Présidentielle au Sénégal: le Conseil constitutionnel s'aligne sur la date du 24 mars

Jeudi 7 mars, le Conseil constitutionnel sénégalais a annoncé que l’élection présidentielle allait se tenir le 24 mars prochain. L’instance s'est finalement alignée sur la date avancée par la présidence. Le Conseil constitutionnel avait un un temps retenu celle du 31 mars. Après cette annonce, les Sénégalais peuvent-ils entrevoir une sortie de la crise politique ? 

Image
31072022 élections bureau de vote sénégal

Photo d'illustration. Un électeur sénégalais sort d'un isoloir dans un bureau de vote à Dakar après avoir voté pour les élections législatives. Sénégal, dimanche 31 juillet 2022. 

AP/Léo Correa
Partager2 minutes de lecture

Le Conseil constitutionnel sénégalais a tranché. Jeudi 7 mars, les Sages ont annoncé que le premier tour de l'élection présidentielle pouvait se tenir le 24 mars, une date plébiscitée par la présidence.

Le Conseil constitutionnel avait d'abord fixé la présidentielle au 31 mars, une semaine après celle arrêtée par la présidence, dans une décision rendue mercredi 6 mars. Ce jeudi, le Conseil constitutionnel a dit dans un communiqué qu'il n'avait fait que "pallier l'inertie de l'administration" en retenant le 31 mars.

L'instance a laissé entendre que l'exécutif avait entretemps remédié à cet état de fait, en prenant des décrets convoquant le corps électoral le 24. Les décrets pris par le président sont donc "conformes à (l')exigence" d'organisation du scrutin avant la fin du mandat du président Macky Sall le 2 avril, a dit le Conseil constitutionnel.

07032024 sénégal communiqué officiel du conseil consitutionnel

Dans un communiqué publié le jeudi 7 mars 2024, le Conseil constitutionnel sénégalais annonce que la présidentielle pourra bien se tenir le 24 mars prochain.

Conseil constitutionnel du Sénégal

Soulagement à Dakar

Avec cet ajustement, les Sénégalais peuvent entrevoir une sortie de la crise provoquée par le report de l'élection initialement prévue le 25 février. Ils savent à présent que, sauf nouveau rebondissement, ils éliront leur cinquième président le 24 mars et entrevoient une sortie de la crise profonde provoquée par le report de dernière minute de l'élection.

Après un mois d'un flottement qui a alarmé l'opinion nationale et une partie de la communauté internationale, les Sénégalais peuvent entrer précipitamment en campagne en vue de la présidentielle, peut-être la plus ouverte de leur histoire contemporaine. Après la commotion et l'incertitude causées par le report, des Dakarois ont exprimé leur soulagement. 

Le Sénégal va pouvoir respirer à nouveau.

"Les étudiants et tout le monde étaient dans une situation un peu angoissante et stressante", dit Mamadou Dramé, étudiant lui-même. "Enfin le Sénégal va pouvoir respirer à nouveau". "On (avait) l'impression que le pays (avait) arrêté de tourner", dit l'artiste rappeur se présentant sous le nom de Xuman. "Dans moins de trois semaines on ira aux urnes. Je pense qu'il est grand temps qu'on essaie de tourner cette page et qu'on passe à autre chose", dit-il.

“Victoire du peuple” 

Le 24 mars évite à la communauté chrétienne, significative, de voter le dimanche de Pâques. La campagne se déroulera pendant le mois de jeûne musulman. Elle sera plus courte que les 21 jours prescrits par le code électoral.

Mais Babacar Gueye, un des leaders du collectif citoyen Aar Sunu Election ("Préservons notre élection"), a souligné qu'après les affres récents, tout le monde ou presque était prêt à presser le mouvement. Cet horizon qui se dégage, "c'est la victoire de tout le peuple qui voulait aller à une élection dont il était privé", dit-il.

Des points de crispation primordiaux semblent traités : le Conseil, confirmant une position antérieure, a refusé que l'élection se tienne après l'expiration du mandat du président Sall le 2 avril. Il a rejeté la date du 2 juin préconisée par un "dialogue national" convoqué par le chef de l'État pour sortir de la crise, et largement acquis à sa cause.

Le Conseil a fait barrage à un réexamen de la liste des 19 candidats qu'il avait validée dès janvier, à un désistement près survenu depuis. Le président Sall a justifié le report par la crainte de nouveaux troubles, après ceux connus en 2021 et 2023, en cas d'élection contestée.

Karim Wade et Ousmane Sonko hors-jeu

Un large front de l'opposition, d'une grande partie des candidats qualifiés et de la société civile s'est formé contre ce qui a été présenté comme un "coup d'État constitutionnel". Le président a été accusé de chercher à s'accrocher au pouvoir et à conjurer la défaite à venir du Premier ministre Amadou Ba, désigné candidat à sa succession. Macky Sall, président sortant, s'en défend. Des manifestations ont fait quatre morts. Il y a eu des dizaines d'arrestations.

Karim Wade, fils de l'ancien président Abdoulaye, reste hors course, tout comme Ousmane Sonko, chef de file de l'opposition antisystème et acteur principal d'un bras de fer avec le pouvoir qui a tourné depuis 2021 à une confrontation meurtrière dans laquelle des dizaines de personnes ont perdu la vie et des centaines d'autres ont été arrêtées. M. Sonko est détenu depuis 2023. Donné comme l'un des favoris de la présidentielle, il en a été disqualifié par le Conseil constitutionnel en janvier 2024.

Son second et suppléant désigné, Bassirou Diomaye Faye, bien qu'emprisonné lui aussi, se retrouve, lui, confirmé dans la course. Ousmane Sonko et Bassirou Diomaye Faye pourraient être éligibles à une libération après l'adoption par l'Assemblée d'une loi amnistiant les actes commis en lien avec les manifestations politiques depuis 2021.

Rien ne permet de dire si et quand Bassirou Diomaye Faye, voire Ousmane Sonko, pourraient être relâchés, ni quand la loi serait promulguée. La date d'un deuxième tour, probable en l'état actuel des candidatures, n'a pas été communiquée.