Fil d'Ariane
La numéro deux par intérim de la diplomatie américaine, Victoria Nuland, a eu des discussions "difficiles" à Niamey avec les militaires auteurs du coup d’État au Niger. Les États-Unis disent privilégier la voie diplomatique pour restaurer l'ordre constitutionnel, plutôt que l'intervention militaire un temps envisagée par les pays d'Afrique de l'Ouest.
Manifestation à NIamey ce 3 août en faveur des militaires qui ont renversé le président Bazoum.
Les dirigeants de la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (Cedeao) vont à nouveau se réunir jeudi à Abuja, la capitale du Nigeria, pour évoquer la situation au Niger, deux semaines après le coup d’État selon un communiqué de la Cédéao.
Lors d'un précédent sommet à Abuja le 30 juillet, les dirigeants ouest-africains avaient donné une semaine aux militaires nigériens pour rétablir le président élu Mohamed Bazoum, actuellement retenu prisonnier. Les chefs d'état-major de la région avaient même dessiné les "contours" d'une éventuelle intervention armée, mais elle n'a pas été déclenchée à l'expiration de l'ultimatum dimanche à 23H00 TU.
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Selon une source proche de la Cédéao, une intervention n'est pas envisagée à ce stade, et la voie du dialogue semble donc toujours sur la table.
"Il est certain que la diplomatie est le moyen préférable pour résoudre cette situation. C'est la démarche de la Cédéao, c'est notre démarche et nous soutenons les efforts de la Cédéao pour rétablir l'ordre constitutionnel", a déclaré pour sa part à RFI le secrétaire d’État américain Antony Blinken.
"Ce que nous voyons au Niger est désolant et n'offre rien au pays et au peuple du Niger", a-t-il poursuivi, estimant que les États-Unis et d'autres pays allaient se retrouver "dans une position où nous devons arrêter notre soutien au Niger".
Une haute responsable de la diplomatie américaine, Victoria Nuland, a déclaré lundi avoir rencontré à Niamey les auteurs du coup d’État. "Ces discussions ont été extrêmement franches et par moment assez difficiles", a-t-elle dit à la presse par téléphone.
Victoria Nuland, numéro deux de la diplomatie américaine par intérim, a indiqué avoir rencontré le général de brigade Moussa Salaou Barmou, nouveau chef d'état-major de l'armée, et d'autres responsables, mais n'avoir pu s'entretenir ni avec le chef des militaires au pouvoir, le général Abdourahamane Tiani, ni avec le président renversé Mohamed Bazoum.
Elle a dit avoir proposé "de nombreuses options" pour mettre fin au coup d’État, ainsi que les "bons offices" des États-Unis "s'il y avait un désir de la part des responsables de revenir à l'ordre constitutionnel", tout en ajoutant: "Je ne dirais pas que cette offre a été prise en compte de quelque manière que ce soit".
La responsable a par ailleurs précisé que le général Barmou était bien au fait de la coopération existant entre le Niger et les États-Unis, en raison de son engagement passé dans les forces spéciales.
Les auteurs du coup d’État "comprennent très bien les risques que fait courir à leur souveraineté une invitation de Wagner", a déclaré Victoria Nuland, en référence au groupe paramilitaire russe Wagner, présent notamment au Mali voisin.
De son côté, "la junte a demandé à la délégation de la Cédéao de revenir" d'ici mardi au Niger, a déclaré lundi à TV5 Monde le Premier ministre nigérien déchu Ouhoumoudou Mahamadou. Cette délégation, arrivée jeudi à Niamey, était repartie quelques heures plus tard sans avoir pu rencontrer ni le général Tiani ni le président Bazoum.
Plusieurs voix africaines ont rejeté ces derniers jours l'option militaire. Une intervention militaire pourrait être "une catastrophe", a prévenu à Bamako le chef de la diplomatie malienne Abdoulaye Diop.
L'Algérie, autre voisin du Niger et acteur majeur dans le Sahel, s'est également déclarée opposée à une intervention. Certains pays occidentaux, comme l'Allemagne et l'Italie, ont eux aussi plaidé pour une solution diplomatique. Une délégation conjointe Mali-Burkina Faso a été envoyée à Niamey en soutien aux militaires nigériens
"Nous avons réitéré" la "décision des présidents (malien Assimi) Goïta et (burkinabè Ibrahim) Traoré de participer pleinement aux opérations de légitime défense aux côtés des Forces de défense et de sécurité nigériennes", a affirmé le porte-parole du gouvernement malien Abdoulaye Maïga.
Le Burkina Faso et le Mali, voisins du Niger eux aussi gouvernés par des militaires et confrontés à la violence des groupes djihadistes, ont souligné ces derniers jours qu'une intervention armée serait "une déclaration de guerre" à leurs deux pays.
Peu avant la fin de l'ultimatum fixé par la Cédéao, ils ont annoncé fermer l'espace aérien du Niger "jusqu'à nouvel ordre". "Tout Etat impliqué sera considéré comme cobelligérant", ont-ils ajouté.
Les militaires ont annoncé lundi soir la nomination d'un Premier ministre, Ali Mahaman Lamine Zeine, ancien ministre des Finances du président Mamadou Tandja, et celle d'Habibou Assoumane, nouveau commandant de la garde présidentielle.