Après 23 ans de règne sans partage, le président Ben Ali a quitté le pays et le pouvoir. Le président du Parlement tunisien, Foued Mebazza, a été proclamé président par intérim par le Conseil Constitutionnel samedi. En moins d'un mois, la lame de fond sociale et politique aura eu raison de l'un des régimes les plus verrouillés du Monde arabe. Retour sur les presque trente jours qui ébranlèrent la Tunisie.
DECEMBRE 2010Les 19 et 20 : Début du mouvement social contre le chômage et la vie chère à Sidi Bouzid (centre-ouest) en réaction à l'immolation, le 17, d'un jeune vendeur ambulant, Mohamed Bouazizi, qui protestait contre la saisie de sa marchandise par la police. Violents affrontements entre forces de l'ordre et jeunes manifestants. Début d'une vague d'arrestations. Le 24, la police tire sur des manifestants à Menzel Bouzayane (60 km de Sidi Bouzid): deux morts. Le 28, le président Zine El Abidine Ben Ali dénonce une "instrumentalisation politique". JANVIER 2011Du 3 au 7 : Violences à Saïda et manifestations à Thala (centre-ouest) marquées par des saccages et l'incendie de bâtiments officiels. Du 8 au 10 : Emeutes sanglantes à Kasserine (centre-ouest), à Thala ainsi qu'à Regueb (près de Sidi Bouzid): 21 morts selon les autorités, plus de 50 selon une source syndicale. Affrontements à Kairouan (centre). Le 10 : Le président Ben Ali dénonce des "actes terroristes" perpétrés par des "voyous cagoulés" et promet la création de 300.000 emplois supplémentaires d'ici 2012.
Le Devoir - Québec, Canada
Le 11 : Premiers affrontements à Tunis et sa banlieue, poursuite des violences à Kasserine. Fermeture des écoles et des universités. Le 12 : Le Premier ministre annonce le limogeage du ministre de l'Intérieur, la libération des personnes arrêtées, sauf celles "impliquées dans des actes de vandalisme", et une enquête sur la corruption. Plusieurs morts dans des manifestations à travers le pays, notamment un franco-tunisien à Douz (sud). L'armée se déploie dans Tunis et dans la banlieue populaire de Ettadhamen. Arrestation du chef du Parti communiste des ouvriers de Tunisie (PCOT, interdit) Hamma Hammami. Couvre-feu nocturne à Tunis et sa banlieue où des affrontements font huit morts (Fédération internationale des ligues des droits de l'homme, FIDH). Les manifestants ciblent les symboles du pouvoir et de l'argent. Le 13 : Retrait de l'armée à Tunis qui reste quadrillée par les forces spéciales. Un manifestant est tué par balles. La France se dit inquiète de "l'utilisation disproportionnée de la violence". Destructions et pillages dans la station touristique de Hammamet (60 km au sud de Tunis). Dans un discours à la nation, Ben Ali s'engage à quitter le pouvoir en 2014 et ordonne la fin des tirs contre les manifestants. Il promet la "liberté totale" d'information et d'accès à internet et annonce une baisse des prix. Treize morts à Tunis (sources médicales), deux à Kairouan pendant l'intervention télévisée. Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) appelle au renversement du régime (Service américain de surveillance des sites islamistes, SITE). Le 14 : Des milliers de manifestants, aux cris de "Ben Ali dehors", se rassemblent à Tunis et en province, notamment à Sidi Bouzid. Violents heurts dans la capitale entre des groupes de manifestants et des policiers anti-émeutes. Des blindés de l'armée se déploient devant les ministères de l'Intérieur et des Affaires étrangères ainsi que devant la Télévision et radio nationale. Ben Ali limoge son gouvervement et appelle à des législatives anticipées dans six mois, annonce le Premier ministre Mohammed Ghannouchi, qui indique avoir été chargé de former le nouveau gouvernement. Rapatriement de milliers de touristes européens. L'état d'urgence est décrété dans tout le pays. L'armée contrôle l'aéroport, l'espace aérien est fermé. Le Premier ministre Mohammed Ghannouchi annonce à 17H00 GMT à la télévision qu'il assure l'intérim de la présidence en remplacement de Zine El Abidine Ben Ali, qui a quitté le pays après 23 ans de pouvoir. M. Ghannouchi lance un appel à l'unité des Tunisiens et s'engage au respect de la Constitution. Le 15 : L'ex président Ben Ali est destitué, sans retour en arrière possible. Foued Mebazaa, le président du Parlement assure la présidence par intérim, comme le prévoit la Constitution. Le 17 : Alors que des manifestations continuent, un gouvernement d'union national est formé sous la houlette de M. Ghannouchi qui reste Premier ministre. Il annonce la libération de tous les prisonniers d'opinion, autorise l'action de la Ligue des droits de l'Homme de Tunisie et la fin de la censure sur l'information. Le 18 : Le nouveau gouvernement est défait après un jour d'existence, trois des principaux ministres d'opposition, ceux appartenant à l'UGTT, ayant décidé de se retirer, parce que la nouvelle équipe ne répond pas assez à leurs exigences.