Mauritanie : l'ex-président Mohamed Ould Abdel Aziz est inculpé pour corruption

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Mohamed Ould Abdel Aziz
Mohamed Ould Abdel Aziz, alors président de Mauritanie, attend le président français Emmanuel Macron ce 2 juillet 2018 sur le tarmac de l'aeroport de Nouakchott pour le sommet du G5 Sahel.
AP/ Ludovic Marin
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L'ex-président mauritanien Ould Abdel Aziz et une dizaine de hautes personnalités ont été inculpés de 11 mars  à Nouakchott pour corruption et placés sous contrôle judiciaire. Après plus de dix ans au pouvoir entre 2008 et 2019, cette inculpation représente une nouvelle étape de la chute de l'ancien président mauritanien.
Le juge d'instruction a suivi les réquisitions du procureur Ahmedou Ould Abdallahi qui avait demandé l'inculpation et le placement sous contrôle judiciaire de M. Ould Abdel Aziz, d'un de ses gendres, de deux anciens premiers ministres et de plusieurs anciens ministres et hommes d'affaires, a dit une source judiciaire proche de l'enquête et s'exprimant sous le couvert de l'anonymat en raison de la confidentialité et de la sensibilité des investigations.

L'un des avocats de l'ancien président, Me Mohameden Ould Icheddou, a confirmé l'information. Son client "a refusé de répondre aux questions du juge, s'en tenant à l'immunité que lui confère la Constitution en son article 93", a-t-il dit à l'AFP.

L'ancien président n'a pas été mis sous mandat de dépôt. Le juge précisera prochainement les conditions du contrôle judiciaire, a dit la même source judiciaire anonyme. Le procureur a requis un contrôle judiciaire "poussé".

Une inculpation, symbole de la chute de Mohamed Ould Abdel Aziz

Après plus de dix ans au pouvoir entre 2008 et 2019, cette inculpation représente une nouvelle étape de la chute de Mohamed Ould Abdel Aziz sous son successeur Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani, son ancien chef de cabinet et ministre, dont il avait pourtant préparé l'accession à la présidence.

Mohamed Ould Abdel Aziz crie au "règlement de comptes". Son successeur a constamment invoqué l'indépendance de la justice.

"La liste des chefs d'inculpation dressés contre lui (l'ex-président) par le parquet et sur lesquels le juge d'instruction doit statuer et enquêter est longue", avait dit dans la journée une source proche du parquet sous le couvert de l'anonymat.

Elle "comporte notamment la corruption, le blanchiment d'argent, l'enrichissement illicite, la dilapidation de biens publics, l'octroi d'avantages indus et l'obstruction au déroulement de la justice", selon la même source.

La justice est en effet saisie depuis août 2020 du rapport d'une commission d'enquête parlementaire chargée de faire la lumière sur des faits présumés de corruption et de détournement de fonds publics pendant les années de pouvoir du président Ould Abdel Aziz. En août 2020, il avait été interrogé plusieurs jours par les policiers et est ressorti privé de son passeport.

Mauritanie : le président Aziz relâché mais restreint dans ses mouvements
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La commission s'est penchée sur plusieurs aspects : gestion des revenus pétroliers, vente de domaines de l'Etat, liquidation d'une société publique assurant l'approvisionnement du pays en denrées alimentaires ou activités d'une société chinoise de pêche.

Des bien évalués à 96 millions d'euros

Au terme d'une enquête préliminaire transmise au parquet début mars, la procédure s'est accélérée avec la convocation en début de semaine d'une kyrielle de personnalités dans les locaux de la police à Nouakchott, dont l'ancien chef de l'Etat.

Arrivé au pouvoir par un coup d'Etat militaire, M. Ould Abdel Aziz a été élu en 2009 et réélu en 2014 président de ce pays pauvre d'Afrique de l'Ouest de 4,5 millions d'habitants. M. Ghazouani, son dauphin, a été élu à sa succession en juin 2019.

L'enquête financière menée parallèlement à celle de la police a permis d'identifier et de geler ou saisir des sociétés, des immeubles et appartements, des parcs de véhicules, des sommes d'argent, rien qu'en Mauritanie, dit le parquet.

Ces biens sont évalués sommairement à l'équivalent de 96 millions d'euros, dont 67 millions revenant à l'un des suspects et 21 au gendre de celui-ci, a dit le parquet sans préciser s'il faisait référence à l'ex-président et son gendre.