“À l’époque de Hassan II on avait peur du roi, maintenant on a peur pour le roi“
Idir Ouguindi Professeur d’économie au lycée 43 ans "Il reste beaucoup de choses à faire. Il faut une meilleure répartition des richesses, pour créer une “vraie” classe moyenne. Aujourd’hui son revenu mensuel est de 2600 dirhams, l’équivalent de 260-270 euros, trop peu pour vivre dans les grandes villes. Si l’on va dans le Maroc profond, il y a un vrai décalage. En ce qui concerne l’éducation d’abord. Il faut que les enfants restent à l’école après la rentrée, beaucoup partent après quelques semaines de cours. Ensuite dans le domaine de la santé, il manque des structures et du personnel – médecins, infirmières… Enfin, les infrastructures: il faut construire des routes afin de désenclaver les douars. On sort de 40 ans de pauvreté et d’autorité. On a besoin d'améliorations dans tous les domaines, droits civiques, sociaux et économie. Et on avance au fur et à mesure. Mais le changement doit se faire par le haut et par le bas. Le roi doit être un exemple et tout le monde – société civile, syndicats, hommes politiques…- doit le suivre. Ce n’est pas le cas aujourd’hui. Pour moi, l’avenir du Maroc est dans son école : il faut changer le système éducatif et mettre l’enseignement à la portée de tous pour en faire un véritable ascenseur social. Mais il manque encore une réelle volonté politique même si le roi affiche régulièrement son désir d’avancer dans ce domaine. Je suis très attaché à la monarchie et à Mohammed VI: un homme honnête, doué d’une grande modestie et d’une volonté de faire mieux. À l’époque de Hassan II on avait peur du roi, maintenant on a peur pour le roi. Mais on ne peut pas laisser le pouvoir aux mains d’une seule personne. Si on tient à une gestion efficace de la chose publique, il faut répartir le pouvoir, instaurer des gardes-fous et protéger le citoyen. Je voudrais comme beaucoup de marocains un gouvernement élu et un premier ministre responsable."
“La jeunesse est au centre de toutes ses réformes“
Lahcen Zinoun Chorégraphe, danseur et cinéaste 65 ans "Comme réforme majeure je retiens celle du code de la famille en 2004, qui institue l’égalité dans le couple entre l’homme et la femme, et ce, malgré la résistance des plus conservateurs. La preuve de l’émancipation de la femme au Maroc aujourd’hui c’est le nombre incroyable de femmes artistes, et de femmes qui occupent des postes autrefois dédiés aux hommes – médecins, avocats, pilotes, ministres… Sur le plan économique, le souverain a modernisé les infrastructures, l’électricité est présente dans presque tout le pays, les grandes villes sont reliées par autoroutes, et un gigantesque port est en construction dans le nord. Un statut de l’artiste est entré en vigueur en 2003: désormais, nous bénéficions des mêmes droits que les autres travailleurs pour la sécurité sociale et d’une couverture médicale obligatoire depuis 2006. Quatre centres culturels marocains ont été inaugurés à Bruxelles, Paris, Barcelone, Tripoli et un cinquième bientôt à Montréal. Il y a aussi une vraie volonté politique de promouvoir le septième art. Le Maroc produit entre quinze et vingt longs-métrages par an ainsi qu’une centaine de courts. Des écoles de cinéma ont ouvert à travers le Royaume, ainsi que des festivals de cinéma. N’oublions pas non plus les grands festivals de musique, Fès, Rabat, Casablanca, Agadir, Marrakech… En revanche, il est encore difficile d’initier la jeunesse à la musique contemporaine et à la danse. Pour cela, il faut proposer aux élèves un véritable cursus reconnu internationalement. Il faut faire confiance à Mohammed VI, lui laisser du temps. N’oublions pas que ce jeune roi représente un espoir pour toute une génération. Il tient compte du peuple et la jeunesse, qu’il représente, est au centre de toutes ses réformes."