Niger : 20.000 personnes réunies à Niamey en soutien aux putschistes

Samedi 26 août, quelque 20.000 personnes se sont rassemblées dans les rues de la capitale nigérienne Niamey en soutien au régime militaire issu d'un coup d'État. Cette manifestation a été organisée au lendemain d’un ultimatum de 48 heures des putschistes à l'encontre de  l'ambassadeur de France au Niger, Sylvain Itté, sommé de quitter le pays.

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niger manifestation pro putschistes

Photo d'illustration. Des partisans de la junte au pouvoir au Niger brandissent un drapeau russe à Niamey, au Niger, dimanche 1er août. 6 janvier 2023.
 

AP/Sam Mednick
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Les partisans des militaires ayant pris le pouvoir se sont retrouvés dans le stade Seyni Kountché, le plus grand du Niger. Ils sont venu avec des drapeaux nigériens, algériens, russes, parsemant les tribunes.

Ramatou Ibrahim Boubacar, un mannequin, s'est parée de drapeaux nigériens des pieds à la tête. "On a le droit de choisir les partenaires qu'on veut, la France doit respecter ce choix", dit-elle. "Depuis soixante ans, on n'a jamais été indépendants, on l'est seulement depuis le jour du coup d'État" du 26 juillet qui a renversé le président élu Mohamed Bazoum, estime-t-elle, avant de lancer : "alors nous sommes à 100% derrière le CNSP".

Le combat ne s'arrêtera que le jour où il n'y aura plus aucun militaire français au Niger.
Colonel Ibro Amadou, membre du CNSP

"Plus aucun militaire français au Niger"

Plusieurs manifestations de soutien aux militaires ayant pris le pouvoir le 26 juillet ont été organisées à Niamey. Elles ont, à chaque fois, été rythmées par des slogans hostiles à la France et la Cedeao. La Russie - qui tire profit de l'hostilité à l'égard de Paris dans le Sahel - étant quant à elle louée et applaudie.

"Le combat ne s'arrêtera que le jour où il n'y aura plus aucun militaire français au Niger", a déclaré à la foule un membre du CNSP, le colonel Ibro Amadou. "C'est vous qui allez les chasser", a-t-il dit, ajoutant cependant : "Pour les chasser ne partez pas à leur ambassade (...) après que chacun rentre chez lui, ils vont finir par partir".

Le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) qui est désormais au pouvoir, avec à sa tête le général Abdourahamane Tiani, a depuis pris la France, l'ex-puissance coloniale, pour cible privilégiée.

L'ambassadeur de France dans le viseur de la junte 

Ce nouveau rassemblement en soutien au CNSP, se déroule au lendemain de sa décision d'expulser l'ambassadeur de France au Niger, Sylvain Itté, pour n'avoir pas répondu à une "invitation" du ministère nigérien des Affaires étrangères mais aussi pour "d'autres agissements du gouvernement français contraires aux intérêts du Niger". Il a été donné à M. Itté 48 heures pour quitter ce pays.

Paris a répliqué en affirmant que "les putschistes n'ont pas autorité pour faire cette demande, l'agrément de l'ambassadeur émanant des seules autorités légitimes nigériennes élues", celles du président Mohamed Bazoum.

La décision d'expulser l'ambassadeur de France est l'aboutissement d'un mois de manifestations, décisions et déclarations hostiles à la politique française depuis le coup d'État contre Mohamed Bazoum, toujours détenu avec une partie de sa famille.

Quatre jours après la prise du pouvoir par des militaires, des centaines de leurs partisans ont manifesté devant l'ambassade de France à Niamey, y provoquant des dégâts. Les manifestants ont été dispersés à l'aide de gaz lacrymogène et le régime a accusé la France d'avoir utilisé des armes, ce qu'a catégoriquement démenti le gouvernement français.

Paris se défend 

Le 3 août, les nouveaux maîtres de Niamey ont dénoncé une série d'accords militaires avec la France, une décision que Paris a ignoré, ne reconnaissant que Mohamed Bazoum en tant que dirigeant légitime du Niger.

Les militaires ont par ailleurs accusé la France d'avoir violé à plusieurs reprises son espace aérien fermé sur décision du régime et d'avoir "libéré des terroristes", dans le cadre à leurs yeux d'"un véritable plan de déstabilisation de (leur) pays". Accusations là encore vigoureusement rejetées par Paris.

Le Niger des militaires suit les traces du Mali et du Burkina Faso où il n'y a plus d'ambassadeur de France. Ces deux pays également dirigés respectivement depuis 2020 et 2022 par des militaires ayant pris le pouvoir par la force et confrontés à la violence jihadiste, se sont montrés solidaires des généraux de Niamey, se disant prêts à combattre au côté de l'armée nigérienne en cas d'intervention de la Cedeao.

Efforts diplomatiques

Les efforts pour une solution diplomatique à la situation au Niger se poursuivent. Des émissaires algériens se sont rendus dans la région. Samedi 26 août, la secrétaire d'État américaine adjointe chargée des affaires africaines, Molly Phee, a rencontré les responsables de la Cedeao à Abuja, la capitale du Nigeria qui en assure la présidence.

Les putschistes ont accusé la Cedeao d'être à "la solde" de la France, qui dispose encore au Niger de 1.500 soldats. Ces derniers, avant le coup d'État, participaient à la lutte contre les groupes djihadistes qui ensanglantent depuis des années ce pays et une grande partie du Sahel.

La Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (Cedeao) a décidé après le coup d'État d'imposer de lourdes sanctions économiques et financières au Niger, suspendu de cette organisation, et a également menacé d'y intervenir militairement afin de rétablir Mohamed Bazoum dans ses fonctions.