Fil d'Ariane
Ancien ministre devenu l’un des leaders du M5-RFP, le Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques, Choguel Kokalla Maïga vient d’être nommé premier ministre par le président de la transition malienne, le colonel Assimi Goïta. La nomination d'un chef civil du gouvernement était une exigence de la communauté internationale. Quelle sera sa marge de manoeuvre face aux militaires ? Portrait d’un ingénieur de formation devenu l’un des principaux acteurs de la classe politique malienne.
Comme toujours, c’est la mine grave et le ton solennel que Choguel Kokalla Maïga s’est adressé à plusieurs centaines de personnes réunies le 4 juin dernier, à Bamako, au Mali, autour de la place de l’indépendance. « Notre peuple a besoin qu’on lui tienne la main pour qu’il se sente debout, pour qu’il retrouve sa fierté, pour qu’il retrouve sa dignité, pour qu’il retrouve son indépendance, pour qu’il retrouve sa souveraineté, pour qu’il retrouve son unité », martelait-il alors. Nommé premier ministre par le colonel Assimi Goïta, président de la transition malienne, l'homme va devoir composer avec les militaires au pouvoir.
Mali : Assimi Goïta nomme un nouveau Premier ministre
A 63 ans, Choguel Kokalla Maïga prend la tête d’un gouvernement qui doit non seulement préparer le retour au pouvoir des civils dans neuf mois, mais aussi tenter de sortir le pays d’une crise politique consécutive à deux putschs militaires successifs.
C’est à Tabango, petite localité de la région de Gao, dans l’est du Mali, que Choguel Kokalla Maïga naît en 1958, deux ans seulement avant l’indépendance. A 19 ans, le baccalauréat en poche, il s’envole pour l’URSS dont il revient une décennie plus tard, nanti d’un diplôme d’ingénieur en télécommunications. Une fois ses obligations militaires accomplies, il occupe différents postes de responsabilité au sein de la SOTELMA, la Société des télécommunications du Mali.
Mali : le colonel Goïta a prêté serment comme président de la transition
Ses premiers pas en politique, Choguel Kokalla Maïga les fait dès la fin des années 1980 au sein de l’Union nationale des jeunes du Mali, une association fondée par le régime dictatorial de feu le général Moussa Traoré. En 1997, il crée le MPR, le Mouvement patriotique pour le renouveau, une organisation qui revendique alors sa proximité avec l’ancien président autocrate Moussa Traoré.
En 2002, il se présente à l’élection présidentielle où il obtient 2,73% des voix au premier tour, avant de soutenir Amadou Toumani Touré, futur vainqueur de ce scrutin. Dans la perspective des législatives suivantes, il rejoint la coalition Espoir 2002, au sein de laquelle il fait cause commune avec le RPM, Rassemblement pour le Mali d’Ibrahim Boubacar Keïta, ainsi que le CNID, le Congrès national d’initiative démocratique de Mountaga Tall.
Entre 2002 et 2007, Choguel Kokalla Maïga devient ministre de l’Industrie et du Commerce dans les gouvernements d’Ahmed Mohamed Ag Hamani, puis d’Ousmane Issoufi Maïga. Pour l’élection présidentielle de 2007, il soutient la candidature du président sortant Amadou Toumani Touré. Après la chute de ce dernier et l’arrivée au pouvoir d’Ibrahim Boubacar Keïta, Choguel Kokalla Maïga fait son retour au gouvernement en janvier 2015 comme ministre de l’Economie numérique, de l’Information et de la Communication. Un an et demi plus tard, à la suite d’un remaniement ministériel, il n’est pas reconduit à son poste.
Qu’à cela ne tienne, Choguel Kokalla Maïga décide d’être une fois de plus candidat à l’élection présidentielle de 2018. Un scrutin très contesté, mais finalement remporté par le président sortant Ibrahim Boubacar Keïta. Le 10 juillet 2020, après plusieurs mois de vives tensions politiques, la coalition d’opposition M5-RFP organise des manifestations contre le président Ibrahim Boubacar Keïta dans l’ensemble du pays. A Bamako, la capitale, des heurts violents avec la police provoquent la mort d’au moins 4 personnes et de nombreux blessés. Dans les heures qui suivent, les autorités maliennes procèdent à l’arrestation de plusieurs figures du mouvement dont Choguel Kokalla Maïga.
Après la chute du régime d'Ibrahim Boubacar Keïta et l'arrivée au pouvoir de la junte dirigée notamment par le colonel Assimi Goïta, Choguel Kokalla Maïga devient l'un des acteurs clés de la transition. C'est donc un homme rompu aux arcanes de la politique malienne qui accède aujourd'hui aux plus hautes responsabilités. Attendue depuis plusieurs jours, sa nomination répond à une exigence des partenaires du Mali : que le poste de premier ministre soit confié à un civil.