Fil d'Ariane
Les Burkinabés votent ce dimanche 22 novembre. Election présidentielle couplée à des élections législatives. Pour le scrutin présidentiel, ils auront le choix entre treize candidats, dont le sortant Roch Marc Christian Kaboré. Une élection marquée cette année également par le retour du parti de l’ancien président Blaise Compaoré. Qui sera le locataire du Palais de Kosyam au cours des cinq prochaines années ? Tour d’horizon.
“Ça a été une lutte contre la monarchisation du pouvoir”. Fin septembre 2015, quand Roch Marc Christian Kaboré, candidat à la présidentielle, est invité au Journal Afrique de TV5MONDE, il résume ainsi le combat mené au cours des précédents mois contre un homme dont il a pourtant longtemps été proche, Blaise Compaoré. Car si, à l’époque, il incarne une nouvelle ère pour le Faso, Kaboré n’est pas un nouveau venu et il a déjà occupé les plus hauts postes au sein du régime déchu, mais “nous avons pris notre indépendance” répond-il à Linda Giguère sur notre plateau lorsqu’elle l’interroge sur des soupçons de proximité avec l’ancien président.
"Notre lutte est entrée en phase finale. Maintenant, ça passe ou ça casse, la patrie ou la mort ! (...) le changement est maintenant ou jamais". Le 30 octobre 2014, à Ouagadougou, la rue gronde. Dans quelques heures, sa colère aura raison du président Blaise Compaoré en poste depuis 27 ans. Et ce jour-là, Zéphirin Diabré harangue la foule. A la tête de son tout jeune parti, l'Union pour le progrès et le changement (UPC), Zéph' incarne cette opposition prête à prendre les commandes du Burkina Faso post-Compaoré.
Juillet 2018, devant un Palais des sports bondé à Ouaga-2000, le même Zéphirin Diabré détaille sa stratégie : "Il faut savoir évoluer. Nous nous sommes séparés en 2014 sur la modification de l'article 37, mais maintenant il faut regarder devant nous". De quelle évolution parle-t-il ? De la main tendue au CDP, le parti de l'ancien président Blaise Compaoré...
Derrière ce qui peut s'apparenter à un curieux pragmatisme politique, une évidence pour Zéphirin Diabré : le président Kaboré est en train d'échouer, et il faudra donc le battre en 2020.
Cette année sera donc celle de la revanche. En 2015, si Roch Marc Christian Kaboré l'a emporté dès le premier tour, Diabré est arrivé second avec près de 30% des voix, loin, très loin devant le 3e homme.
"Les gens n'ont pas compris". A l'écouter le lundi 17 novembre 2020 sur TV5MONDE, Eddie Komboïgo considère la révolution d'octobre 2014 et le débat qu'il l'a précédée sur l'article 37 comme un gigantesque malentendu. D'ailleurs, estime-t-il, "ceux qui ont manifesté il y a sept ans sont les mêmes qui veulent le retour du CDP au pouvoir aujourd'hui". Visiblement, pour Eddie Komboïgo, pas question de revendiquer un quelconque droit d'inventaire, cette séquence politique toujours ultra-sensible consistant à revenir sur les agissements passés de son parti, en prenant le risque de l'implosion.
"Vous ne pouvez pas obtenir que tout le monde pense la même chose. Si vous être convaincu d’une chose, vous le faites et vous demandez aux autres de vous accompagner. S’ils vous accompagnent tant mieux, s’ils refusent de vous accompagner, tant mieux aussi". Lorsqu'il prononce ces mots le 16 février 2019 à Bobo-Dioulasso, Kadré Désiré Ouédraogo décide de partir avec une longueur d'avance, au moins dans le calendrier. C'est en effet ce jour-là, il y a presque deux ans, qu'il se lance dans la course à la
L'homme porte un t-shirt jaune à l'effigie de Thomas Sankara et brandit un écriteau "Zida, c'est Judas". Nous sommes le 2 novembre 2014 à Ouagadougou et chez les manifestants c'est l'incompréhension. Si leur révolution a contraint Blaise Compaoré au départ après 27 années de pouvoir, les voilà avec à la tête du pays, un militaire issu de la garde rapprochée du président déchu.
