La classe politique toujours agitée après l'annonce d'une présidentielle probable pour 2019, seulement... Mais la fronde a déjà commencé chez les députés. Depuis une semaine, ils boycottent les travaux parlementaires et demandent le départ du président de l'Assemblée nationale. Ils l'accusent de partialité.
Forte tension politique à l'Assemblée nationale en république démocratique du Congo, où les députés de l'opposition boudent les travaux parlementaires et ont initié une pétition pour obtenir le départ d'Aubin Minaku, président de l'assemblée nationale mais aussi secrétaire général de la Majorité Présidentielle.
Les députés de l'opposition l'accusent de partialité dans la conduite des débats. Pour les parlementaires de l’opposition, la question des motions incidentielles de la majorité présidentielle qui bloquent systématiquement les motions de défiance ou de censure à l’encontre des membres du gouvernement doit être éclaircie avant qu’ils reviennent sur leur décision de suspension des travaux...
La semaine dernière, l'opposition a déposé des motions de défiance contre le ministre de l'Intérieur, Emmanuel Shadari, et son collègue de la Justice, Alexis Thambwe Mwamba. Or Aubin Minaku a laissé passer une motion incidentielle proposé par le député de la Majorité Présidentielle Zacharie Bababaswe qui a empêché l'examen de ces deux motions de défiance. Le vice premier ministre en charge de l’Intérieur Emmanuel Shadari pour sa gestion du dossier des violences dans la région du Kasaï et le ministre de la Justice et Garde des Sceaux, Alexis hambwe Mwamba sur le dossier des évasions massives enregistrées dans les prisons congolaises ces derniers mois notamment celle de la Prison Centrale de Makala.
Pour la mouvance présidentielle, les opposants sont dans un schéma insurrectionnel. Le boycott des plénières de la chambre basse procède de leur stratégie du chaos.
Accusation de "forfaiture"
Jeudi 12 octobre 2017, l'opposition congolaise a accusé le chef de l'Etat Joseph Kabila de
"forfaiture" après que la commission électorale a annoncé qu'il n'y aurait pas d'élection présidentielle avant 2019, alors que la communauté internationale continue de réclamer la publication d'un calendrier électoral.
Cette annonce la veille de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) enterre définitivement l'accord entre le pouvoir et l'opposition du 31 décembre 2016 conclu sous l'égide de l'Eglise catholique et qui prévoyait des élections présidentielle, législatives et locales au plus tard fin 2017. La Constitution interdit à Joseph Kabila, dont le second et dernier mandat a pris fin le 19 décembre 2016, de se représenter.
Devant cette énième forfaiture, Joseph Kabila et son serviteur Corneille Nangaa (ndlr: le président de la CENI) ont déclaré la guerre au peuple congolais et se sont de ce fait disqualifiés.Félix Tshisekedi, président du Rassemblement de l'opposition, à l'issue d'une réunion des cadres de sa coalition à Kinshasa
La
"feuille de route" du Rassemblement, a-t-il rappelé, prévoit après le 31 décembre 2016 une
"courte transition sans Kabila" conduite par des personnalités chargées d'organiser des élections dans les six mois. Souvent en déplacement à l'étranger, M. Tshisekedi a annoncé
"des démarches auprès de la communauté internationale, à travers l'ONU, pour une implication directe dans l'organisation des élections en RDC".
Mobilisation de la communauté internationale
Les Nations unies et les grands pays-partenaires continuent de réclamer l'application intégrale de l'accord du 31 décembre 2016.
"A l'heure actuelle, la publication d'un calendrier électoral réaliste, l'établissement d'un budget pour la tenue des élections, la mise en oeuvre des mesures de décrispation et la garantie du respect des droits et libertés fondamentales sont les principales conditions à remplir pour faire avancer le processus politique", a déclaré le représentant de l'ONU en République démocratique du Congo Maman Sidikou mercredi devant le Conseil de sécurité à New York.
"A notre connaissance, il n'y a pas eu de communication officielle de la part de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) sur le calendrier électoral. Nous appelons à la mise en oeuvre urgente et dans son intégralité de l'accord politique du 31 décembre 2016, afin que soient organisées, dans les plus brefs délais, des élections crédibles et inclusives", a quant à lui réagi jeudi le ministère français des Affaires étrangères.
"Mon pays a bel et bien mis le cap vers les élections (...). Le calendrier sera publié incessamment", a pour sa part répété de New York le ministre congolais des Affaires étrangères, Leonard She Okintundu, cité par la radio onusienne Okapi.
La presse congolaise bruisse de rumeurs sur de prochaines initiatives diplomatiques qui n'ont pour l'instant pas été confirmées, comme une visite à Kinshasa du président sud-africain Jacob Zuma ce week-end, puis de la représentante des Etats-Unis à l'ONU Nikki Haley la semaine prochaine.
Appel à l'Article 64 de la Constitution?
Annonçant une tournée -Lubumbashi dans le sud-est, l'est de la République démocratique du Congo en proie aux groupes armés, etc.-, M. Tshisekedi n'a en revanche pas lancé d'appel à la désobéissance civile ni
"à la rue" contrairement à ce qu'avait fait son allié en exil Moïse Katumbi il y a quelques semaines.
"Cette fois-ci, nous n'allons pas appelé le peuple à des actions", a-t-il répondu à l'AFP, interrogé sur l'article 64 de la Constitution autorisant
"tout Congolais" à
"faire échec" à celui qui
"prend le pouvoir par la force ou qui l'exerce en violation des dispositions de la présente Constitution".
"Comment est-ce que l'article 64 se matérialise sur le terrain ? C'est à cela que nous travaillons", a-t-il dit.
La répression de manifestations contre Joseph Kabila avait fait plusieurs dizaines de morts les 19 septembre et 19 décembre 2016. Certains
"parlementaires debout", ces Kinois qui commentent l'actualité près des vendeurs de journaux, redoutent de nouvelles violences.
Mais moi je vous dit qu'il pleuve ou qu'il neige, on ira aux élections en décembre 2017, sinon Kabila va provoquer une guerre civile dans ce pays, ça sera catastrophique.Un habitant de Kinshasa