Ce 4 mars 2014, le gouvernement libyen a réhabilité le roi Mohamed Idriss 1er el-Senoussi. Renversé en 1969 par Muammar al-Kadhafi, puis exilé en Egypte, le souverain déposé est mort en 1983. Par le même décret, ses héritiers se sont vu restituer la nationalité libyenne et les biens confisqués par le dictateur déchu. Des mesures qui pourraient ouvrir la voie à un retour de la monarchie en Libye.
Rentré d'exil le 17 mars 2011, Mohammed el-Senoussi, le petit-neveu d'Idriss 1er, s'est d'emblée présenté comme le prince de Libye en exil. Un mois après, lui qui avait si longtemps été privé d'accès aux médias, arabes et internationaux, s'exprime devant le Parlement européen. Il est "prêt à jouer son rôle en Libye", déclare-t-il, y compris "si la monarchie est restaurée". Même s'il ne s'est certainement jamais projeté comme souverain pendant ses longues années d'exil, il tend la perche aux partisans du retour de la monarchie en se déclarant "au service du peuple libyen."
Alors qu'il n'avait que sept ans, ce quinquagénaire à l'allure d'homme d'affaires discret a vu assigner à résidence son père, son épouse et leurs huit enfants. Finalement chassée de Libye, la famille royale s'était réfugiée en Grande-Bretagne en 1988. Au début de la révolution, en 2011, le prince en exil rappelait qu'en 1984, il avait échoué avec ses parents "dans une cahute sur la plage", après que les comités révolutionnaires avaient détruit la maison et les biens de la famille royale.
Idriss 1er est mort en exil au Caire, à l’âge de 94 ans.
Personnage effacé, il menait à Londres une vie discrète. Sans fortune, il habitait un appartement banal et vivait modestement. Sans profession, il disait bénéficier du soutien de Libyens en exil. Cet homme aurait-il l'envergure nécessaire pour jouer un rôle politique actif dans la Libye de demain ? Difficile à dire, car "on ne connaît pas sa personnalité, il donne très peu d'interviews, explique le spécialiste du monde arabe Slimane Zeghidour. Et puis ce n'est pas ce qui lui est demandé. Dans un pays tribalisé, divisé en mille morceaux, il incarne l'unité nationale, au-delà des ethnies et des régions. La Libye cherche, non pas un homme à poigne, mais un homme de consensus national, qui règne sans gouverner."
Le fait est que l'accession au trône de Mohammed el-Senoussi renouerait avec une période stable et prospère pour la Libye indépendante : la monarchie, entre 1951 et 1969. Aujourd'hui, le pays a déjà repris le drapeau noir, rouge et vert frappé d'un croissant et d'une étoile - après quarante ans d'interdiction au profit du drapeau vert de la "grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste" imposé par Mouammar Kadhafi. "Aujourd'hui, il est possible que l'on propose à Mohammed el-Senoussi de remonter sur le trône, explique Slimane Zeghidour. Car si les Libyens, n'ayant trouvé personne pour fédérer le pays, décidaient de rétablir la monarchie, ce serait lui le roi. Et la Libye deviendrait la deuxième monarchie du Maghreb, avec le Maroc."