Fil d'Ariane
Plusieurs civils, dont des enfants, ont été tués mardi dans des frappes imputées à l'armée malienne à Kidal, possible préfiguration de la bataille à venir pour ce bastion de la rébellion touareg et enjeu majeur de souveraineté pour l’État central. Le Cadre stratégique permanent (CSP), une alliance de groupes armés à dominante touareg, a fait état dans un communiqué de 14 morts, dont huit enfants.
"Il y a eu plusieurs frappes ce matin. On dénombre six morts dont trois enfants", a indiqué un agent de santé sous le couvert de l'anonymat. D'autres témoignages font état d'un bilan humain plus lourd.
Almou Ag Mohamed, un porte-parole de la Coordination des mouvements de l'Azawad (CMA), alliance de groupes séparatistes dominée par les Touaregs, a fait état auprès de l'AFP de douze morts, dont quatre enfants, dans trois frappes distinctes.
Les témoignages évoquent des frappes aériennes sans plus de précision ou l'usage de drones. L'armée malienne dispose de drones. Aucune réaction n'a été obtenue dans un premier temps de la part des autorités maliennes.
Au moins une des frappes a touché le camp occupé jusqu'à récemment par la mission de l'ONU (Minusma).
Lire : la mission de l'ONU quitte son camp à Kidal, aussitôt occupé par les rebelles
Kidal est sous le contrôle de la rébellion. Ses groupes qui avaient conclu un accord de paix avec le gouvernement en 2015 viennent de reprendre les hostilités.
L'insoumission de la région de Kidal, zone où l'armée a subi d'humiliantes défaites entre 2012 et 2014, est un vieux motif d'irritation à Bamako.
Le nord du Mali, pays en proie depuis 2012 à la propagation jihadiste et à une profonde crise multidimensionnelle, est le théâtre depuis août d'une escalade militaire entre tous les acteurs armés présents (armée, rebelles, jihadistes).
Le retrait de la Minusma a déclenché une course pour le contrôle du territoire. L'évacuation par la Minusma de son camp de Kidal, ville bastion des séparatistes, s'annonçait comme la plus inflammable.
Les séparatistes s'opposent à ce que la Minusma remette les camps aux autorités maliennes, ce qui va à l'encontre selon eux des accords passés en 2014 et 2015 quand, après s'être soulevés en 2012, ils avaient accepté de cesser le feu et de faire la paix.
Anticipant le départ de la Minusma, un important convoi de l'armée est parti le 2 octobre de Gao en direction de Kidal.
Mais la mission de l'ONU, contrainte par la dégradation sécuritaire, a accéléré son retrait à la grande irritation de la junte au pouvoir à Bamako, et quitté la semaine passée son camp de Kidal. La rébellion séparatiste en a aussitôt pris le contrôle, devançant l'armée malienne.
Les colonels qui ont pris la tête du pays par la force en 2020 ont fait de la restauration de la souveraineté territoriale leur mantra.
La Minusma, dont les effectifs ont tourné autour des 15.000 soldats et policiers et dont plus de 180 membres ont été tués dans des actes hostiles, est censée être partie d'ici au 31 décembre. Depuis juillet, elle a retiré du Mali près de 6.000 membres du personnel civil et en uniforme.