Le Niger confirme "le sabotage" d'une partie d'un oléoduc par un groupe rebelle

Niamey a confirmé le "sabotage" revendiqué par un mouvement rebelle d'un oléoduc qui transporte du pétrole vers le Bénin. L'attaque s'inscrit dans un contexte de crise entre le Niger et son voisin béninois avec la fermeture de leur frontière commune.

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Carte de l'Oléoduc

L'oléoduc entre le bassin d'Agadem et Cotonou fait plus de 2000 kilomètres de long

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Les autorités nigériennes ont confirmé le "sabotage" revendiqué par un mouvement rebelle d'une partie d'un oléoduc acheminant du pétrole brut vers le Bénin. 

Dans la nuit du 16 au 17 juin, "des individus malintentionnés ont saboté une partie du pipeline dans le département de Tesker (centre-est)", a indiqué vendredi soir la télévision publique Télé Sahel, dans un reportage. 

(Re)voir Niger : des rebelles revendiquent l'attaque d'un oléoduc

"D'ores et déjà, nous avons réuni des informations et des indices sur les présumés auteurs" et "tous ceux qui ont contribué vont être interpellés et jugés conformément à leur acte terroriste", a déclaré le gouverneur de la région de Zinder, le colonel Issoufou Labo qui s'est rendu sur les lieux de l'attaque.

"On sait quel est le groupe qui a la paternité de l'acte (qu'il a d'ailleurs) revendiqué", a expliqué Ousmane Baydo, le procureur de la République près du pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme de Zinder qui a ouvert une enquête. 

Un oléoduc pris pour cible

Lundi, le Front patriotique de libération (FPL), un mouvement rebelle luttant pour la libération du président nigérien Mohamed Bazoum, renversé par un coup d'Etat en juillet et détenu depuis, avait revendiqué une attaque ayant mis "hors d'usage", "un important tronçon" de l'oléoduc acheminant du pétrole brut vers le Bénin.

Le FPL a été créé en août 2023 après le renversement du président Mohamed Bazoum par des militaires le 26 juillet, qui le détiennent. 

Son leader, Mahamoud Sallah avait alors déclaré avoir pris les armes pour demander "la libération" du président déchu et avait menacé "de faire sauter des installations" notamment "pétrolières".

M. Sallah affirme qu'il souhaite l'annulation d'un "prêt de 400 millions de dollars promis aux putschistes de Niamey" par un "partenaire chinois". "Faute de quoi toutes les installations pétrolifères seront paralysées au cours des prochaines actions", a-t-il insisté.

"Cet acte de sabotage et de vandalisme"  a "endommagé le pipeline" et entrainé une fuite du brut, a affirmé Télé Sahel, qui a montré les images d'une marée noire s'étirant "sur plus de 370 mètres" en pleine brousse.

Sur ces images, on y voit de nombreux cadavres d'oiseaux  et une importante superficie de la végétation ensevelie par la marée noire.

L'oléoduc est également menacé par d'autres violences : 6 soldats nigériens chargés de le surveiller ont été tués dans une attaque, le 12 juin. 

Long de près de 2.000 km, il doit acheminer le pétrole de l'Agadem (nord-est nigérien) vers le port de Sèmè-Kpodji au Bénin. 

Ce pétrole est essentiel pour les économies des deux pays, qui travaillent avec la China National Petroleum Corporation (CNPC) - société pétrolière appartenant à l'Etat chinois - et l'entreprise chinoise Wapco.

Crise de confiance entre le Niger et le Bénin

Mais cet oléoduc est par ailleurs au coeur d'une brouille diplomatique entre le Niger et le Bénin, dont les relations sont particulièrement tendues depuis le coup d'Etat. 

Après plusieurs mois sous sanctions régionales, le Niger refuse toujours de rouvrir sa frontière avec le Bénin. Le régime militaire accuse son voisin d'abriter "des bases françaises" dans sa partie nord pour "entraîner des terroristes" qui voudraient déstabiliser le Niger, ce que la France comme le Bénin nient.

(Re)lire Frontière fermée, pétrole bloqué : comment expliquer la crise entre le Niger et le Bénin ?

Or, le président béninois Patrice Talon fait de cette ouverture une condition pour charger le pétrole.

Lundi, la justice béninoise a condamné à 18 mois de prison avec sursis trois ressortissants nigériens, arrêtés avec deux autres personnes la semaine dernière au port de Sèmè-Kpodji. Ils ont été condamnés pour "usurpation de titre et usages de données informatiques falsifiées".

Après ces arrestations, le régime militaire nigérien avait coupé les vannes de l'oléoduc.