Fil d'Ariane
Les dès sont jetés pour les quarts de finale de la Ligue des Champions africaine. Effectué mercredi soir au Caire, le tirage au sort a donné lieu à un remake et trois chocs.
Finaliste sortant et vainqueur de deux des quatre dernières éditions, Al-Ahly croisera comme l'an dernier le fer avec le Raja Casablanca, qualifié sans trembler un instant. Toujours au rendez-vous à ce stade de la compétition depuis le dernier changement de formule en 2017, les Égyptiens ont toutefois dû attendre la dernière journée de la phase de poules pour assurer leur billet, grâce à une victoire sur les Soudanais d'Al-Hilal (3-0).
Également décevants en Coupe du monde des clubs, avec un bilan de deux défaites et huit buts encaissés, contre le Real Madrid (1-4) et Flamengo (2-4), les Diables Rouges ont placé la reconquête du titre national très haut sur la liste de leurs priorités de la saison, après l'avoir laissé deux années de suite à leur grand rival local du Zamalek.
Solides leaders malgré une paire de matchs en retard, les coéquipiers d'Ali Maaloul vont désormais se consacrer pleinement à une autre reconquête : celle de cette C1 continentale, cédée l'an dernier au Wydad Casablanca d'un certain Walid Regragui, devenu depuis sélectionneur du Maroc avec le succès que l'on sait.
Devancé en Botola par les FAR de Rabat, les vainqueurs sortants présentent une trajectoire voisine de celle du géant cairote. Qualifiés sans briller (7 buts marqués en 6 matchs seulement), les Rouge et Blanc ont également connu la déception à la Coupe du monde des clubs, éliminés d'entrée devant leur public par les Saoudiens d'Al-Hilal. Ce parcours en demi-teinte a coûté sa place à l'entraîneur tunisien Mehdi Nafti, remplacé par Juan Carlos Garrido. Le technicien espagnol et ses hommes devront déjouer le piège tendu par le « nouveau riche » tanzanien de Simba, désireux de frapper fort pour son deuxième quart de finale en trois éditions.
Triple champion d'Algérie en titre, le CR Belouizdad arrive en quart de finale pour la troisième année consécutive et défiera les Mamelodi Sundowns. Auteurs d'une phase de poules quasi-parfaite, les Sud-Africains rêvent de refaire le coup de 2016, qui les avait vus ramener le trophée à Pretoria.
Le quatrième quart de finale nous offre un derby maghrébin entre deux clubs historiques : la JS Kabylie, qui fait figure d'invité surprise, et l’Espérance sportive de Tunis, sacrée en 2018 et en 2019. Vainqueurs du Wydad pendant la phase de poules, les Canaris de la Djurdjura sont en quête de leur premier trophée depuis la Coupe d'Algérie gagnée en 2011. Une longue disette pour ce club qui reste le plus imposant palmarès du football algérien avec 27 titres dans sa vitrine, en attendant la livraison de son nouveau stade à Tizi Ouzou.
La question peut se poser. La dernière victoire d'un club d'une autre sous-région du continent remonte à 2016, et au sacre des Mamelodi Sundowns, alors présidés par le futur président de la CAF, Patrice Motsepe.
Depuis l'édition 2020, quatre clubs ont été constamment présents en quarts de finale. Trois viennent d'Afrique du Nord (Al-Ahly, le Wydad Casablanca, l'Espérance de Tunis), un seul d'une autre sous-région : les Mamelodi Sundowns (Afrique du Sud). Sur cette même période, les clubs « septentrionaux » représentent un minimum de cinq quart-finalistes, et le plus souvent six d'entre eux, soit 75% du plateau à ce stade de la compétition. Le « prize money » de l'épreuve étant principalement distribué à partir de ces mêmes quarts de finale, on ne s'étonnera pas de voir l'écart se creuser entre ces clubs puissants et bien structurés et tous les autres.
Seules l'Afrique australe (les Mamelodi Sundowns mais aussi les Kaizer Chiefs, finalistes en 2021, ainsi que les Angolais du Petro Atletico l'an dernier) et l'Afrique de l'Est, avec l'émergence de Simba, parviennent encore à glisser un ou deux orteils dans la porte.
Formation dominante dans la décennie 2010, le TP Mazembe décline en revanche d'année en année : il faut remonter à 2020 pour trouver trace de la dernière présence du club de Lubumbashi (RD Congo) en quarts de finale.
Avec son calendrier désormais calqué sur celui de sa très populaire grande sœur européenne, la Ligue des Champions africaine peine ces dernières années à susciter l'engouement sur l'ensemble du continent. Le tableau final regroupe désormais pratiquement les mêmes clubs d'année en année, avec un outsider parfois présent comme par accident.
La difficulté à trouver des sponsors à dimension continentale, en particulier dans un contexte de cohabitation avec la « petite » Coupe de la Confédération, complique la tâche de la Confédération africaine de football quand il s'agit de promouvoir sa compétition interclubs la plus prestigieuse. La création d'une Super Ligue vise à tourner cette dernière difficulté. Mais quid de la désaffection du public continental pour l'actuelle Ligue des Champions ? Ne provient-elle pas du fait que cette dernière est déjà devenue, de facto, une Ligue quasi fermée ?
Au moment où certaines équipes nationales brillent inversement aux clubs de leur pays (le Sénégal n'est que l'exemple le plus éclatant de cette tendance lourde), la bonne formule reste plus que jamais à trouver pour le football de clubs en Afrique. En attendant, les quarts de finale de la Ligue des Champions africaine débutent le 21 avril.