Zida est né le 16 novembre 1965 à Yako dans le Nord du pays.
"Une vision claire, un chemin cohérent". A 45 ans, Tahirou Barry se présente comme le candidat de la jeunesse. Mais il n'est pas un nouveau venu. En 2015, le 3e homme c'était lui, même si avec ses 3,09% il était très loin derrière Zéphirin Diabré et, a fortiori, Roch Marc Christian Kaboré. Tahirou Barry, qui se présente cette année sous les couleurs du Mouvement pour le changement et la renaissance (MCR) avait ensuite été pendant deux ans ministre de la Culture, avant de claquer la porte en se disant "déçu".
"Nous avons un programme révolutionnaire anti-impérialiste et un programme panafricain". Ségui Ambroise Farama défend de son côté une "révolution civile". Lors de son discours d'investiture, cet avocat de 44 ans qui se présente sous les couleurs de l'Organisation des peuples africains (OPA-BF) s'est voulu clair : son objectif est la fin du "système" dont les partis et le président "ne sont que l’arbre de la médiocratie corrompue qui cache la forêt néocoloniale de la domination du Faso et de l’Afrique".
A 47 ans, Monique Yéli Kam est la seule femme candidate cette année. Née à Bobo-Dioulasso, elle a fondé le Mouvement pour la Renaissance du Burkina (MRB), une association oeuvrant pour l'insertion des jeunes. Le MRB est devenu un parti politique cette année, et c'est sous ses couleurs qu'elle se présente.
A 67 ans, Ablassé Ouédraogo dispose d'un curriculum vitae de plusieurs pages. Le candidat de Le Faso autrement, qui a étudié l'économie à Nice dans le sud de la France au début des années 80, a par la suite été enseignant à Ouagadougou avant de travailler douze ans pour le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). Il occupera également de hautes fonctions à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ou encore à la Banque africaine de développement (BAD). Au niveau national, il a été ministre des Affaires étrangères durant cinq ans dans la deuxième moitié des années 90.
En 2015, Gilbert Noël Ouédraogo, aujourd'hui âgé de 51 ans, n'avait pas pu se présenter. Sa candidature avait été retoquée par le Conseil constitutionnel pour cause de soutien à la modification de l'article 37. Cette année, cet ancien ministre de l'action sociale et de la solidarité nationale, puis ministre des transports, se lance sous les couleurs de l'Alliance pour la Démocratie et la Fédération – Rassemblement Démocratique Africain (ADF-RDA) qu'il préside depuis 2003.
A 63 ans, Do Pascal Kiemdoro Sessouma est un novice en politique. Journaliste, il a présenté les journaux de la RTB, la Radiodiffusion télévision du Burkina (RTB) de 1981 à 1984 et de 1997 à 2001. Son parti créé cette année, Vision Burkina, défend un programme pacifiste.
Abdoulaye Soma, 41 ans, est le plus jeune des treize candidats à cette présidentielle. Juriste, spécialiste en droit international, ses études l'ont notamment conduit à Genève en Suisse. Rentré à Ouagadougou, Abdoulaye Soma a créé un cabinet de consultant ainsi qu'une maison d'édition qui porte son nom. Lors de la transition, après la chute de Blaise Compaoré, il a été conseiller spécial du président Michel Kafando. Abdoulaye Soma se présente sous les couleurs du Mouvement soleil d'avenir, un parti qu'il a créé en 2019.
Spécialiste en management et ressources humaines diplomé en France, Claude Aimé Tassembedo, 51 ans, ne se présente sous aucune étiquette. Candidat indépendant, il ne s'est jamais présenté à aucune élection.
► Pour ces courtes notes biographiques, nous nous sommes appuyés notamment sur les fiches du site du "think tank citoyen" Wathi.