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©TV5MONDE / Interview réalisée par K.G. Barzegar
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Présidentielle en RDC : vers l'exclusion des Congolais de l'étranger

Un projet de loi prévoyant un moratoire au vote des Congolais de l'étranger a été déposé devant le Parlement afin d'exclure la participation de la diaspora au scrutin présidentiel prévu le 23 décembre prochain en République démocratique du Congo, a confirmé Emmanuel Ilunga, ministre délégué aux Affaires étrangères en charge des Congolais de l'étranger, ajoutant que le Parlement devrait statuer "avant la fin du mois".

L'enregistrement sur les listes électorales des Congolais de l'étranger est une obligation de la Constitution congolaise. Le calendrier électoral de la RDC prévoit de les enrôler dès le mois de juillet. Mais le gouvernement congolais a soumis un projet de loi au Parlement qui vise à exclure la diaspora congolaise du scrutin.

"En ce moment c'est déjà en discussion au Parlement et il y a même le président de la CENI qui a été convoqué pour pouvoir s'expliquer devant les représentants du peuple", a déclaré Emmanuel Ilunga, ministre délégué aux Affaires étrangères en charge des Congolais de l'étranger, contacté mercredi 6 juin 2018 par la rédaction de TV5MONDE.

Si le travail se fait dans un rythme légèrement accéléré, avant la fin de ce mois, nous aurons une réponse.Emmanuel Ilunga, ministre délégué aux Affaires étrangères

Un enrôlement impossible dans le temps imparti ?

Pour le ministre, inscrire et faire voter les Congolais de l'étranger pose des problèmes immenses en termes de temps et de moyens humains et financiers. "Nous avons besoin d'une logistique, de la formation en hommes et de moyens financiers", a-t-il déclaré. 

"A ce jour, en ce qui concerne le processus électoral, nous avons presque dépassé les un milliard de dollars alors que le pays en a besoin pour les routes, les hôpitaux, et autres, mais tout est concentré sur la question électorale", a-t-il ajouté.


Parmi les arguments présentés, il note par exemple que les Congolais de l'étranger, évalués entre "7 et 8 millions", "sont répartis de manière inégale dans le monde (…) La loi nous demande de les enrôler tous, ce qui veut dire que nous devons aller dans les 170 ou 180 pays dans le monde pour les enrôler", a remarqué le ministre, affirmant que c'est une mission "pas impossible, mais difficile" au vu du calendrier électoral actuel.

Pour la diaspora, le régime veut "bloquer la machine" électorale

Depuis des semaines, certains Congolais de l'étranger dénoncent des manoeuvres du régime du président Joseph Kabila pour les empêcher de voter. "C'est un droit, c'est acquis, mais ce régime, ce gouvernement, est en train d'utiliser tous ses moyens juridiques ou politiques pour bloquer la machine", déclarait ainsi un expatrié congolais basé à Paris et interrogé au mois de mai par TV5MONDE (voir notre reportage ci-dessous).

A Kinshasa également, la société civile s'interrogeait sur les méthodes de l'exécutif congolais. "C'est quand même curieux que d'ailleurs cela ne vienne pas de la CENI, cela vient du ministre (Emmanuel Ilunga). On se demande à quel titre et en quelle qualité il intervient dans l'organisation du processus électoral ?", déclarait début mai un membre de la société civile congolaise.

Pour Emmanuel Ilunga, il ne s'agit pas du tout de manoeuvres politiques. Sa solution : que les Congolais de l'étranger rentrent en RDC pour s'enrôler. "Il n'y a aucune mauvaise volonté, nous voulons ces élections, et nous voulons les faire dans un climat apaisé", a-t-il affirmé, rappelant que 40 millions de Congolais avaient été inscrits sur les listes dans le pays.
 
S'ils (les Congolais de la diaspora) sont prêts à  voter, nous pouvons faire une exception. Qu'ils rentrent au pays, s'enrôler.Emmanuel Ilunga, ministre délégué aux Affaires étrangères

"La loi va tout légitimer"

Le ministre reconnaît toutefois qu'il pourrait être reproché à l'exécutif d'exclure des millions de Congolais du scrutin, et d'organiser ainsi un scrutin inéquitable: "on peut nous le reprocher, c'est pour cela que nous passons par le Parlement."
 
Nous ne pouvons pas le faire unilatéralement parce que nous n'en avons pas le pouvoir, sinon on allait le faire, mais si on le fait pas, on passe au Parlement pour que ça passe par une loi et c'est la loi qui va tout légitimer.Emmanuel Ilunga, ministre délégué aux Affaires étrangères
Et de conclure : "Si les parlementaires ne veulent pas de notre proposition, à ce moment-là, nous allons venir enrôler, mais ça prendra beaucoup plus de temps que prévu. Ça, je préfère quand même avertir."
 
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