Malawi : les albinos en danger de mort

Les albinos du Malawi sont menacés de "disparition" par la sorcellerie. L’ONU, qui a conduit une mission sur le sujet, tire la sonnette d’alarme.
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Pendo Noni, un jeune albinos de Tanzanie.
©AP Photo/Julie Jacobson
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L'albinisme est une maladie génétique héréditaire qui se traduit par une absence de pigmentation dans la peau, le système pileux et l'iris des yeux.

Environ une personne sur 1.200 est albinos au Malawi.

La situation des 10.000 albinos malawites "constitue une urgence". Tel est le constat fait par l’ONU après une mission menée au Malawi. "Si rien n'est fait pour mettre un terme aux atrocités" dont elles sont victimes, les personnes atteintes d'albinisme sont menacées de "disparition méthodique" met en garde Ikponwosa Ero, l’experte nigériane, elle-même albinos, du Conseil des droits de l’Homme pour les Nations unies en charge de la mission, le 29 avril.
 
Au Malawi, les personnes albinos sont traquées et tuées à des fins de sorcellerie. Leurs membres et leurs os sont en effet utilisés par les sorciers pour des rituels censés apporter richesse et pouvoir. Mais le Malawi n’est pas un cas à part puisque d’autres pays d'Afrique sub-saharienne, comme le Kenya, le Mali, la Tanzanie ou le Burundi, pratiquent cette chasse à l’homme.

Surnommés "argent"

"Le Malawi est l'un des pays les plus pauvres au monde et la vente d'organes d'albinos semble très lucrative" prévient Ikponwosa Ero. "Je suis particulièrement inquiète des témoignages de personnes albinos qui sont surnommées "argent" lorsqu'elles marchent dans la rue", a-t-elle ajouté. L’experte de l’ONU dénonce également le manque de résultats de la politique menée par le pays pour les secourir.

Comme le relève Mashable avec France24, Ikponwosa Ero a ainsi préconisé au Malawi de former ses policiers, ses procureurs et ses magistrats "pour améliorer la connaissance du cadre législatif actuel applicable à ces cas, la coopération entre la police et le ministère public, et des ressources suffisantes pour le procureur spécial nouvellement nommé".

Selon elle,  les albinos sont persécutés jusqu'après leur mort "car leurs tombes sont profanées".

Nombreuses agressions

Le 29 avril, deux malawites ont été condamnés à 17 ans de prison. La semaine précédant leur audience devant le tribunal, ils avaient été arrêtés pour le meurtre d'une femme albinos de 21 ans, nièce de l’un des deux criminels. "Les deux hommes ont plaidé coupable", a indiqué le porte-parole de la police Kondwani Kandiado. L’oncle de la victime et son complice ont accusé Satan d’être responsable leur geste. Ils ont vainement demandé à la cour d’être clémente avec eux.
 
Dans son rapport, Ikponwosa Ero souligne néanmoins que "l'intervention rapide de voisins lors d'attaques a dans plusieurs cas conduit à sauver des personnes atteintes d'albinisme et arrêter des responsables".

En mars, Amnesty International avertissait déjà du "grave danger" que courent les personnes atteintes d'albinisme. "La découverte de la tête d’un garçon de neuf ans qui avait été enlevé sous les yeux de sa mère illustre à quel point les personnes albinos sont en danger au Malawi. Il est urgent que la police mène une enquête approfondie et présente à la justice tous les responsables présumés de ce crime odieux", pressait Deprose Muchena, directeur du programme Afrique australe de l'ONG de défense des droits humains.

Depuis 2008, l'association canadienne Under the same sun lutte également contre les discriminations dont sont victimes les albinos en Afrique, principalement en Tanzanie, grâce à des programmes d'éducation et de sensibilisation.
 
Depuis la fin de l'année 2014, l’ONU affirme que la police du Malawi a enregistré 65 agressions, enlèvements ou meurtres d'albinos.