Fil d'Ariane
Une délégation ouest-africaine est arrivée à Niamey pour tenter de trouver une solution diplomatique à la crise au Niger. Des militaires ont pris le pouvoir fin juillet. Cette visite intervient au lendemain d'une annonce de la Cédéao se disant prête à engager une intervention armée.
Les États-major des pays membres de la Cédéao étaient réunis à Accra, au Ghana, pour discuter d'une intervention militaire au Niger.
La délégation de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), qui a atterri à la mi-journée dans la capitale nigérienne, est conduite par l'ancien président nigérian Abdulsalami Abubakar, selon la cellule communication du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP) qui a pris le pouvoir au Niger. Abdulsalami Abubakar s'était déjà rendu à Niamey au nom de la Cédéao le 3 août, mais n'avait rencontré ni le nouvel homme fort du Niger, le général Abdourahamane Tiani, ni le président renversé.
Selon une source proche de la Cédéao, cette délégation souhaite transmettre "un message de fermeté" aux militaires à Niamey et rencontrer le président Bazoum toujours retenu prisonnier. Le 18 août, le commissaire aux affaires politiques, à la paix et à la sécurité de l'organisation régionale, Abdel-Fatau Musah avait annoncé que cette mission avait pour objectif de "continuer à suivre la voie pacifique pour rétablir l'ordre constitutionnel".
La voie diplomatique est donc toujours privilégiée par la Cédéao qui a toutefois indiqué être prête à utiliser la force pour rétablir l'ordre constitutionnel au Niger. "Nous sommes prêts à intervenir dès que l'ordre sera donné. Le jour de l'intervention a aussi été fixé", a déclaré Abdel-Fatau Musah, à l'issue d'une réunion de deux jours des chefs d'état-major ouest-africains à Accra, au Ghana.
Selon lui, ont été convenus lors de cette réunion "les objectifs stratégiques, l'équipement nécessaire et l'engagement des États membres" pour cette possible intervention. Cette option militaire est brandie par la Cédéao depuis plusieurs semaines. Le 10 août, les dirigeants ouest-africains avaient ordonné le déploiement d'une "force en attente", dont les contours ont été dessinés le 19 août à Accra. Ni les modalités ni un éventuel calendrier n'ont toutefois été rendus publics.
Une autre initiative diplomatique a eu lieu le 19 août. Le Premier ministre nommé par les militaires nigériens, Ali Mahaman Lamine Zeine, s'est entretenu avec une délégation de l'ONU conduite par Leonardo Santos Simão, le représentant spécial du secrétaire général pour l'Afrique de l'Ouest et le Sahel.
"Il faut d'abord écouter les autorités, leur point de vue pour étudier ensemble un chemin afin que le pays rentre aussi rapidement que possible dans la normalité et la légalité constitutionnelle. Nous sommes convaincus que c'est toujours possible par le dialogue", a déclaré Leonardo Santos Simão à l'issue de cette rencontre.
À Niamey, le nouveau régime reste pour le moment inflexible et avait affirmé qu'une intervention armée serait une "agression illégale et insensée". Ce 19 août, des milliers de volontaires se sont rassemblés aux abords du stade Seyni Kountché, dans le centre-ville de la capitale. Ils répondent à un appel de plusieurs organisations pour se faire inscrire sur des listes en tant qu'auxiliaires civils potentiellement mobilisables en soutien des forces armées.
Plus de trois semaines après le coup d’État, les conditions de détention du président déchu Mohamed Bazoum inquiètent la communauté internationale et se "détériorent" selon le président du Nigeria Bola Tinubu. Dans une interview au New York Times, le nouveau Premier ministre nigérien a de son côté assuré qu'il "n'arrivera rien" à Mohamed Bazoum.
Dans les heures qui ont suivi le coup d’État, la France avait été sollicitée pour apporter son appui à une éventuelle intervention de l'armée nigérienne pour libérer M. Bazoum, selon des source proche du dossier. "Mais les loyalistes ont changé de camp et rejoint les putschistes. Les conditions n'étaient donc pas réunies pour satisfaire cette demande d'appui", précise cette source, qui n'a pas précisé la nature de l'aide que Paris aurait pu potentiellement apporter.
Environ 1 500 militaires français sont stationnés au Niger, en vertu d'accords de défense entre les deux pays, notamment pour la lutte contre les jihadistes qui endeuillent régulièrement le pays par leurs attaques sanglantes depuis plusieurs années. Le 15 août, au moins 17 soldats ont été tués dans une attaque près du Burkina Faso, la plus meurtrière depuis le coup d’État. Toujours en début de semaine, au moins 28 civils sont morts dans des violences dans plusieurs villages près du Mali, selon une source officielle locale qui n'a pas précisé la nature de ces violences.