extrême gravité et qui sont fortement préjudiciables à la paix à la réconciliation et à la cohésion nationale du Mali", a-t-il estimé.
"Cette situation engendre un sentiment de méfiance des populations à l'égard de la Minusma et une crise de confiance entre les autorités maliennes et la Minusma", a-t-il insisté, dénonçant notamment le récent rapport accablant du Haut Commissariat aux droits de l'Homme de l'ONU sur l'opération antidjihadiste à Moura en mars 2022.
"Au regard de tout ce qui précède, le gouvernement du Mali demande le retrait sans délai de la Minusma. Cependant le gouvernement est disposé à coopérer avec les Nations unies dans cette perspective", a déclaré le ministre, rejetant toutes les options d'évolution du mandat de la mission proposées par le secrétaire général de l'ONU.
Antonio Guterres, soulignant qu'un statu quo n'était pas viable, avait en janvier mis sur la table trois options pour l'évolution de la mission, d'une augmentation des effectifs à un retrait total des troupes si des conditions clés n'étaient pas remplies.
(Re)lire Le chef de l'ONU, Antonio Guterres, recommande de "reconfigurer" la mission de la Minusma au Mali
Dans un rapport publié en début de semaine, il a recommandé au Conseil la solution intermédiaire, c'est-à-dire une "reconfiguration" de la mission pour la concentrer, à effectifs constants, sur un nombre de priorités limités.
La réunion de vendredi a montré une nouvelle fois les divisions au sein du Conseil de sécurité sur la façon de faire évoluer la Minusma créée en 2013 pour aider à stabiliser un Etat menacé d'effondrement sous la poussée djihadiste, protéger les civils, contribuer à l'effort de paix, défendre les droits humains...
La renouveler ou non "est une décision qui doit être prise par le Conseil" de sécurité, a noté le chef de la Minusma, El Ghassim Wane. Mais "le maintien de la paix est basé sur le principe du consentement du pays hôte, et sans ce consentement, les opérations sont presque impossibles."
Plusieurs pays (France, États-Unis, Royaume-Uni...) ont apporté leur soutien à la Minusma.
"C'est un enjeu important pour le Mali mais aussi pour la stabilité de toute la région", a souligné l'ambassadeur français, Nicolas de Rivière.
Selon le dernier rapport d'Antonio Guterres, les pays de la région sont également "favorables" à son maintien. Les trois pays africains membres du Conseil de sécurité (Mozambique, Ghana et Gabon) ont estimé, vendredi, que la poursuite de la mission, "en coopération étroite avec les autorités maliennes, est essentielle pour consolider les avancées vers une paix durable."
A l'inverse, la Russie, qui dispose d'un droit de veto au Conseil, a apporté son soutien à la junte malienne, qui s'est tournée militairement et politiquement vers Moscou. "Nous pensons que toute proposition ici devrait être basée sur l'opinion du pays hôte, a déclaré l'ambassadeur russe; Vassili Nebenzia. Le vrai problème n'est pas le nombre de Casques bleus mais leur fonction. L'une des tâches clé du gouvernement malien est la lutte contre le terrorisme, ce qui n'est pas dans le mandat des Casques bleus."
Comme le Mali, il a également jugé "ouvertement biaisé" le rapport du haut commissariat aux droits de l'Homme de l'ONU sur l'opération anti-djihadiste à Moura en 2022.
"C'est aux autorités maliennes de transition de choisir ses partenaires mais soyons clairs, le groupe Wagner, qu'il opère indépendamment ou sous le contrôle direct de Moscou, n'est pas la réponse. Ni au Mali ni ailleurs", a de son côté signifié l'ambassadeur britannique adjoint, James Kariuki.